[Avec mises à jour périodiques. — With periodical updates.]
VEUILLEZ NOTER: En faisant la publicité de ces pensées, le rédacteur de ce site n'endosse en aucune façon la signification de leur contenu. Si elles sont présentées ici, c'est qu'elles nous semblent offrir une matière importante à réflexion, par la pertinence de leur thématique ainsi que par la clarté de leur énonciation et des implications qui peuvent en découler. Par ailleurs, nous encourageons ceux qui y seront exposés à l'esprit de critique et de discernement le plus développé, afin d'en retirer non seulement la «substantifique moëlle», selon l'expression de Rabelais, mais encore la vérité la plus haute qu'elles pourraient celer, en relevant le défi de retrouver la vérité suprême, là où elle veut bien se révéler, y compris dans son expérience de vie immédiate, à l'esprit qui la recherche avec engagement, conviction et passion.
[LE MONDE FORMEL DE LA VIE ÉCONOMIQUE]
«... l'économie n'a pas de système, mais une physionomie. Pour sonder le système de sa forme intérieure, de son âme, il faut avoir le tact physionomique. Pour y réussir, il faut être connaisseur, comme on est connaisseur d'hommes et connaisseur de chevaux, et on n'a plus besoin d'un «savoir» qu'un cavalier n'a besoin de «savoir» la géologie. Mais cette qualité de connaisseur par un coup d'œil sympathique sur l'histoire; ce coup d'œil fait pressentir les instincts raciques cachés, qui agissent aussi dans le sujet économique actif pour transformer symboliquement la situation extérieure (la «matière» économique, la nécessité) d'après l'âme intérieure du sujet. Chaque vie économique est l'expression d'une vie psychique.» — O. SPENGLER. Chapitre V. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 432.
«L'économie et la politique sont les côtés d'une existence dynamique vivante, non de l'existence éveillée, de l'esprit. Dans tous les deux se révèle le tact du flux cosmique emprisonné dans les successions des générations d'individus. Ils n'ont pas, ils sont l'histoire. Ils appartiennent tous deux à la race, et non à la langue avec ses tensions spatialo-causales comme celles de la religion et de la science; ils visent tous deux aux réalités et non aux vérités. Il y a des destins politiques et économiques, comme il y a dans toutes les doctrines religieuse et scientifiques un enchaînement atemporel de causes et d'effets.» — O. SPENGLER. Chapitre V. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 433.
«La politique sacrifie les hommes pour une fin; ils tombent pour une idée; l'économie les fait seulement périr. La guerre crée, la faim anéantit toutes les grandes choses. Là, la vie est supprimée par la mort, souvent jusqu'à cette irrésistible force dont la seule existence signifie déjà la victoire; ici, la faim éveille cette sorte d'angoisse haïssable, vulgaire, entièrement amétaphysique, sous lequel se lève soudain le monde formel supérieur d'une culture et commence la pure lutte pour l'existence de la bête humaine. .» — O. SPENGLER. Chapitre V. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 432.
«Ce qui importe proprement, pour les individus comme pour les peuples, ce n'est pas d'être en constitution bien nourri et fécond, mais pour quoi on l'est; et plus l'homme s'élève dans l'histoire, plus son vouloir politique et religieux dépasse en symbolique intérieure et en puissance d'expression tout ce que la vie économique renferme de forme et de profondeur. Ce n'est que lorsque le reflux du monde formel total commence, à l'avènement d'une civilisation, que les contours du pur train de vie apparaissent avec urgence dans leur nudité: c'est alors le moment où se dépouille de sa pudeur le creux aphorisme de «la faim et l'amour» comme les deux ressorts de l'existence; où ce n'est plus la volonté de puissance pour un devoir, mais le bonheur du plus grand nombre, le plaisir et la commodité, le panem et circenses, qui deviennent le sens de la vie, et où la grande politique, la politique économique se substitue comme fin en soi.» — O. SPENGLER. Chapitre V. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 432.
