lundi 17 juin 2013

Victor Cousin — Œuvres diverses

[Avec mises à jour périodiques. — With periodical updates.]

VEUILLEZ NOTER: En faisant la publicité de ces pensées, le rédacteur de ce site n'endosse en aucune façon la signification de leur contenu. Si elles sont présentées ici, c'est qu'elles nous semblent offrir une matière importante à réflexion, par la pertinence de leur thématique ainsi que par la clarté de leur énonciation et des implications qui peuvent en découler. Par ailleurs, nous encourageons ceux qui y seront exposés à l'esprit de critique et de discernement le plus développé, afin d'en retirer non seulement la «substantifique moëlle», selon l'expression de Rabelais, mais encore la vérité la plus haute qu'elles pourraient celer, en relevant le défi de retrouver la vérité suprême, là où elle veut bien se révéler, y compris dans son expérience de vie immédiate, à l'esprit qui la recherche avec engagement, conviction et passion.


EXTRAITS D'ŒUVRES DE VICTOR COUSIN

«Nous n'avons de droits les uns sur les autres que parce que nous avons des devoirs: c'est dans cette corrélation que réside la paix de la société.» — V. COUSIN. Œuvres I. Société belge de librairie. Bruxelles, 1840. p. 435.

«Si l'homme n'était qu'une intelligence, il n'y aurait pour lui que des vérités spéculatives; mais il est aussi un être actif et volontaire; les vérités deviennent donc morales et pratiques: le vrai devient le bien.» — V. COUSIN. Œuvres I. Société belge de librairie. Bruxelles, 1840. p. 436.

«... combattre est dur, vaincre est triste.» — V. COUSIN. Œuvres I. Société belge de librairie. Bruxelles, 1840. p. 445.

«Celui qui se prétend athée, et qui reconnaît la justice, se frappe lui-même de contradiction, comme celui qui se pique de religion et qui nie la justice.» — V. COUSIN. Œuvres I. Société belge de librairie. Bruxelles, 1840. p. 446.

«Heureux les individus et les peuples qui, sachant qu'ils ne sont pas des choses, connaissent les rapports de la raison à la vérité et à la liberté ! Malheureux ceux qui, reconnaissant leur liberté, ne savent pas l'usage qu'ils doivent en faire. Ils se renferment dans les limites de leur liberté, et se bornent à une vie négative...» — V. COUSIN. Œuvres I. Société belge de librairie. Bruxelles, 1840. p. 450.

«... il faut que la psychologie devienne logique, c'est-à-dire qu'elle se prenne elle-même pour objet de son examen, car la logique n'est qu'un retour de la psychologie sur elle-même.» — V. COUSIN. Œuvres I. Société belge de librairie. Bruxelles, 1840. p. 450.

«La vraie religion n'est que ce mot ajouté à l'idée de la vérité: Elle est.» — V. COUSIN. Œuvres I. Société belge de librairie. Bruxelles, 1840. p. 450. 


«Lorsque les peuples du Nord franchirent les barrières qui les séparaient des Gaules et de l'Italie, tout en détruisant la forme romaine, ils furent bien forcés d'en retenir quelque chose. Plusieurs de ces conquérans [sic] rapportèrent dans leur patrie les habitudes de la conquête; le despotisme militaire suivit les chefs victorieux et s'établit à la faveur même de leurs services et de leur gloire. Ainsi la conquête enfante toujours le despotisme, non-seulement pour les vaincus, mais aussi pour les vainqueurs.» — V. COUSIN. «Kant et sa philosophie». Revue des deux mondes. Tome 21. 1840. p. 385.

«Or, dans tout inventeur, dans tout penseur original, c'est la méthode qu'il faut avant tout rechercher, car cette méthode est le germe de tout le reste: souvent elle survit aux vices de ses applications.» — V. COUSIN. «Kant et sa philosophie». Revue des deux mondes. Tome 21. 1840. p. 393.

