vendredi 20 août 2010

Benjamin Constant — De la religion (Livre VII)

[Avec mises à jour périodiques. — With periodical updates.]

VEUILLEZ NOTER: En faisant la publicité de ces pensées, le rédacteur de ce site n'endosse en aucune façon la signification de leur contenu. Si elles sont présentées ici, c'est qu'elles nous semblent offrir une matière importante à réflexion, par la pertinence de leur thématique ainsi que par la clarté de leur énonciation et des implications qui peuvent en découler. Par ailleurs, nous encourageons ceux qui y seront exposés à l'esprit de critique et de discernement le plus développé, afin d'en retirer non seulement la «substantifique moëlle», selon l'expression de Rabelais, mais encore la vérité la plus haute qu'elles pourraient celer, en relevant le défi de retrouver la vérité suprême, là où elle veut bien se révéler, y compris dans son expérience de vie immédiate, à l'esprit qui la recherche avec engagement, conviction et passion.

[DES ÉLÉMENTS CONSTITUTIFS DU POLYTHÉISME INDÉPENDANT DE LA DIRECTION SACERDOTALE]


«Si l'on y réfléchit, on trouvera que la religion décrite par Homère est précisément ce que doit être celle d'un peuple barbare et guerrier, dans un beau climat, sous une nature bienveillante, quand aucune autorité ne gêne ce peuple. En effet, comment peut-il concevoir ses dieux ? Comme des êtres pareils à l'homme, mais doués de forces plus colossales, de facultés plus étendues, d'une science et d'une sagesse supérieures, qui n'excluent pourtant ni les passions, ni même les vices que ces passions entraînent. Le fétiche est avide et affamé, parce que ces besoins physiques sont les seuls que le Sauvage connaisse. Jupiter est encore vorace et mercenaire, parce que ni l'avidité ni l'intempérance ne disparaissent chez les Barbares: mais d'autres passions s'étant développées dans le cœur humain, ces passions deviennent aussitôt partie intégrante du caractère de Jupiter.» — Benjamin CONSTANT. Livre VII, chapitre III. In De la religion, considérée dans sa source, ses formes et ses développements. Actes Sud. Arles, 1999. p. 331.

«Les modernes, qui n'admettent guère les scrupules, parce qu'ils en ont peu, ni la conviction, parce qu'ils n'en ont plus, ont supposé que les poètes grecs, et surtout Homère, pour employer ce nom générique, avaient embelli ou défiguré la religion et les divinités de la Grèce, parce que cette religion et ces divinités étaient précisément telles que le besoin et le génie d'un poète les auraient créées; mais c'est que la nation et la période de l'état social étaient poétiques. Les poètes n'ont fait que suivre l'impulsion de leur nation et de leur époque.» — Benjamin CONSTANT. Livre VII, chapitre III. In De la religion, considérée dans sa source, ses formes et ses développements. Actes Sud. Arles, 1999. p. 331.


«Il faut du temps à l'homme pour découvrir qu'il a le droit de se plaindre.» — Benjamin CONSTANT. Livre VII, chapitre III. In De la religion, considérée dans sa source, ses formes et ses développements. Actes Sud. Arles, 1999. p. 333.

«Il s'agit de bien comprendre ce qu'est la croyance populaire à l'époque [des temps héroïques] que nous décrivons, et quel est le travail du sentiment religieux sur cette croyance. Or, ici rien n'est occulte; rien n'est scientifique; le symbole même, langage convenu pour le sacerdoce et ses initiés, n'est pour la foule qu'une langue dont tous les termes ont un sens littéral, positif, conforme à leur signification vulgaire. Qu'on ne vienne donc point nous dire que nous prenons le polythéisme homérique trop matériellement; nous le prenons comme le concevaient les Grecs des temps héroïques, et nous répétons notre maxime fondamentale: une religion est toujours pour un peuple telle que ce peuple la conçoit.» — Benjamin CONSTANT. Livre VII, chapitre IV. In De la religion, considérée dans sa source, ses formes et ses développements. Actes Sud. Arles, 1999. p. 337.