«Parce que l'économie appartient au côté racique de la vie, elle a comme la politique une coutume et un point de morale, car c'est ce qui distingue la noblesse du clergé, les réalités des vérités. Comme chaque ordre politique, chaque classe professionnelle a un sentiment évident, non du Bien et du Mal, mais du bon et du mauvais. Celui qui ne l'est pas n'est pas honorable, il est vulgaire. Car l'homme occupe ici aussi le point central et sépare, du flair des convenances et du tact des hommes agissant économiquement, la méditation religieuse et son concept fondamental du péché.» — O. SPENGLER. Chapitre V. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 434.
«Toute vie économique supérieure naît en contact avec une paysannerie et au-dessus d'elle. La paysannerie seule ne suppose rien d'autre. Elle est pour ainsi dire la race en soi, végétale et ahistorique, produisant et consommant tout pour elle, jetant sur le reste du monde un regard où tous les autres sujets économiques semblent secondaires et méprisables. Or voici qu'à cette économie productive s'oppose une espèce conquérante d'économie, qui se sert de la première comme objet, se fait nourrir par elle, la rend tributaire ou la pille.» — O. SPENGLER. Chapitre V. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 436.
«La politique et le commerce sous forme développée (art de réaliser sur l'adversaire des succès matériels au moyen d'une supériorité spirituelle) sont toutes deux un succédané de la guerre par d'autres moyens. Toute diplomatie est une diplomatie d'affaires et toutes les affaires sont de nature diplomatique; les deux reposent sur une connaissance approfondie des hommes et sur le tact physionomique.» — O. SPENGLER. Chapitre V. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 437.
«Une vie veut exister et signifier quelque chose au delà de cette existence; et la confusion de nos concepts a été encore accrue finalement par le fait que des partis politiques, aujourd'hui comme aux temps hellénistiques, ont anobli en quelque sorte certains groupes économiques, dont ils voulaient modifier plus heureusement le train de vie, en les élevant au rang d'un ordre politique.» — O. SPENGLER. Chapitre V. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 440.
«... le premier ordre authentique est la noblesse. D'elle dérivent l'officier et le juge et tout ce qui appartient aux hautes charges gouvernementales et administratives. Ce sont des formes de l'ordre ayant une certaine signification. De même au clergé appartiennent les savants avec une espèce de distance nobiliaire très marquée.» — O. SPENGLER. Chapitre V. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 440.
«Un bien est ce qui est lié par les fils délicats de la nature, par son âme, à la vie qui l'a produit ou qui le consomme.» — O. SPENGLER. Chapitre V. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 442.
«... le citadin pur n'est pas productif au sens terrien originel, Il lui manque le lien intérieur avec le sol, comme avec le bien qui passe entre ses mains. Il ne vit pas avec lui, mais le regarde du dehors et seulement par rapport à son train de vie.» — O. SPENGLER. Chapitre V. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 443.
«Une erreur de toutes les théories financières modernes est qu'elles partent des signes de valeur ou même de la matière des moyens de paiement, au lieu de partir de la forme de la pensée économique. Mais l'argent est une catégorie de la pensée, comme le nombre et le droit. Il y a une pensée financière comme il y a une pensée juridique, mathématique, technique sur le monde ambiant.» — O. SPENGLER. Chapitre V. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 444.
«Penser en hommes d'affaires, c'est compter.» — O. SPENGLER. Chapitre V. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 444.
«L'argent est devenu finalement la forme d'énergie spirituelle, où sont résumées et concentrées la volonté de domination, la force et la plasticité politiques, sociales, techniques, scientifiques, la nostalgie d'une vie de grand format. [...]. Civilisation signifie donc le stade d'une culture dans lequel la tradition et la personnalité ont perdu leur valeur immédiate, où il faut que chaque idée soit d'abord repensée en argent avant de pouvoir se réaliser. Au début, on était riche parce qu'on était puissant. Maintenant on est puissant parce qu'on a de l'argent. C'est l'argent d'abord qui élève l'esprit sur le trône. La démocratie est l'identification parfaite de l'argent et de la puissance politique.» — O. SPENGLER. Chapitre V. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 447.