«La conception primitive de la raison ne précède pas le phénomène de la conscience, ni le phénomène de conscience ne précède la conception de la raison: ils sont tous deux contemporains dans l'unité du fait primitif de conscience. Et la conception de la raison, encore une fois, n'est pas un raisonnement, car sur quoi ce raisonnement s'appuierait-il ? Où la raison chercherait-elle son principe, sa majeure ? Toute majeure, quelle qu'elle soit, aura le double vice, [...], se supposer ce qu'elle veut prouver, et de ne donner qu'une entité logique.» — V. COUSIN. Examen de la métaphysique de Kant. Boitel. Lyon, 1842. p. 42.

«Le dernier des hommes, dans le sentiment de la misère inhérente à sa nature bornée, conçoit obscurément et vaguement l'être tout parfait, et ne peut le concevoir sans se sentir soulagé et relevé, sans éprouver le besoin et le désir de retrouver et de posséder encore, ne fût-ce que pendant le moment le plus fugitif, la puissance et la douceur de cette contemplation, conception, notion, idée, sentiment: car qu'importent ici les mots, puisqu'il n'y a pas de mots pour l'âme ?» — V. COUSIN. Examen de la métaphysique de Kant. Boitel. Lyon, 1842. p. 45.

«Plus la conviction est sincère et profonde, plus elle peut être dangereuse; et l'honnête homme qui la sent au fond de son cœur avec l'autorité périlleuse qu'elle lui donne, a l'obligation de s'absoudre d'avance de la contagion des erreurs qui lui échappent, en armant son auditoire contre lui-même, en la formant à l'indépendance, en discutant préalablement et sans cesse l'esprit général de ses leçons, c'est-à-dire en insistant sur la méthode.» — V. COUSIN. Préface (1ère édition). In Fragments philosophiques (3ième édition). Ladrange. Paris, 1838. p. 46.

«L'apologie d'un siècle est dans son existence, car son existence est un arrêt et un jugement de Dieu même, ou l'histoire n'est qu'une fantasmagorie insignifiante.» — V. COUSIN. Préface (1ère édition). In Fragments philosophiques (3ième édition). Ladrange. Paris, 1838. p. 47.

«La foi n'est ni épuisée ni diminuée. Le genre humain, comme l'individu, ne vit que de foi; seulement les conditions de la foi se renouvellent.» — V. COUSIN. Préface (1ère édition). In Fragments philosophiques (3ième édition). Ladrange. Paris, 1838. p. 48.

«Il n'est pas en la puissance des systèmes les plus extravagants de n'avoir pas quelques côtés raisonnables; et c'est toujours le sens commun inaperçu qui fait la fortune des hypothèses auxquelles il se mêle. Au fond de tout ce qu'il y a de vrai et de durable dans les systèmes épars à travers les âges est l'ouvrage de l'observation qui travaille pour la philosophie souvent à l'insu du philosophe; et, chose étrange, il n'y a d'immortel dans la mobilité des doctrines humaines que ce qui vient précisément de cette méthode expérimentale qui a l'air de ne pouvoir saisir que ce qui se passe.» — V. COUSIN. Préface (1ère édition). In Fragments philosophiques (3ième édition). Ladrange. Paris, 1838. p. 51.

«Les méthodes ne se perfectionnent qu'en s'appliquant ...» — V. COUSIN. Préface (1ère édition). In Fragments philosophiques (3ième édition). Ladrange. Paris, 1838. p. 53.

«Le champ de l'observation philosophique, c'est la conscience, il n'y en a pas d'autre, mais dans celui-là il n'y a rien à négliger; tout est important, car tout se tient, et une partie manquant, l'unité totale est insaisissable. Rentrer dans la conscience et en étudier scrupuleusement tous les phénomènes, leurs différences et leurs rapports, telle est la première étude du philosophe; son nom scientifique est la psychologie. La psychologie est donc la condition et comme le vestibule de la philosophie.» — V. COUSIN. Préface (1ère édition). In Fragments philosophiques (3ième édition). Ladrange. Paris, 1838. p. 54.

«La liberté ne peut être seulement la volonté, car alors la spontanéité ne serait pas libre; et d'un autre côté la liberté ne peut être seulement la spontanéité, car la volonté ne serait plus libre à son tour.» — V. COUSIN. Préface (1ère édition). In Fragments philosophiques (3ième édition). Ladrange. Paris, 1838. p. 69.