«Le premier progrès qui s'opère dans les croyances libres de toute gêne et de toute entrave, c'est l'embellissement de la figure des dieux. Cet embellissement est un besoin pour l'homme ... § En satisfaisant ce besoin, l'homme s'écarte momentanément de cette tendance vers l'inconnu, tendance inhérente d'ailleurs au sentiment religieux. Nous le verrons tout à l'heure s'en écarter encore, lorsque après avoir attribué la beauté physique aux objets de son culte, il recherchera quelles doivent être leurs qualités morales. Plus il réfléchira sur ces questions, plus il fera ses dieux semblables à lui. Mais c'est une transition, un travail préliminaire, auquel il ne se livre qu'aussi longtemps qu'ils lui sont inférieurs par leurs qualités ou par leurs formes. Dès qu'il en a fait ses égaux, en leur prêtant ce qu'il y a de meilleur dans sa nature, il en fait ses supérieurs, en les délivrant de ses faiblesse et de ses vices; ce nouveau travail établit des différences nouvelles, incalculables, indéfinies, et la religion rentre dans sa sphère.» — Benjamin CONSTANT. Livre VII, chapitre V. In De la religion, considérée dans sa source, ses formes et ses développements. Actes Sud. Arles, 1999. p. 338-339.

«Ainsi s'agit l'intelligence, pour embellir ce que l'âme adore. Le besoin de contempler dans leurs dieux l'idéal de la beauté, inspira aux Grecs cette passion pour la beauté en elle-même, source de chefs-d'œuvre que nous ne saurions imiter. Même lorsque le sens mystérieux eut pénétré dans leur religion, il resta toujours une seconde ligne; la beauté fut le but. Le symbole lui fut constamment sacrifié.» — Benjamin CONSTANT. Livre VII, chapitre V. In De la religion, considérée dans sa source, ses formes et ses développements. Actes Sud. Arles, 1999. p. 340.

«Les efforts du sentiment religieux, livré à sa tendance libre et naturelle, ne se bornent pas à l'embellissement extérieur et pour ainsi dire matériel des dieux. La même tendance le porte à opérer en eux une révolution intérieure. Il voudrait leur attribuer tout ce qu'il conçoit de beau, de noble et de bon. Il y travaille autant que ses notions imparfaites le permettent; et dans ses assertions générales, il prête à ses dieux la beauté, la justice, le bonheur. § Mais la même cause de dégradation que nous avons observée dans le fétichisme, l'action de l'intérêt du moment, de cet intérêt toujours vil, impatient et aveugle, s'exerce sur le nouveau culte à la hauteur duquel l'homme a réussi à s'élever. § Un double mouvement se fait donc sentir, et de là naît une lutte constante. Cette lutte se complique de la crédulité et de la jeunesse d'imagination qui caractérisent les peuples enfants. Les fables se présentent d'autant plus nombreuses qu'elles ne sont pas le monopole des prêtres. La foi les accueille, l'intérêt s'en empare, le sentiment s'efforce de les modifier; de là naît une mythologie souvent disparate, pleine de contradictions qui passent inaperçues, parce que nul ne les rapproche pour les comparer, et que, destinées un jour à se combattre, elles coexistent encore paisibles, faute de se rencontrer.» — Benjamin CONSTANT. Livre VII, chapitre VI. In De la religion, considérée dans sa source, ses formes et ses développements. Actes Sud. Arles, 1999. p. 341. 

«Sur le sommet d'une montagne, que d'épais nuages dérobent aux yeux profanes, habite l'assemblée des dieux. Chacun de ces dieux présente à l'esprit la notion d'une qualité, d'une vertu, d'une force, supérieures à celles que possèdent les humains. Jupiter est l'idéal de la majesté, Vénus de la beauté, Minerve de la sagesse. Nous ne voulons point dire que les Grecs en fissent des êtres allégoriques, mais seulement qu'ils tâchent de réunir en eux ce qu'ils imaginent de plus majestueux, de plus beau, de plus sage. Les mortels lèvent avec respect leurs regards sur cette assemblée vénérable d'être surnaturels qui les contemplent et les protègent. Jusqu'ici c'est le sentiment religieux profond et pur. § Mais les Grecs veulent tirer de leurs dieux le même parti que les Sauvages de leurs fétiches. L'intérêt vient souiller la nouvelle forme vers laquelle le sentiment s'était élancé.» — Benjamin CONSTANT. Livre VII, chapitre VI. In De la religion, considérée dans sa source, ses formes et ses développements. Actes Sud. Arles, 1999. p. 341-342.  