«... la confusion de l'argent et de la monnaie correspond exactement au fait de mesurer la valeur d'une chose à la grandeur d'une quantité de travail. Ici le «travail» n'est plus une action au sein d'un monde d'actions, il n'est pas l'activité infiniment diverse selon le rang intérieur, l'intensité et la portée, et qui agit dans des milieux sans cesse différents, mesurée comme un champ de force électrique, sans pouvoir être délimitée; mais le résultat représenté de manière toute matérielle, le résiduel du travail, quelque chose de concret où rien de remarquable n'apparaît, si ce n'est précisément son volume.» — O. SPENGLER. Chapitre V. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 454.
«La pensée financière produit l'argent: tel est le secret de l'économie mondiale. Quand un organisateur de grand style écrit un million sur un papier, ce million existe, car sa personnalité comme centre économique garantit un accroissement correspondant de l'énergie économique de son domaine. C'est cela et rien d'autre que signifie pour nous le mot crédit.» — O. SPENGLER. Chapitre V. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 454.
«La relation primaire entre un microcosme éveillé et son macrocosme (la «nature») consiste dans un tâtement par les sens qui, de simple impression des sens, s'élève à un jugement des sens et agit ainsi de manière critique («isolante») ou, ce qui revient au même, comme analyse causale. Le constat se complète en un système, le plus achevé possible d'expériences («marques») les plus originelles, et cette méthode involontaire, par laquelle on se sent chez soi dans son monde, a abouti chez maints animaux à une richesse étonnante d'expériences, qu'aucune connaissance humaine de la nature ne peut dépasser. Mais l'être éveillé originel est toujours un être éveillé agissant, loin de tout ce qui est simple «théorie»; telle est la petite technique journalière, par laquelle on acquiert des expériences sans intention, au contact des choses, en tant qu'elles sont des choses mortes. C'est la distinction du culte et du mythe, car à ce stade il n'y a aucune frontière entre la religion et le profane. Tout être éveillé est religion.» — O. SPENGLER. Chapitre V. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 458.
«Le commerce originaire est un commerce de métaux: c'est ainsi que l'économie qui produit et l'économie qui façonne sont envahies par une troisième, étrangère et aventurière, qui circule en liberté à travers le pays.» — O. SPENGLER. Chapitre V. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 460.
«Notre culture [faustienne] toute entière a l'âme des découvertes. Découvrir ce qu'on ne voit pas, l'attirer dans le monde lumineux de l'œil intérieur pour s'en emparer, c'était depuis le premier jour sa passion la plus tenace. Toutes ses grandes inventions ont lentement mûri dans la profondeur, ont été annoncées par des esprits prophétiques et essayées par eux avant de surgir enfin, avec une nécessité de destin. Toutes étaient déjà très proches des spéculations bienheureuses des premier moines gothiques. C'est là ou jamais que se révèle l'origine religieuse de toute pensée technique.» — O. SPENGLER. Chapitre V. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 461.
«Tout ce qui est important dans la machine se dissimule à l'intérieur. On a senti le diable dans la machine et on n'a pas tort. Elle signifie, aux yeux du croyant, le Dieu détrôné. Elle livre à l'homme la sainte causalité et est mise en mouvement par lui silencieusement, irrésistiblement, avec une sorte d'omniscience prophétique.» — O. SPENGLER. Chapitre V. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 463.
«L'industire aussi est encore liée à la terre comme la paysannerie. Elle a son lieu d'origine et ses sources de matières jaillissant du sol. Seule le haute finance est tout à fait libre, tout à fait insaisissable.» — O. SPENGLER. Chapitre V. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 465.
«Une puissance ne peut être détruite que par une autre, non par un principe, et il n'y en a point d'autre contre l'argent. L'argent ne sera dominé que par le sang et supprimé par lui. La vie est le premier et le dernier courant, le flux cosmique en forme microcosmique. Elle est la réalité`du monde historique.» — O. SPENGLER. Chapitre V. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 466.
«L'histoire universelle est le tribunal universel: elle a toujours donné à la vie plus forte, plus complète, plus sûre d'elle-même, le droit à l'existence, dût-elle ne pas être un droit pour l'être éveillé; et elle a toujours sacrifié la vérité et la justice à la puissance, à la race, et condamné à mort les hommes et les peuples qui prisaient les vérités plus que les actes, la justice plus que la puissance.» — O. SPENGLER. Chapitre V. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 466.
mardi 12 octobre 2010
Oswald Spengler — Le déclin de l'Occident II (Chapitre IV)
[Avec mises à jour périodiques. — With periodical updates.]