«Si le fait est incontestable, si la physique moderne ne s'occupe plus que de forces et de lois, j'en conclus rigoureusement [c'est Cousin qui parle] que la physique, qu'elle le sache ou qu'elle l'ignore, n'est pas matérialiste, et qu'elle s'est faite spiritualiste le jour où elle a rejeté toute méthode que l'observation et l'induction, lesquelles ne peuvent jamais conduite qu'à des forces et des lois; or qu'y a-t-il de matériel dans des forces et des lois ?» — V. COUSIN. Préface (1ère édition). In Fragments philosophiques (3ième édition). Ladrange. Paris, 1838. p. 73.


«Le Dieu de la conscience n'est pas un Dieu abstrait, un roi solitaire relégué par-delà la création sur un trône désert d'une éternité silencieuse et d'une existence absolue qui ressemble au néant même de l'existence: c'est un Dieu à la fois vrai et réel, à la fois substance et cause, toujours substance et toujours cause, n'étant substance qu'en tant que cause, et cause qu'en tant que substance, c'est-à-dire étant cause absolue, un et plusieurs, éternité et temps, espace et nombre, essence et vie, indivisibilité et totalité, principe, fin et milieu, au sommet de l'être et à son plus humble degré, infini et fini tout ensemble, triple enfin, c'est-à-dire à la fois Dieu, nature et humanité. En effet, si Dieu n'est pas tout, il n'est rien; s'il est absolument indivisible en soi, il est inaccessible et par conséquent incompréhensible, et son incompréhensibilité est pour nous sa destruction. Incompréhensible comme formule et dans l'école, Dieu est clair dans le monde qui le manifeste, et pour l'âme qui le possède et le sent. Partout présent, il revient en quelque sorte à lui-même dans la conscience de l'homme dont il constitue indirectement le mécanisme et la triplicité phénoménale par le reflet de sa propre vertu et de la triplicité substantielle dont il est l'identité absolue.» — V. COUSIN. Préface (1ère édition). In Fragments philosophiques (3ième édition). Ladrange. Paris, 1838. p. 76.

«L'athéisme est une formule vide, une négation sans réalité, une abstraction de l'esprit qui se détruit elle-même en s'affirmant, car toute affirmation, même négative, est un jugement qui renferme l'idée d'être, et par conséquent Dieu tout entier. L'athéisme est l'illusion de quelques sophistes qui opposent leur liberté à leur raison et ne savent même pas se rendre compte de ce qu'ils pensent; mais le genre humain qui ne renie point sa conscience et ne se met point en contradiction avec ses lois, connaît Dieu, y croit et le proclame perpétuellement.» — V. COUSIN. Préface (1ère édition). In Fragments philosophiques (3ième édition). Ladrange. Paris, 1838. p. 77-78.

«Mais les faits plus attentivement observés démontrent que nul homme n'est étranger à aucune des trois grandes idées qui constituent la conscience, savoir la personnalité ou la liberté de l'homme, l'impersonnalité ou la fatalité de la nature et la providence de Dieu. Tout homme comprend ces trois idées immédiatement, parce qu'il les a trouvées d'abord et qu'il les retrouve constamment en lui-même.» — V. COUSIN. Préface (1ère édition). In Fragments philosophiques (3ième édition). Ladrange. Paris, 1838. p. 79.

«L'âme de l'humanité est une âme poétique qui découvre en elle-même les secrets des êtres, et les exprime en des chants prophétiques qui retentissent d'âge en âge. À côté de l'humanité est la philosophie qui l'écoute avec attention, recueille ses paroles, les note pour ainsi dire; et quand le moment de l'inspiration est passé, les présente avec respect à l'artiste admirable qui n'avait pas la conscience de son génie et qui souvent ne reconnaît pas son propre ouvrage. La spontanéité est le génie de la nature humaine, la réflexion est le génie de quelques hommes. La différence de la réflexion à la spontanéité, est la seule différence possible dans l'identité de l'intelligence.» — V. COUSIN. Préface (1ère édition). In Fragments philosophiques (3ième édition). Ladrange. Paris, 1838. p. 80.