«La dégradation ne s'arrête pas là: la lutte entre l'intérêt et la pureté du sentiment religieux se complique par l'intervention d'une troisième puissance qui vient, comme juge, prononcer des arrêts auxquels les deux adversaires sont loin de s'attendre. § Cette puissance, c'est le raisonnement. À mesure que l'esprit humain s'éclaire, il apprend à tirer des principes qu'il admet les conséquences qui en découlent: c'est une loi de sa nature. L'homme est forcé de raisonner juste, de quelque point qu'il parte, et lors même que la justesse de ses raisonnements va contre son but. § Il en résulte que lorsqu'il adopte sur ses dieux une hypothèse quelconque, l'esprit tire de cette donnée les conclusions qui s'ensuivent nécessairement; et il arrive par ces conclusions à un terme qu'il ne prévoyait guère et qui blesse à la fois le sentiment qui avait créé la nouvelle forme religieuse, et l'intérêt qui voulait s'en servir.» — Benjamin CONSTANT. Livre VII, chapitre VI. In De la religion, considérée dans sa source, ses formes et ses développements. Actes Sud. Arles, 1999. p. 342-343. 

«Il est de l'essence d'une société d'avoir des intérêts à part. La société des dieux dut en conséquence s'occuper des siens, et ne considérer les hommes que comme accessoires. L'intelligence humaine est soumise à des lois indépendantes de ses désirs. À peine l'homme s'est-il fait les dieux pour son usage, que ces lois s'en emparent et les lui dérobent.» — Benjamin CONSTANT. Livre VII, chapitre VI. In De la religion, considérée dans sa source, ses formes et ses développements. Actes Sud. Arles, 1999. p. 349.


«Quand les hommes ont constitué la race divine en relation d'intérêt avec la race humaine, et que la religion est devenue un trafic régulier d'offrandes et de faveurs, les adorateurs doivent ménager des excuses aux objets de leur culte, si ces derniers ne gardent pas la foi promise et manquent au traité. § Une notion confuse et mystérieuse s'offre pour voiler l'impuissance et pallier l'infidélité. C'est celle de la destinée. Elle est nécessairement sujette à beaucoup de contradictions. L'homme a besoin d'y croire, pour ne pas s'aigrir sans retour contre la cruauté des dieux qu'il adore; mais il a besoin d'en douter, pour attribuer à ses prières quelque efficacité; de là vient que les Grecs, à cette époque, considèrent les lois de la destinée tour à tour comme irrésistibles et comme pouvant être éludées.» — Benjamin CONSTANT. Livre VII, chapitre VII. In De la religion, considérée dans sa source, ses formes et ses développements. Actes Sud. Arles, 1999. p. 349-350.


«Les hommes sont perpétuellement repoussés de l'une de ces conjectures à l'autre: quand ils veulent se reposer dans la résignation, ils justifient les dieux, comme soumis à des lois qu'ils ne peuvent changer; quand ils veulent se ranimer par l'espoir, ils rendent une sorte d'indépendance à des êtres qu'ils se flattent de fléchir par leur supplications ou de séduire par leurs offrandes. § Les relations des hommes avec le sort sont exposées aux mêmes incertitudes. Tantôt ni la connaissance de l'avenir, ni les précautions de la prudence, ni les efforts du courage, ni la faveur céleste, ne changent rien à ce que les Parques ont filé, dès la naissance des humains; tantôt les mortels, tout faibles et tout aveugles qu'ils sont, échappent aux décrets du sort par la valeur, par l'adresse, même par le crime; quelquefois ils ont le choix entre deux destinées différentes. [...] C'est une manière d'allier la doctrine de la destinée avec une certaine liberté humaine; c'est une transaction entre deux hypothèses opposées.» — Benjamin CONSTANT. Livre VII, chapitre VII. In De la religion, considérée dans sa source, ses formes et ses développements. Actes Sud. Arles, 1999. p. 351.


