[Avec mises à jour périodiques. — With periodical updates.]
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NOTER: En faisant la publicité de ces pensées, le rédacteur de ce
site n'endosse en aucune façon la signification de leur contenu. Si
elles sont présentées ici, c'est qu'elles nous semblent offrir une
matière importante à réflexion, par la pertinence de leur thématique
ainsi que par la clarté de leur énonciation et des implications qui
peuvent en découler. Par ailleurs, nous encourageons ceux qui y seront
exposés à l'esprit de critique et de discernement le plus développé,
afin d'en retirer non seulement la «substantifique moëlle», selon
l'expression de Rabelais, mais encore la vérité la plus haute
qu'elles pourraient celer, en relevant le défi de retrouver la vérité
suprême, là où elle veut bien se révéler, y compris dans son expérience
de vie immédiate, à l'esprit qui la recherche avec
engagement,conviction et passion.
Max PICARD. Le Monde du silence. Presses universitaires de France. Paris, 1954.
CHAPITRE VII
Le démonisme du silence et la parole
«Dans
le silence il n'y a pas seulement un élément salutaire, aimable; il y a
aussi un élément obscur, chotonien, terrible, hostile qui peut surgir
du fond du silence, infernal, démonique.» — Max PICARD. «Le démonisme
du silence et la parole». Le Monde du silence. Presses universitaires
de France. Paris, 1954. p. 31.
«Mais cet élément menaçant,
démonique ne peut pénétrer dans la parole, n'y a de place que si la
parole n'est point remplie par l'esprit. Car l'esprit a, dans la
parole, la force de vaincre le démonique. Le silence perd son caractère
terrible, le terrible est exorcisé par la parole qu'habite l'esprit,
c'est-à-dire par la vérité et l'ordre.» — Max PICARD. «Le démonisme du
silence et la parole». Le Monde du silence. Presses universitaires de
France. Paris, 1954. p. 31.
«Dans l'esprit qui est dans la
parole, réside une trace du logos divin; par là, la parole reçoit la
puissance de se soumettre le démonique.» — Max PICARD. «Le démonisme
du silence et la parole». Le Monde du silence. Presses universitaires
de France. Paris, 1954. p. 32.
«La forêt vierge du silence
donna, grâce à l'esprit qui est en la parole, le sol bienveillant du
silence qui porte et nourrit la parole.» — Max PICARD. «Le démonisme
du silence et la parole». Le Monde du silence. Presses universitaires
de France. Paris, 1954. p. 33.
«Par la parole, le silence cesse
d'être dans un isolement démonique, il devient la sœur aimable de la
parole.» — Max PICARD. «Le démonisme du silence et la parole». Le
Monde du silence. Presses universitaires de France. Paris, 1954. p. 33.
CHAPITRE VIII
Parole et geste
«Le
geste appartient à une toute autre catégorie que la parole, il n'est
point détaché des états affectifs qui le provoquent, il y est mêlé, il
en est une partie et, le plus souvent, il exprime un vouloir. La
parole, au contraire, exprime une existence, une totalité et non pas
seulement quelque chose qui ressortit à la volonté et n'est qu'une
partie de l'être. La parole contient plus d'être que de volonté
affective. La parole est même être si peu commun qu'elle crée elle-même
de l'être.» — Max PICARD. «Parole et geste». Le Monde du silence.
Presses universitaires de France. Paris, 1954. p. 34.
«Jamais
l'homme n'aurait pu arriver, par degrés, du geste à la parole, car le
geste quelque chose d'irrédimé, il est même ce qui est nettement
irrédimé; ce n'est que par un acte créateur particulier que quelque
chose de libre peut naître de lui.» — Max PICARD. «Parole et geste».
Le Monde du silence. Presses universitaires de France. Paris, 1954. p.
34.