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[L'ÉTAT]
«La femelle est plus proche du cosmique. Elle est plus profondément atachée au sol et son entrée dans les grands courants circulatoires est plus immédiate. Le mâle a plus de liberté, d'animalité de mouvement aussi, même dans ses sentiments et son intelligence; il est plus éveillé et plus tendu.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 299.
«L'homme vit le destin et comprend la causalité, la logique du devenu selon la cause et l'effet. Mais la femme est le destin, est le temps, est la logique organique du devenir même. C'est justement pour cette raison que le principe de causalité lui est éternellement étranger.» — O.SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 299.
«L'homme fait l'histoire, la femme est l'histoire.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 299.
«Féminine est la première histoire aculturelle de la succession des générations, celle qui est éternelle, maternelle, végétale (la plante elle-même ayant toujours quelque chose de féminin); celle qui ne varie jamais et qui parcourt, uniforme et silencieuse, l'existence de toutes les espèces humaines et animales, de toutes les cultures particulières éphémères. Un coup d'œil rétrospectif montre qu'elle est synonyme de la vie même. Elle aussi a ses luttes et sa tragédie. La femme conquiert sa victoire au lit de l'accouchée.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 300.
«L'éternelle politique de la femme est la conquête de l'homme, par lequel elle peut être mère d'enfants et, par conséquent, histoire, destin, avenir. Sa profonde diplomatie et sa ruse guerrière visent toujours le père de son fils. Mais l'homme, que la pesanteur de sa nature a fait membre de l'autre histoire, veut avoir son fils comme héritier, comme représentant de son sang et de sa tradition historique.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 300.
«Il y a ici, dans l'homme et la femme, un conflit de puissance entre les deux espèces d'histoire. La femme est vigoureuse et entièrement ce qu'elle est, elle ne vit l'homme et ses enfants que par rapport à elle et à sa vocation. Dans la nature de l'homme il y a quelque dissension. Il est ceci et autre chose encore que la femme ne peut ni comprendre ni admettre, et qu'elle conçoit comme une exaction et une violence contre ce qu'elle a de plus sacré. C'est la mystérieuse guerre originelle entre les sexes qui dure éternellement depuis qu'il existe des sexes, silencieuse, acharnée, sans réconciliation ni grâce. Il y a là aussi de la politique, des batailles, des alliances, des contrats et des trahisons. Les sentiments raciaux de la haine et de l'amour, issus tous deux des profondeurs de la nostalgie cosmique, du sentiment originel de la direction, règnent entre les sexes plus terriblement encore que dans l'autre histoire entre l'homme et la femme.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 300.
«La lutte entre l'homme et la femme a toujours lieu à cause du sang, à cause de la femme. C'est pour la femme, comme temps, qu'il existe une histoire politique.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 301.
«L'homme monte dans son histoire jusqu'à prendre en mains l'avenir d'un pays; puis vient une femme qui l'oblige à se mettre à genoux.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 301.
«L'histoire a donc un double sens sacré. Elle est cosmique ou politique. Elle est l'existence ou elle la conserve. Il y a deux sortes de destin, deux sortes de guerre, deux sortes de tragédie: l'espèce publique et l'espèce privée. Rien ne peut faire disparaître cette antithèse. Elle est fondée dès l'origine dans la nature du microcosme animal, qui est en même temps quelque chose de cosmique. Elle se manifeste dans toutes les situations importantes sous la forme d'un conflit des devoirs, conflit qui n'existe que pour l'homme, et qui ne disparaît pas, mais s'approfondit constamment au cours des hautes cultures. Il y a une vie publique et une vie privée, un droit public et un droit privé, des cultes communs et des cultes domestiques. En tant qu'ordre, l'existence est «en forme» pour l'une de ces histoires; en tant que souche, elle est en cours comme la seconde histoire. [...]. Cette double signification du temps dirigé trouve son expression suprême dans les idées de l'État et de la Famille.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 301.
«Ce n'est que la femme sans race, celle qui ne peut ou ne veut avoir d'enfants, qui n'est plus histoire, elle seule voudrait faire l'histoire des hommes, l'imiter.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 301, note 1.