«L'unité de Dieu, loin de résoudre ce problème, paraît au premier coup d'œil le compliquer encore. Le polythéisme n'attribuant pas à ses dieux la toute-puissance, et nous les montrant souvent divisés, on conçoit une destinée au-dessus d'eux, qui les domine, et soit en quelque sorte leur règle commune; mais dans le système de l'unité de Dieu, sa puissance étant sans bornes, la destinée se place dans sa volonté, et l'on a d'abord quelque peine à concilier cette croyance avec celle de l'efficacité du culte et du libre arbitre de l'homme. § Ce n'est que lorsque la religion s'est fort épurée, lorsqu'on a écarté de l'idée de Dieu tous ces restes d'anthropomorphisme, qui sont en quelque sorte l'héritage du polythéisme, et même du fétichisme, ce n'est qu'alors que toutes les difficultés relatives à la destinée, à la fatalité, au libre arbitre, disparaissent ou s'évanouissent. Alors succèdent aux notions de nécessité ou de trafic, à ces deux hypothèses qui se combattent sans cesse dans les religions encore imparfaites, une notion qui en réunit tous les avantages, et qui en écarte ce qu'elles ont de grossier. Alors nous concevons l'homme doué de la liberté, afin que ses triomphes sur lui-même aient un plus grand mérite. Nous savons qu'en trompant nos vœux, le sort fait mieux qu'en les exauçant. Nous nous unissons à la cause inconnue, non pour satisfaire nos caprices d'un jour, mais pour atteindre un plus haut degré de perfectionnement moral, en nous élevant au-dessus de tout ce qui n'est qu'éphémère et personnel. Alors seulement le courage a toute sa force, et la résignation toute sa douceur.» — Benjamin CONSTANT. Livre VII, chapitre VII. In De la religion, considérée dans sa source, ses formes et ses développements. Actes Sud. Arles, 1999. p. 351-352.

«Lors de la chute du polythéisme, l'ambiguïté des oracles servit de texte aux plaisanteries amères des écrivains incrédules. La logique se venge toujours avec usure des outrages qu'elle a reçus; mais sa vengeance est lente; elle s'exerce, comme le courage des nations, sur des ennemis qui sont à terre.» — Benjamin CONSTANT. Livre VII, chapitre VIII. In De la religion, considérée dans sa source, ses formes et ses développements. Actes Sud. Arles, 1999. p. 355. 

«La Grèce de ces âges [héroïques] n'avaient pas comme nous une carrière inactive, où la douleur vient pour ainsi dire nous chercher, mais une carrière toujours active qui leur faisait braver la douleur dans l'espoir du succès; pour les peuples amollis par la civilisation, souffrir est le plus grand des maux; pour les peuples dans la jeunesse de l'état social, et qui consument leurs jours dans les périls et les luttes physiques, le plus grand des maux est de ne pas réussir.» — Benjamin CONSTANT. Livre VII, chapitre IX. In De la religion, considérée dans sa source, ses formes et ses développements. Actes Sud. Arles, 1999. p. 359. 

«Celui qui lève sur les dieux un bras sacrilège est poursuivi par des malheurs qui ne manquent jamais de l'atteindre. Aveugle, fugitif, insensé, solitaire, privé de ses enfants, repoussé de sa patrie, il erre sans secours, poussant des cris déplorables, et la mort est derrière lui. Ici l'homme se sacrifie au besoin de respecter ce qu'il adore, tant il est dans la nature que le sentiment l'emporte sur l'intérêt. § La logique le force à reconnaître que des êtres passionnés et vicieux ne sauraient jouir d'un bonheur sans mélange.» — Benjamin CONSTANT. Livre VII, chapitre X. In De la religion, considérée dans sa source, ses formes et ses développements. Actes Sud. Arles, 1999. p. 360-361. 