«... la parole est claire, libre, souveraine, elle s'élève
au-dessus de soi, elle laisse tout derrière soi sauf le silence d'où
elle vient; le geste, au contraire, est serf, irrédimé, encore tout
entremêlé de la matière dont il use pour tenter de se mettre sous nos
yeux, il est lié à la matière, prise en elle, il ne se porte par
librement vers la matière comme le fait l'esprit dans la parole.» —
Max PICARD. «Parole et geste». Le Monde du silence. Presses
universitaires de France. Paris, 1954. p. 34.
«Le langage est
entièrement ontique, au point que tout élément génétique y est sans
importance, y paraît comme englouti par la puissance de l'ontique. Même
si le langage était le produit de l'évolution, celle-ci n'entrerait pas
en considération, elle n'existerait pas, elle serait entièrement
absorbée par l'ontique.» — Max PICARD. «Parole et geste». Le Monde du
silence. Presses universitaires de France. Paris, 1954. p. 35.
«Le
langage fait partie de l'être même de l'homme, il en est un élément, se
fond en lui. [...] § Le langage ne peut être déduit que d'un autre
existant, d'un existant qui est encore plus puissant que l'existant qui
est dans le langage.» — Max PICARD. «Parole et geste». Le Monde du
silence. Presses universitaires de France. Paris, 1954. p. 35.
CHAPITRE IX
Les langues anciennes
«Les
langues anciennes ont une structure radiale; elles commencent toujours
à partir d'un centre (ce centre est le silence); elle y reviennent,
prenant toujours à nouveau leur élan à partir de ce centre; il est
comme une fontaine jaillissante dont les jets partent du centre en un
arc, y reviennent et disparaissent à nouveau en lui.» — Max PICARD.
«Les langues anciennes». Le Monde du silence. Presses universitaires de
France. Paris, 1954. p. 36-37.
«Dans la langue encore jeune, il
y a un mélange de crainte et de puissance: de crainte parce qu'elle
vient de sortir du silence, de puissance parce qu'elle doit se fixer
pour ne pas être effacée et ne pas disparaître.» — Max PICARD. «Les
langues anciennes». Le Monde du silence. Presses universitaires de
France. Paris, 1954. p. 37.
«La langue jeune devait donc se
fixer; elle était statique. Les mots sont comme des pieux; chaque pieu
est là comme pour soi; il n'y a presque pas de chemin menant d'un mot à
l'autre. L'architecture de la langue est verticale. Un mot s'enfonce
après l'autre dans la phrase, perpendiculairement, comme une colonne.»
— Max PICARD. «Les langues anciennes». Le Monde du silence. Presses
universitaires de France. Paris, 1954. p. 37.
«Dans la langue
d'aujourd'hui, l'existant, le présent, le statique ne comptent plus; la
phrase est devenue dynamique; un mot se hâte vers un autre, une phrase
vers une autre. L'architecture de la langue est changée, les colonnes
verticales sont couchées, l'horizontale détermine la phrase [...]. La
phrase devient fluide, dynamique.» — Max PICARD. «Les langues
anciennes». Le Monde du silence. Presses universitaires de France.
Paris, 1954. p. 37-38.
«Dans les langues anciennes, la parole
n'est que l'interruption du silence. Chaque parole est bordée de
silence. Elle est ainsi d'abord en soi-même et, ensuite seulement, elle
se joint à la parole qui suit; elle est modelée, elle reçoit une forme
de la limitation que lui impose le silence.» — Max PICARD. «Les
langues anciennes». Le Monde du silence. Presses universitaires de
France. Paris, 1954. p. 38.
«Dans les langues anciennes, il y a
un silence dans l'intervalle de deux paroles. La langue respire du
silence, elle prononce du silence et, le prononçant, le conduit au
grand silence dont elle est venue.» — Max PICARD. «Les langues
anciennes». Le Monde du silence. Presses universitaires de France.
Paris, 1954. p. 39.
«Il est important que les langues anciennes
soient enseignées dans les écoles, car notre propre langue y aperçoit
la naissance de la parole à partir du silence, la puissance du silence
sur la parole, l'action salutaire du silence pour la parole.» — Max
PICARD. «Les langues anciennes». Le Monde du silence. Presses
universitaires de France. Paris, 1954. p. 39.