«On se trompe quand on dit que la vraie philosophie est une science de faits, si on n'ajoute que c'est aussi une science du raisonnement. Elle repose sur l'observation; mais elle n'a d'autres limites que celles de la raison elle-même, de même que la physique part de l'observation, mais ne s'y arrête point, et avec le calcul s'élève aux lois générales de la nature et au système du monde. Or, le raisonnement est en philosophie ce que le calcul est en physique; car après tout, le calcul n'est que le raisonnement sous sa forme la plus simple. Le calcul n'est pas une puissance mystérieuse, c'est la puissance même de la raison humaine; tout son caractère particulier est dans sa langue.»  — V. COUSIN. Préface (2ème édition). In Fragments philosophiques (3ième édition). Ladrange. Paris, 1838. p. 2-3.

«L'ontologie, c'est la science de l'être; c'est la connaissance de notre existence personnelle, celle du monde extérieur, celle de Dieu. Cette triple connaissance, c'est la raison qui la donne au même titre que la même connaissance, la raison, faculté unique de tout savoir, principe unique de toute certitude, règne unique du vrai et du faux, du bien et du mal, qui seule peut s'apercevoir de ses écarts, se corriger quand elle se trompe, se redresser quand elle s'égare, s'absoudre ou se condamner elle-même.» — V. COUSIN. Préface (2ème édition). In Fragments philosophiques (3ième édition). Ladrange. Paris, 1838. p. 12.

«Omettre d'abord, ensuite inventer, c'est là le vice commun de presque tous les systèmes de philosophie.» — V. COUSIN. Préface (2ème édition). In Fragments philosophiques (3ième édition). Ladrange. Paris, 1838. p. 16.

«... en philosophie il n'y a d'autre patrie que la vérité, et [...] il ne s'agit pas de savoir si la philosophie que j'enseigne est allemande, anglaise ou française, mais si elle vraie.» — V. COUSIN. Préface (2ème édition). In Fragments philosophiques (3ième édition). Ladrange. Paris, 1838. p. 21.

«Une théologie profonde, qui connaîtrait son véritable terrain, ne serait jamais hostile à la philosophie, dont à la rigueur elle ne peut se passer; et en même temps une philosophie qui connaîtrait bien la nature de la philosophie, son véritable objet, sa portée et ses limites, ne serait jamais tentée d'imposer ses procédés à la théologie. C'est toujours la mauvaise philosophie et la mauvaise théologie qui se querellent.» — V. COUSIN. Préface (2ème édition). In Fragments philosophiques (3ième édition). Ladrange. Paris, 1838. p. 37-38.

«... l'erreur ne pénètre dans l'intelligence que sous le masque d'une vérité qu'elle défigure.» — V. COUSIN. Préface (2ème édition). In Fragments philosophiques (3ième édition). Ladrange. Paris, 1838. p. 39.


«Nous n'entendons guère que nos propres pensées.» — V. COUSIN. «Préface». In Maine de Biran. Nouvelles considérations sur les Rapports du Physique et du Moral de l'Homme. Société belge de librairie. Bruxelles, 1841. p. 22.

«On pense comme on peut, non pas comme on veut. § Il y a dans la croyance la même nécessité: on ne fait pas sa croyance, on la reçoit.» — V. COUSIN. «Préface». In Maine de Biran. Nouvelles considérations sur les Rapports du Physique et du Moral de l'Homme. Société belge de librairie. Bruxelles, 1841. p. 27.


«Avoir conscience, c'est apercevoir, c'est connaître, c'est savoir; le mot même le dit (scientia-cum). Non-seulement je sens, mais je sais que je sens; non seulement je veux, mais je sais que je veux; et c'est ce savoir-là qui est la conscience.» — V. COUSIN. «Préface». In Maine de Biran. Nouvelles considérations sur les Rapports du Physique et du Moral de l'Homme. Société belge de librairie. Bruxelles, 1841. p. 28.

«Il en est des erreurs en philosophie comme des fautes dans la vie: leur punition est dans leurs conséquences inévitables. Tout ordre de faits réels retranché ou négligé laisse dans la conscience un  vide qui ne peut plus être rempli que par des hypothèses. Toute omission condamne à quelque invention.» — V. COUSIN. «Préface». In Maine de Biran. Nouvelles considérations sur les Rapports du Physique et du Moral de l'Homme. Société belge de librairie. Bruxelles, 1841. p. 35. 