«Si les dieux punissent le parjure, c'est comme un outrage envers eux, non comme un crime contre les hommes; mais il en résulte que ceux-ci commencent à prendre les immortels à témoin de leurs engagements réciproques. Ces engagements deviennent plus augustes; les hommes se forment à la fidélité, parce qu'ils ont intéressé les dieux à cette cause; les dieux s'ennoblissent comme garants de la foi jurée. § La prison d'État, qui fit partie du monde futur, ne reçoit dans sa formidable enceinte que les ennemis personnels des dieux. Cette fiction n'offre donc nul appui à la morale. Mais le sentiment qui a besoin de la morale, médite sur la demeure de châtiment que les objets de son adoration n'avaient créée que pour eux seuls. L'homme, dominé par son intérêt, voudrait ne se faire de ses dieux que des auxiliaires; son sentiment intérieur le force à s'en faire des juges. Il s'empare de cette prison, même avant que la religion la lui cède, ce qui arrive plus tard, et déjà la faiblesse opprimée précipite par ses imprécations ses oppresseurs dans le Tartare.» — Benjamin CONSTANT. Livre VII, chapitre X. In De la religion, considérée dans sa source, ses formes et ses développements. Actes Sud. Arles, 1999. p. 361. 

«Cette tendance de l'homme à former de ses dieux un corps, est elle-même une lutte du sentiment religieux contre le polythéisme qui le choque, bien que les notions contemporaines ne lui permettent pas de s'en affranchir. L'esprit, qui a besoin de distinguer, divise et classe; et il est contrait de proportionner ses divisions à ses lumières; l'âme, qui a besoin de réunir, ne craint pas de confondre, et devance souvent l'époque où les hommes doivent sanctionner ses réunions. C'est là ce qui donne fréquemment au polythéisme une apparence de théisme qui nous trompe, et c'est là aussi ce qui, beaucoup plus tard, quant l'intelligence a fait de grands pas, remplace le polythéisme par l'unité.» — Benjamin CONSTANT. Livre VII, chapitre X. In De la religion, considérée dans sa source, ses formes et ses développements. Actes Sud. Arles, 1999. p. 362. 

«...l'inconséquence elle-même a ses lois: l'homme ne déraisonne pas pour le plaisir de déraisonner. Quant il raisonne mal, c'est qu'il y a lutte entre ses facultés, et qu'il ne sait pas les mettre d'accord.» — Benjamin CONSTANT. Livre VII, chapitre X. In De la religion, considérée dans sa source, ses formes et ses développements. Actes Sud. Arles, 1999. p. 363. 

«Tout ce qui est cher aux hommes, les villes, les maisons, les familles, les traités, les serments, l'hospitalité, se rattachent à la religion; elle n'accorde point encore à la morale une sanction positive; mais l'appui qu'elle lui prête ressemble a celui qui résulterait, dans une société où il n'y aurait pas de lois , de l'opinion générale des plus forts. Un instinct rapide avertit les nations que les dieux sont amis du bien; qu'ils veulent ce qui est juste. [...] C'est que l'amour de l'ordre inhérent à l'homme est de même inhérent aux dieux, malgré des exceptions fréquentes: ils embrassent la cause de l'opprimé, comme un héros, rencontrant un voyageur que des brigands attaquent, le sauve de leurs coups. Ce n'est point en qualité de juge, et l'on aurait tort d'en inférer que la société dont il est membre a pris des mesures pour châtier le crime et mettre l'innocence hors de péril. Néanmoins, il serait heureux que des hommes ainsi revêtus d'une force supérieure défendissent la cause de la justice: ces hommes sont les dieux d'Homère, et c'est déjà beaucoup d'avoir créé une race puissante qui, d'ordinaire, protège la faiblesse et punisse l'iniquité.» — Benjamin CONSTANT. Livre VII, chapitre X. In De la religion, considérée dans sa source, ses formes et ses développements. Actes Sud. Arles, 1999. p. 364-365.

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