«Il est important
aussi que les dialectes soient sauvegardés. Car un homme qui parle
habituellement un dialecte ne peut pas, dans la langue écrite, avancer
sans gêne, de mot en mot; il faut qu'il reprenne toujours son élan à
partir du dialecte, pour arriver dans la langue écrite; celle-ci n'est
point pour lui quelque chose qui va de soi et qui n'est que par trop
tout prêt.» — Max PICARD. «Les langues anciennes». Le Monde du
silence. Presses universitaires de France. Paris, 1954. p. 39.
«Un
phénomène humain ne peut s'étendre au delà d'une certaine mesure sans
se détruire; il en est apparemment de même de la langue ...» — Max
PICARD. «Les langues anciennes». Le Monde du silence. Presses
universitaires de France. Paris, 1954. p. 40.
CHAPITRE X
Le moi et le silence
«L'homme
dont l'être est encore habité par le silence va du silence au monde
extérieur; le silence est le centre de l'homme. Le mouvement ne se fait
pas alors immédiatement d'un homme vers un autre, mais du silence de
l'un au silence de l'autre.» — Max PICARD. «Le moi et le silence». Le
Monde du silence. Presses universitaires de France. Paris, 1954. p. 41.
«Chez
les hommes d'aujourd'hui, la situation est renversée: ce qui est
premier, c'est le mouvement vers l'extérieur; ce n'est que comme par
hasard qu'il rencontre quelque chose; il s'est déjà produit avant que
soit déterminé pourquoi il se produit; il devance toujours l'homme même
...» — Max PICARD. «Le moi et le silence». Le Monde du silence.
Presses universitaires de France. Paris, 1954. p. 41-42.
«Aujourd'hui
encore, au milieu du monde du bruit, la substance du silence habite
encore parfois un homme.» — Max PICARD. «Le moi et le silence». Le
Monde du silence. Presses universitaires de France. Paris, 1954. p. 42.
«Un
homme en qui est active la substance silencieuse porte sur soi le
silence dans chacun de ses mouvement; aussi sont-ils lents, ils ne se
heurtent pas avec violence; ils sont portés par le silence; ils ne sont
pas autre chose que des vagues de silence; et cependant cet homme est
là, distinctement et sa parole est là, distinctement. C'est un
événement que l'homme se soit détaché du silence; son apparition est
plus distincte que là où fait défaut le silence et où l'homme et la
rumeur sont un seul bruit continu. § La sublimité inhérente à cet homme
vient de ce qu'il apporte le silence dans le monde.» — Max PICARD. «Le
moi et le silence». Le Monde du silence. Presses universitaires de
France. Paris, 1954. p. 43.
«Là où pénètre le silence,
l'individu ne remarque pas d'opposition entre lui et la communauté, car
l'individu et la communauté ne sont pas en face l'un de l'autre, mais
ils sont tous deux en face du silence; la différence entre l'individu
et la communauté cesse d'avoir de l'importance en face de la puissance
du silence. § Aujourd'hui, l'individu n'est plus en face ni du silence
ni de la communauté; il est seulement en face d'un bruit général, et
l'individu est seulement celui qui, certes, ne possède plus le bruit,
le bruit universel, mais ne possède pas non plus encore le silence. Il
est isolé du bruit et isolé du silence; c'est un égaré.» — Max PICARD.
«Le moi et le silence». Le Monde du silence. Presses universitaires de
France. Paris, 1954. p. 43-44.
«Dans un monde où le silence est
actif, la solitude ne dépend pas du subjectif, elle ne vient pas de
lui. La solitude se tient devant l'homme comme quelque chose
d'objectif, même la solitude qui est en lui-même; elle se tient là,
devant lui en tant que silence.» — Max PICARD. «Le moi et le silence».
Le Monde du silence. Presses universitaires de France. Paris, 1954. p.
44.