«Tout ce qui a été accompli dans l'histoire universelle, à la guerre comme dans chaque continuation de la guerre par les moyens spirituels que nous appelons la politique, toute diplomatie efficace, toute tactique, toute stratégie, celle des États, des ordres ou des partis; tout cela émane d'unités vivantes qui se trouvaient «en forme».» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 302-303.
«Une culture est une mentalité qui arrive à s'exprimer en formes symboliques, mais ces formes sont vivantes et en évolution, même celles de l'art, dont nous n'avons pris conscience qu'en les abstrayant de l'histoire de l'art; elles consistent dans l'existence accrue des individus et des groupes, dans ce que nous avons précisément dénommé «l'existence en forme», et qui ne représente la culture que par ce degré de formation.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 303.
«Culture et classe sont termes interchangeables, ils naissent comme unité, ils meurent comme unité.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 304.
«... il y a dans chaque culture un sentiment vigoureux qui sait si quelqu'un appartient ou non à cette culture. Les concepts de barbare chez les anciens, d'infidèle chez les Arabes (Amhaarez ou Giaur), de tschoudra chez les Hindous ont beau diverger l'un de l'autre par la logique, ils n'expriment d'abord ni la haine, ni le mépris, mais constatent dans le tact de l'existence une différence qui, dans toutes les choses profondes, tire une ligne de démarcation infranchissable.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 304.
«Il y a entre l'ordre et la caste la même différence qu'entre la culture la plus ancienne et la civilisation la plus tardive. Dans l'ascension des premiers ordres, la noblesse et le clergé, c'est la culture qui se développe; dans les castes, c'est le fellahisme définitif qui s'exprime.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 305.
«La forme vivante est devenue une formule, qui possède également un style, mais un style figé, le style pétrifié de la caste, un je ne sais quoi de très raffiné, de très distingué, de très spirituel, qui se sent infiniment supérieur aux hommes d'une culture en devenir [...]; mais qui parcourt impassiblement tous les siècles avec la fierté byzantine d'une âme ayant depuis très longtemps derrière elle tous les problèmes et toutes les énigmes.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 305-306.
««L'étole et l'épée» s'opposent d'ailleurs à la charrue, comme les ordres prétendent s'opposer au reste, au non-ordre, à ce qui est précisément le fait, mais sans autre signification plus profonde. La distance intérieure, sentie, est si remplie de destin et si violente qu'aucune intelligence ne nous y peut transporter. La source de haine jaillit des villages, la flamme du mépris rayonne des châteaux. Ni la propriété, ni la puissance, ni la profession n'ont dressé cet abîme entre les «vies». En général, on ne peut le fonder logiquement. Il est de nature, métaphysique.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 306.
«Il y a une idée qui conditionne les deux ordres originels et eux seulement. Elle leur donne le sentiment vigoureux d'un rang accordé par Dieu et donc soustrait à toute critique, rang qui impose pour devoir le respect et la conscience de soi, mais aussi l'autodiscipline la plus sévère et souvent même la mort, et qui leur donne à tous deux la supériorité historique, le charme psychique qui ne suppose pas, mais qui produit la puissance. Les hommes appartenant à ces ordres, intérieurement et non seulement de nom, sont réellement différents des autres: leur vie s'appuie de part en part sur une dignité symbolique par opposition à celle des paysans et des bourgeois. Elle n'existe pas pour être menée, mais pour avoir une signification. Ce sont les deux côtés de toute vie aux mouvements libres qui arrivent à s'exprimer dans ces deux ordres, et dont l'une est toute existence, l'autre toute existence éveillée.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 306-307.
«Chaque noblesse est un symbole vivant du temps, chaque clergé un symbole vivant de l'espace. Destin et sainte causalité, histoire et nature, quand et où, race et langue, vie sexuelle et vie réflective: tout cela y trouve son expression la plus haute. La noblesse vit dans un monde de réalités, le prêtre dans un monde de vérités; l'un est connaisseur, l'autre savant; l'un acteur, l'autre penseur. Le sentiment cosmique de l'aristocrate est tact de part en part, celui du prêtre se déroule absolument en tensions.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 307.