«Une grande société est une machine immense que ne meut pas un ressort unique; et ce n'est pas la moindre des erreurs de certains esprits de croire que, pour changer d'une manière effective et durable le sort de toute une nation, il suffit d'une seule idée, et quelquefois d'un seul mot. Ceux qui s'imaginent savoir une de ces paroles magiques avec lesquelles on transforme la condition des hommes sur terre, méconnaissent dans la théorie la grandeur de la science, et dans la pratique la grandeur de la destinée sociale. En croyant tout facile, ils se trompent; en disant aux hommes que tout est facile, ils les trompent, et les conduisent par la voie des espérances chimériques à de cruels mécomptes, peut-être à des vengeances désespérées.» — V. COUSIN. «Justice et charité». Petits traités publiés par l'Académie des Sciences Morales et Politiques. Pagnerre, Paulin et Firmin Didot. Paris, 1848. p. 5.

«Le premier droit du peuple est le droit à la vérité.» — V. COUSIN. «Justice et charité». Petits traités publiés par l'Académie des Sciences Morales et Politiques. Pagnerre, Paulin et Firmin Didot. Paris, 1848. p. 16.

«Inégaux par tout autre endroit, en force physique, en santé, en beauté, en intelligence, ils ne sont égaux que par la liberté, car nul homme n'est plus libre qu'un autre. Ils font tous de leur liberté des usages différents; ils ne sont pas plus ou moins libres, ils ne s'appartiennent pas plus ou moins à eux-mêmes. À ce titre, mais à ce titre seul, ils sont égaux. Aussitôt que ce rapport naturel se manifeste, l'idée majestueuse de la liberté mutuelle développe celle de la mutuelle égalité, et par conséquent l'idée du devoir égal et mutuel de respecter cette liberté, sous peine de nous traiter les uns les autres comme des choses et non pas comme des personnes.» — V. COUSIN. «Justice et charité». Petits traités publiés par l'Académie des Sciences Morales et Politiques. Pagnerre, Paulin et Firmin Didot. Paris, 1848. p. 21.

«Il ne faut pas confondre la puissance et le droit. Un être pourrait avoir une puissance immense, celle de l'ouragan, de la foudre, celle d'une des forces de la nature; s'il n'y joint la liberté, il n'est qu'une chose redoutable et terrible, il n'est point une personne, il n'a pas de droits. Il peut inspirer une terreur immense, il n'a pas droit au respect. On n'a pas de droits envers lui.» — V. COUSIN. «Justice et charité». Petits traités publiés par l'Académie des Sciences Morales et Politiques. Pagnerre, Paulin et Firmin Didot. Paris, 1848. p. 22.

«On pourrait dire que le droit et le devoir ne font qu'un, et sont le même être envisagé de deux côtés différents. Qu'est-ce en effet, on ne saurait trop se le répéter à soi-même et aux autres; qu'est-ce que mon droit à votre respect, sinon le devoir que vous avez de me respecter, parce que je suis un être libre ? Mais vous-même, vous êtes un être libre; et le fondement de mon droit et de votre devoir devient pour vous le fondement d'un droit égal et en moi d'un égal devoir.» — V. COUSIN. «Justice et charité». Petits traités publiés par l'Académie des Sciences Morales et Politiques. Pagnerre, Paulin et Firmin Didot. Paris, 1848. p. 22.

«... la liberté, et la liberté seule, est égale à elle-même. Voilà ce qu'il importe de bien comprendre. Il n'y a d'identique en moi que la personne; tout le reste est divers; par tout le reste, les hommes diffèrent, car la ressemblance est encore de la différence.» — V. COUSIN. «Justice et charité». Petits traités publiés par l'Académie des Sciences Morales et Politiques. Pagnerre, Paulin et Firmin Didot. Paris, 1848. p. 23. 

«La philosophie exprime dans son degré le plus pur et le plus élevé la liberté et la dignité de la pensée.» — V. COUSIN. «Justice et charité». Petits traités publiés par l'Académie des Sciences Morales et Politiques. Pagnerre, Paulin et Firmin Didot. Paris, 1848. p. 26.