«Le saint accueillait en soi la solitude comme si elle
venait d'un tiers, il l'accueillait comme quelque chose allant de soi
[...]. Mais quand la solitude est seulement une partie de notre être
intérieur, elle use l'homme et il dépérit de son fait.» — Max PICARD.
«Le moi et le silence». Le Monde du silence. Presses universitaires de
France. Paris, 1954. p. 44.
«Un homme qui possède encore en soi
de la substance silencieusen'a pas besoin de prêter sans cesse
attention à son être intérieur; il n'a pas besoin de recourir à la
volonté pour mettre de l'ordre en tout; bien des choses s'ordonnent
d'elles-mêmes grâce à la puissance de la substance silencieuse qui
adoucit les oppositions. Cet homme peut avoir des qualités qui ne
s'accordent pas sans que surgisse, pour cela, une crise; les
oppositions ont assez de place dans la substance silencieuse.» — Max
PICARD. «Le moi et le silence». Le Monde du silence. Presses
universitaires de France. Paris, 1954. p. 44.
«La vie n'est
point déchirée ici entre la foi et la science, la vérité et la beauté,
la vie et l'esprit; c'est la réalité entière qui est placée devant
l'homme et non point la polarité des concepts; l'existence de l'homme
se joue non pas dans une alternative, à son extrême pointe, mais dans
la médiation; entre les oppositions, il y a la substance silencieuse et
elle les empêche de devenir agressives les unes envers les autres.
Chacune doit d'abord franchir la vaste et apaisante plaine du silence
avant de pouvoir parvenir à un autre. La substance silencieuse
s'entremet donc entre les oppositions. § Ici seulement, l'homme est
au-dessus de sa propre contradiction; ici seulement, il a de l'humour.
Car en face su silence, la contradiction ne compte pas; elle ne choque
pas; elle est absorbée par le silence.» — Max PICARD. «Le moi et le
silence». Le Monde du silence. Presses universitaires de France. Paris,
1954. p. 45.
«Quand il a encore en soi de la substance
silencieuse, l'homme supporte mieux ce qui est hostile à son être, ce
qui l'use. [...] La vie avec les machines, la technique n'est pas en
soi nuisible. Elle est nuisible seulement lorsque fait défaut la
substance silencieuse qui protège l'homme.» — Max PICARD. «Le moi et
le silence». Le Monde du silence. Presses universitaires de France.
Paris, 1954. p. 45.
«... les possibilités qui ne sont pas
réalisée sont une nourriture pour le silence; par elles, le silence
acquiert plus de force et, à son tour, devient une nourriture puissant
pour tout ce qui se réalise autrement.» — Max PICARD. «Le moi et le
silence». Le Monde du silence. Presses universitaires de France. Paris,
1954. p. 45-46.
«Mais elle [la possibilité de la poésie] n'est
pas absente, elle ne se réalise pas seulement; elle se repose dans le
silence; elle reprend des forces. Il y a cependant de la beauté dans
semblable silence et la beauté vient du poème qui imprègne tout en
silence.» — Max PICARD. «Le moi et le silence». Le Monde du silence.
Presses universitaires de France. Paris, 1954. p. 46.
«Aujourd'hui
il n'y a pas de substance silencieuse; toutes les choses sont présentes
à la fois, récalcitrantes, opprimantes et l'homme qui ne peut laisser
s'enfoncer cette surabondance dans le silence, la laisse se volatiliser
dans le vide de la phrase et y sombrer.» — Max PICARD. «Le moi et le
silence». Le Monde du silence. Presses universitaires de France. Paris,
1954. p. 46.
«Une véritable éducation, un véritable enseignement
sont fondés sur cette substance silencieuse.» — Max PICARD. «Le moi et
le silence». Le Monde du silence. Presses universitaires de France.
Paris, 1954. p. 47.