«Idéellement, les deux ordres s'excluent. L'antithèse originelle du cosmique et du microcosmique, qui régit tous les êtres en mouvement libre dans l'espace, est aussi la source de leur double existence. Chacun n'est possible et nécessaire que par l'autre. Le monde homérique répand un silence sur le monde orphique, et nous savons par les philosophes présocratiques que le premier était pour le second un objet de courroux et de mépris.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 307-308.
«En vérité, la noblesse est l'ordre proprement dit, la quintessence de la race et du sang, un courant existentiel sous forme achevée possible. C'est justement pourquoi la noblesse est une paysannerie supérieure. [...]. Par comparaison, le clergé est proprement le contre-ordre, l'ordre de la négation, la non-race, l'indépendance du sol, l'être éveillé libre, atemporel, ahistorique.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 308.
«L'ordre du pur être éveillé et des vérités éternelles est dirigé contre le temps, contre la race, contre le genre dans toutes ses acceptions. L'homme en tant que paysan ou chevalier se tourne vers la femme en tant que destin, l'homme en tant que prêtre s'en détourne. La noblesse court toujours le danger de faire disparaître la vie publique dans la vie privée, en dirigeant le large courant de l'existence dans le lit plus étroit du fleuve de ses ancêtres et de ses petits-enfants. Le prêtre authentique n'admet pas en règle générale la vie privée, le sexe, la «maison».» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 309.
«... la noblesse est quelque chose, le clergé signifie quelque chose. Par là aussi il apparaît comme le contraire de tout ce qui est destin, race, ordre.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 309.
«Le noble, c'est l'homme-histoire, le prêtre l'homme nature.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 310.
«Les hommes du peuple (c'est-à-dire l'ensemble de ceux qui n'ont pas de tradition) peuvent ensuite arriver au pouvoir en aussi grand nombre que possible, ou même devenir seuls la classe dirigeante, ils seront eux-mêmes possédés à leur insu par le grand élan de la tradition qui forme leur attitude spirituelle et pratique, qui règle leurs méthodes et qui n'est rien d'autre que le tact dès longtemps acquis des générations successives.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 310-311.
«... l'histoire authentique n'est pas l'«histoire de la culture», entendue au sens antipolitique que lui donnent les philosophes et les doctrinaires de toutes les civilisations commençantes et qui est justement le sens préféré aujourd'hui, mais tout au contraire, l'histoire raciale, militaire, diplomatique, le destin des courants existentiels sous la forme de la femme et de l'homme, des sexes, des peuples, des ordres, des États, qui veulent de défendre et se dompter mutuellement dans le remous des grandes réalités. Au sens suprême, la politique est la vie et la vie est la politique. Chaque homme, qu'il le veuille ou non, est membre de ce phénomène de lutte, comme sujet ou comme objet: il n'y a pas de milieu.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 311.
«Le prêtre s'entoure du monde naturel, il en approfondit l'image par la réflexion. Le noble vit dans le monde historique et il l'approfondit en en modifiant l'image. Les deux se développent en une grande tradition, mais la tradition de l'un résulte de l'instruction, celle de l'autre de la discipline. Ceci est une différence capitale entre les deux ordres, et c'est pourquoi la noblesse seule est un ordre réel, tandis que le clergé apparaît comme ordre par son extrême opposition à l'autre. La discipline, l'élevage, s'étend au sang et passe des pères aux fils. Mais l'instruction suppose du génie et c'est pourquoi un clergé authentique et fort est toujours une collection de génies individuels — une communauté d'être éveillés, — indépendamment de leur origine au sens racique du mot, et par là aussi une négation du temps et de l'histoire. Parenté spirituelle et parenté sanguine — essayez d'approfondir la différence de ces deux mots. Un clergé héréditaire est une contradiction en soi.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 312-313.
«La force sacerdotale même est de nature causale, elle est l'effet de causes supérieures et agit à son tour comme cause. Le prêtre est le médiateur dans l'étendue éveillée du laïc et le dernier mystère; le clergé de toutes les cultures est déterminé ainsi, de par sa signification par son symbole primaire.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 313.