«Usurper la propriété qu'il [l'homme] possède en qualité de premier occupant est une action injuste; mais arracher à un travailler la terre qu'il a arrosée de ses sueurs est aux yeux de tous un crime manifeste.» — V. COUSIN. «Justice et charité». Petits traités publiés par l'Académie des Sciences Morales et Politiques. Pagnerre, Paulin et Firmin Didot. Paris, 1848. p. 34.

«Tant que l'homme use de sa liberté sans nuire à la liberté de son semblable, il est en paix avec lui-même et avec les autres. Mais aussitôt qu'il entreprend sur des libertés égales à la sienne, il les trouble et les déshonore, il se trouble et se déshonore lui-même, car il porte atteinte au principe même qui fait son honneur et garantit son repos.» — V. COUSIN. «Justice et charité». Petits traités publiés par l'Académie des Sciences Morales et Politiques. Pagnerre, Paulin et Firmin Didot. Paris, 1848. p. 34-35.

«Une loi de l'ordre éternel attache la misère au crime, et le bonheur ou du moins la paix à la vertu.» — V. COUSIN. «Justice et charité». Petits traités publiés par l'Académie des Sciences Morales et Politiques. Pagnerre, Paulin et Firmin Didot. Paris, 1848. p. 35.

«La paix est le fruit naturel de la justice, du respect que les hommes se portent ou doivent se porter les uns aux autres, à ce titre qu'ils sont tous égaux, c'est-à-dire qu'ils sont tous libres.» — V. COUSIN. «Justice et charité». Petits traités publiés par l'Académie des Sciences Morales et Politiques. Pagnerre, Paulin et Firmin Didot. Paris, 1848. p. 35. 

«Quel est donc cet instinct ? quelle est cette loi supérieure à toutes les lois écrites, à toutes les définitions, à toutes les formules rigoureuses du droit et du devoir ? Cette loi se manifeste par un cri de la conscience: voilà sa promulgation. Elle est si pure qu'on l'aperçoit à peine; ce n'est souvent qu'après l'action, et en y réfléchissant, qu'on sent avoir été inspiré par quelque chose de plus grand encore que la liberté; c'est le souffle divin qui pénètre dans l'âme et l'élève au-dessus des lois ordinaires ...» — V. COUSIN. «Justice et charité». Petits traités publiés par l'Académie des Sciences Morales et Politiques. Pagnerre, Paulin et Firmin Didot. Paris, 1848. p. 42.

«... le gouvernement d'une société humaine est aussi une personne morale. Il a un cœur comme l'individu; il a de la générosité, de la bonté, de la charité.» — V. COUSIN. «Justice et charité». Petits traités publiés par l'Académie des Sciences Morales et Politiques. Pagnerre, Paulin et Firmin Didot. Paris, 1848. p. 43.

«La charité est souvent le commencement et l'excuse, et toujours le prétexte des grandes usurpations. Pour avoir le droit de s'abandonner aux mouvements de la charité, il faut s'être affermi soi-même dans un long exercice de la justice.» — V. COUSIN. «Justice et charité». Petits traités publiés par l'Académie des Sciences Morales et Politiques. Pagnerre, Paulin et Firmin Didot. Paris, 1848. p. 45.

«Le vrai monde de l'homme est celui de la liberté, et sa vraie histoire n'est autre chose que le progrès constant de la liberté de plus en plus comprise d'âge en âge, et s'étendant toujours dans la pensée de l'homme, jusqu'à ce que d'époque en époque arrive celle où tous les droits soient connus et respectés, et où, pour ainsi parler, l'essence même de la liberté se manifeste.» — V. COUSIN. «Justice et charité». Petits traités publiés par l'Académie des Sciences Morales et Politiques. Pagnerre, Paulin et Firmin Didot. Paris, 1848. p. 52. 

«... vers la société idéale [...] qui serait la complète émancipation de la personne humaine, le règne de la liberté sur la terre.» — V. COUSIN. «Justice et charité». Petits traités publiés par l'Académie des Sciences Morales et Politiques. Pagnerre, Paulin et Firmin Didot. Paris, 1848. p. 52-53. 