«La substance silencieuse est aussi le lieu
où se déroule la métamorphose d'un homme. Sans doute l'esprit est-il la
cause de cette métamorphose, mais, sans le silence, la métamorphose
n'est pas réalisable, car, lors de cette métamorphose, l'homme n'est en
état de se détacher de tout le passé que s'il peut interposer le
silence entre ce qui est passé et ce qui est nouveauté. § Aujourd'hui,
où le silence fait défaut, l'homme ne peut plus se métamorphoser, il
peut seulement se développer; c'est pourquoi l'évolution compte
tellement aujourd'hui. L'évolution n'a pas lieu dans le silence, mais
dans les allées et venues de la discussion.» — Max PICARD. «Le moi et
le silence». Le Monde du silence. Presses universitaires de France.
Paris, 1954. p. 48.
«L'immensité du bonheur n'est bien ressentie
que dans l'ampleur du silence. Bonheur et silence font un comme mérite
et bruit.» — Max PICARD. «Le moi et le silence». Le Monde du silence.
Presses universitaires de France. Paris, 1954. p. 48.
«Souffrance
et silence aussi font un. Dans l'ampleur de la substance silencieuse,
la souffrance arrive à un équilibre, les simples émotions se perdent
dans cette ampleur, mais la souffrance même se manifeste davantage
comme souffrance.» — Max PICARD. «Le moi et le silence». Le Monde du
silence. Presses universitaires de France. Paris, 1954. p. 49.
CHAPITRE XI
Connaissance et silence
«L'ampleur
et l'esprit et l'ampleur du silence font un; l'ampleur de l'esprit a
besoin d'un corrélatif naturel hors de soi. Certes, l'esprit est
autonome et peut créer de soi-même cette ampleur, mais l'ampleur du
silence qui vient de la nature est une exhortation pour l'esprit à être
ample.» — Max PICARD. «Connaissance et silence». Le Monde du silence.
Presses universitaires de France. Paris, 1954. p. 50.
«... une
extension quantitative doit donner l'illusion de l'ampleur: c'est le
signe que l'homme a la nostalgie de la totalité, de l'universalité.» —
Max PICARD. «Connaissance et silence». Le Monde du silence. Presses
universitaires de France. Paris, 1954. p. 50-51.
«L'opposition
surprend et le regard rétréci la saisit plus facilement que l'ensemble
de la réalité d'une chose qui ne surprend pas. On n'est plus, par
exemple, en état d'apercevoir toute la réalité de la vie, toute la
réalité de l'esprit, toute la réalité non plus de la foi et de la
science. De la vie et de l'esprit, de la foi et de la science, on ne
connaît que leurs oppositions: «vie est esprit», «foi et science» ne
comptent plus que dans leur polarité et leurs heurts; l'homme ne peut
plus accorder à la vie et à l'esprit pour soi, à la foi et à la science
pour soi assez d'espace pour que chacun puisse encore exister pour
soi.» — Max PICARD. «Connaissance et silence». Le Monde du silence.
Presses universitaires de France. Paris, 1954. p. 51.
«Il faut
exagérer parce que seul ce qui est exagéré est aperçu. Les phénomènes
qui ne surprennent pas ne comptent pas aujourd'hui, ils sont comme
absents. Une guerre pourrait naître de cette exagération: ce serait une
chose terrible entre toutes qu'une guerre jaillit non de la passion ou
d'une nécessité politique, mais seulement d'une déficience
psychologique de l'homme qui doit exagérer les phénomènes pour
remarquer leur présence» — Max PICARD. «Connaissance et silence». Le
Monde du silence. Presses universitaires de France. Paris, 1954. p. 51.
«Lorsque
l'homme est en rapport avec le silence, il n'est point accablé par son
savoir; le silence le décharge de ce faix.» — Max PICARD.
«Connaissance et silence». Le Monde du silence. Presses universitaires
de France. Paris, 1954. p. 52.
«Toute la façon de connaître d'un
tel homme est pénétré de silence; on ne se sent pas poussé à tout
dévoiler; on accorde aussi au silence sa part dans les choses en ne
touchant pas beaucoup de choses avec la parole.» — Max PICARD.
«Connaissance et silence». Le Monde du silence. Presses universitaires
de France. Paris, 1954. p. 52.