«Le sentiment mondain et le sentiment spirituel de l'ordre progressent et se donnent un idéal moral de l'ordre qui n'est accessible qu'à leurs membres et seulement après une longue et rigoureuse discipline. Le grand courant existentiel sent son unité en face du reste, dans lequel le sang coule paresseusement et sans tact; la grande communauté d'être éveillé sait qu'elle forme une unité en face du reste des non-initiés. C'est l,armée des héros et la communauté des saints.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 313.
«... bon et mauvais sont des distinction de noble, bien et mal des distinctions de prêtre. Bon et mauvais, concepts totémiques existant dès les associations d'hommes et de clans primitives, ne désignent pas des convictions, mais des hommes dans la totalité de leur existence vivante. [...] Bien et Mal, concept tabous, jugent l'homme en vue de sa sensibilité et de son intelligence, donc de sa conviction éveillée et de ses actions conscientes. Porter atteinte à la coutume de l'amour au sens racique est vulgaire; manquer au commandement de l'amour par l'Église est mal.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 313-314.
«Le concept fondamental de toute coutume vivante est l'honneur. Il implique tout le reste: fidélité, humilité, bravoure, valeur, maîtrise de soi, décision. Et l'honneur est affaire de sang, non de l'entendement. On ne réfléchit pas — ou bien on est déjà déshonoré. Pour la vie, le temps, l'histoire, perdre l'honneur c'est être anéanti. L'honneur de l'ordre, de la famille, de l'homme et de la femme, de la nation et de la patrie, l'honneur du paysan, du soldat, du bandit même: cet honneur signifie que la vie dans une personne a une certaine valeur, qu'elle possède un rang historique, une distance, une noblesse. Il appartient au temps direction comme le péché appartient à l'espace atemporel.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 314-315.
«Le clergé est microcosmique et animal, la noblesse cosmique et végétale; d'où son profond attachement au sol. Elle est elle-même une plante, solidement enracinée à la terre, sédentaire, et en cela paysanne, à un plus haut degré. De cette espèce de lieu cosmique est née l'idée de la propriété qui est tout à fait étrangère au microcosme, comme tel, dont le mouvement est libre dans l'espace. La propriété est un sentiment originel et non un concept, et elle appartient au temps, à l'histoire, au destin, non à l'espace et à la causalité. Elle ne saurait être fondée, mais elle existe.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 315.
«Avec la propriété, le prêtre renonce à quelque chose de périlleux et d'étranger, le noble renonce à sa personne même. § En partant de là, on voit se développer dès lors un double sentiment de la propriété: l'avoir comme puissance et l'avoir comme butin. Tous deux se situent immédiatement l'un à côté de l'autre, dans l'homme racique originel.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 316-317.
«À mesure que la culture croît, ces intrigues s'affirment et entrent en collision. Leur histoire est presque l'histoire universelle. Du sentiment de la puissance sont nés la conquête, la politique et le droit, du sentiment du butin le commerce, l'économie et l'argent. Le droit est la propriété du puissant. Son droit est le droit de tous. L'argent est l'arme la plus forte de l'industriel. Grâce à lui, il assujettit le monde. L'économique veut un État faible et qui le serve, le politique exige l'intégration de la vie économique dans la compétence de l'État: Adam Smith et Friedrich List, Capitalisme et Socialisme. Il y a dans toutes les cultures, au début une noblesse guerrière et une noblesse marchande, ensuite une noblesse terrienne et une noblesse d'argent, enfin une stratégie militaire et économique et un combat ininterrompu entre l'argent et le droit.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 317.
«D'un autre côté, le clergé et les savants se séparent. Tous deux poursuivent la vérité au lieu de la réalité, tous deux ressortissent à l'espace et au côté tabou de la vie. La peur de la mort n'est pas seulement l'origine de toute religion, mais de toute philosophie et de toute science de la nature. Mais à la sainte causalité on oppose la causalité profane. Profane est la nouvelle antinomie du religieux qui n'avait admis la science que comme auxiliaire. Profane est toute la critique tardive, son esprit, ses méthodes et ses buts.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 317.