«Il n'y a jamais d'oppression entière et absolue, même dans les époques qui nous paraissent aujourd'hui les plus opprimées; car un état de la société ne dure, après tout, que par le consentement de ceux auxquels elle s'applique. Les hommes ne désirent pas plus de liberté qu'ils n'en conçoivent, et d'est sur l'ignorance bien plus que sur la servilité que sont fondés tous les despotismes.» — V. COUSIN. «Justice et charité». Petits traités publiés par l'Académie des Sciences Morales et Politiques. Pagnerre, Paulin et Firmin Didot. Paris, 1848. p. 53. 

«... comme il est de l'essence de toute chose imparfaite de tendre à se perfectionner, toute forme partielle n'a qu'un temps et fait place à une forme plus générale qui, tout en détruisant la première, en développe l'esprit; car le mal seul périt, le bien reste et fait sa route.» — V. COUSIN. «Justice et charité». Petits traités publiés par l'Académie des Sciences Morales et Politiques. Pagnerre, Paulin et Firmin Didot. Paris, 1848. p. 54.  


«Les formes de la société, quand elles lui conviennent, sont inébranlables; le téméraire qui ose y toucher se brise contre elles; mais, quand une forme de la société a fait son temps; quand on conçoit, quand on veut plus de droits qu'on n'en possède; quand ce qui était un appui est devenu un obstacle; quand enfin l'esprit de liberté et l'amour des peuples, qui marche à sa suite, se sont retirés ensemble de la forme autrefois la plus puissante et la plus adorée, le premier qui met la main sur cette idole, vide du Dieu qui l'animait, l'abat aisément et la réduit en poussière.» — V. COUSIN. «Justice et charité». Petits traités publiés par l'Académie des Sciences Morales et Politiques. Pagnerre, Paulin et Firmin Didot. Paris, 1848. p. 55. 

«C'est surtout le côté négatif des choses qui est clair; le côté positif est obscur. Le passé qu'on rejette est bien connu; l'avenir qu'on invoque est couvert de ténèbres. De là ces troubles de l'âme, qui souvent, dans quelques individus, aboutissent au scepticisme. Contre le trouble et le scepticisme notre asile est la philosophie, laquelle nous révèle le fond moral et l'objet certain de tous les mouvement de l'histoire, et nous donne la vue distincte et assurée de la vraie société dans son éternel idéal.» — V. COUSIN. «Justice et charité». Petits traités publiés par l'Académie des Sciences Morales et Politiques. Pagnerre, Paulin et Firmin Didot. Paris, 1848. p. 56.  

«Oui, il y a une société éternelle, sous des formes qui se renouvellent sans cesse.» — V. COUSIN. «Justice et charité». Petits traités publiés par l'Académie des Sciences Morales et Politiques. Pagnerre, Paulin et Firmin Didot. Paris, 1848. p. 57. 

«La justice est le frein de l'humanité, la charité en est l'aiguillon. Ôtez l'une ou l'autre, l'homme s'arrête ou se précipite. Conduit pas la charité, appuyé sur la justice, il marche à sa destinée d'un pas réglé et soutenu. Voilà l'idéal qu'il s'agit de réaliser, dans les lois, dans les mœurs, et avant tout dans la pensée et dans la philosophie.» — V. COUSIN. «Justice et charité». Petits traités publiés par l'Académie des Sciences Morales et Politiques. Pagnerre, Paulin et Firmin Didot. Paris, 1848. p. 57-58. 

«L'antiquité, sans méconnaître la charité, recommandait surtout la justice, si nécessaire aux démocraties. La gloire du christianisme est d'avoir proclamé et répandu la charité, cette lumière du moyen âge, cette consolation de la servitude, et qui apprend à en sortir. Il appartient aux temps nouveaux de recueillir le double legs de l'antiquité et du moyen âge, et d'accroître ainsi le trésor de l'humanité. Fille de la révolution française, la philosophie du XIXe siècle se doit à elle-même d'exprimer enfin dans leurs caractères distinctifs, et de rappeler à leur harmonie nécessaire, ces deux grands  côtés de l'âme, ces deux principes différents, également vrais, également sacrés, de la morale éternelle.» — V. COUSIN. «Justice et charité». Petits traités publiés par l'Académie des Sciences Morales et Politiques. Pagnerre, Paulin et Firmin Didot. Paris, 1848. p. 58.