«De même qu'il n'y a plus
aujourd'hui de différence entre le silence et la parole — le silence
n'est plus un phénomène pour soi, le silence aujourd'hui est seulement
parole non encore proférée —, de même il n'y a plus de différence entre
ce qui a été acquis par la recherche et ce qui ne l'a pas été; ce qui
ne l'a pas été, ce qui est voilé n'est également plus un phénomène pour
soi, c'est seulement ce qui n'a pas encore été acquis par la
recherche.» — Max PICARD. «Connaissance et silence». Le Monde du
silence. Presses universitaires de France. Paris, 1954. p. 53.
CHAPITRE XII
Les choses et le silence
«La
puissance de l'ontique passe aux choses qui sont dans le silence.
L'ontique des choses est renforcé par le silence; ce qui ressortit à
l'évolution est éloigné du monde du silence, ne prévaut pas contre le
silence, n'arrive à rien contre lui. § Être et silence font un. Des
époques qui ne sont plus en rapport avec le silence — c'est le cas de
celle d'aujourd'hui — ne se soucient plus de l'ontique des choses,
elles se préoccupent de leur devenir, de leur évolution, de
transformation, de révolution.» — Max PICARD. «Les choses et le
silence». Le Monde du silence. Presses universitaires de France. Paris,
1954. p. 54.
«C'est dans l'être qu'est la totalité d'une chose;
le devenir emporte dans son mouvement seulement une petite partie de
l'être et la parole, qui décrit le devenir, approche la réalité d'une
chose seulement dans la mesure où, dans le devenir, se trouvent des
parties de l'être.» — Max PICARD. «Les choses et le silence». Le Monde
du silence. Presses universitaires de France. Paris, 1954. p. 54.
«Chaque
objet a en soi un fond qui vient de plus loin que la parole désignant
cet objet. Ce fond, l'homme ne peut le rencontrer autrement que par le
silence. [...] Ce fond dans l'objet, l'homme ne peut donc le prendre
dans la parole.» — Max PICARD. «Les choses et le silence». Le Monde du
silence. Presses universitaires de France. Paris, 1954. p. 55.
«L'homme
ne perd rien à ne pas pouvoir faire entrer dans la parole ce fond des
choses. Ce fond ineffable relie l'homme à l'état primitif antérieur à
la parole, et c'est là ce qui est important. Ce fond ineffable des
choses est signe que les choses n'ont pas été crées et montées par
l'homme lui-même. Si les choses avaient été produites par lui, dans la
connaissance qu'il en a, c'est-à-dire dans la parole, il en aurait
l'entière possession.» — Max PICARD. «Les choses et le silence». Le
Monde du silence. Presses universitaires de France. Paris, 1954. p. 55.
«La
parole qui vient du silence enveloppe l'objet avec cette force propre à
ce qui est originel qu'elle reçoit du silence; l'objet participe à la
nature originelle de la parole, il s'épanouit grâce à la parole, il
croit en être. § Si la parole ne possède plus la force de l'originel,
elle devient simple son qui peut seulement effleurer la surface de
l'objet; elle met seulement une étiquette à la chose.» — Max PICARD.
«Les choses et le silence». Le Monde du silence. Presses universitaires
de France. Paris, 1954. p. 56.
«Deux formations menaçantes se
dressent donc en face l'une de l'autre: le chaos de la machinerie de la
parole qui veut résoudre chaque chose en bruit et le chaos de la
machinerie de la chose qui, détachée de la parole, attend de se créer à
soi-même un langage dans le fracas d'une explosion. De même que,
parfois, un muet pousse un cri à faire croire qu'il déchire sa chair
afin d'arriver à la parole, de même, aujourd'hui, les choses éclatent
et explosent comme si elles voulaient s'ouvrir violemment en un son:
c'est le son que rend la décadence.» — Max PICARD. «Les choses et le
silence». Le Monde du silence. Presses universitaires de France. Paris,
1954. p. 57.
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