«Noblesse et clergé naissent d'abord de la terre libre et représentent la pure symbolique de l'existence et de l'existence éveillée, du temps et de l'espace; du butin et de la spéculation naît ensuite un double type d'une moindre symbolique qui arrive à la suprématie dans les périodes tardives et citadines sous forme de l'économie et de la science. Dans ces deux courants existentiels, les idées de destin et de causalité sont développées jusqu'au bout d'une manière indiscrète et hostile à la tradition; il en naît des puissance qu'une hostilité mortelle sépare des idéals d'ordre de l'héroïsme et de la sainteté: l'argent et l'esprit. Ils sont aux premiers ce que l'âme citadine est à l'âme rurale. Dès lors, la propriété s'appelle richesse et l'intuition cosmique savoir: destin profane et causalité profane.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 319.
«Une histoire des ordres, qui doit par principe faire abstraction des classes professionnelles, est donc une étude métaphysique de l'humanité supérieure, dans la mesure où les espèces de vie en fluctuation l'élèvent à une grande symbolique, espèces dans et par lesquelles s'effectue l'histoire des cultures.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 320.
«La noblesse, tout entière végétale, prend partout son point de départ dans le pays, considéré comme propriété avec laquelle elle est solidement liée par la naissance. Elle a partout la forme fondamentale de la famille dans laquelle s'exprime aussi l'«autre» durée, c'est-à-dire du sang, comme le grand symbole du temps et de l'histoire.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 322.
«La volonté faustienne de l'infini s'exprime dans le principe généalogique qui, si bizarre que cela paraisse, n'appartient qu'à cette culture, mais qui pénètre ici aussi et transforme, jusqu'au tréfonds, toutes les formes historiques, avant tout les États eux-mêmes. Le sens historique, qui veut connaître à travers les siècles les destins de son propre sang et qui veut voir attestées documentairement la date et l'origine de ses ancêtres; l'organisation scrupuleuse d'arbres généalogiques par lesquels on peut faire dépendre la propriété actuelle et ses successions du destin d'un mariage, qui a peut-être été conclu un demi-millénaire auparavant; les concepts du sang pur, de la pairie, de la mésalliance; tout cela est volonté de direction dans le lointain du temps, volonté qui ne parvint peut-être que chez la noblesse égyptienne à une forme apparentée, mais beaucoup plus faible.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 322-323.
«Une invincible joie de vivre parcourt es siècles florissants de cet ordre très authentique [la noblesse de style antique] qui est de part en part direction, destin et race. La femme, parce qu'elle est histoire, et le combat, parce qu'il fait l'histoire, sont immédiatement au point central de sa pensée et de son action.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 323.
«La contradiction existant dans chaque microcosme entre l'être et l'être éveillé mène aussi avec une nécessité intérieure les deux ordres l'un contre l'autre. Le temps veut s'intégrer l'espace, et l'espace le temps. La puissance cléricale et la puissance mondaine sont des grandeurs d'ordre et de tendance si différents qu'il semble impossible de les concilier et même simplement de les rapprocher.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 324.
«Cette lutte de deux symboles également puissants a été dirigée dans la culture faustienne dans un esprit proche parent de l'égyptien, mais avec une passion bien plus grande encore, et elle ne fait apparaître la possibilité d'une paix entre l'État et l'Église depuis le plus ancien gothique que comme un armistice. Dans cette lutte s'exprime le caractère conditionné de l'être éveillé qui voudrait se rendre indépendant de l'être et qui ne le peut cependant pas. Les sens ont besoin du sang, mais le sang n'a pas besoin des sens.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 325.
«... la ville désormais apparaît avec don âme qui se sépare d'abord de l'âme du paysage, puis s'égale à elle, enfin s'efforce de l'opprimer et de l'éteindre. Mais cette évolution s'accomplit sous les espèces de la vie et appartient donc à l'histoire des ordres. À peine la vie urbaine a-t-elle surgi comme telle, à peine la population de ces petits oasis a-t-elle suffi comme telle, à peine la population de ces petites oasis a-t-elle développé un esprit de communauté qui sent que sa vie propre est différente de la vie du dehors, que le charme de la liberté personnelle commence à produire son effet et à attirer sans cesse de nouveaux courant d'existence dans ses murs..» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 326.
«Elle est l'enthousiasme créateur de l'homme de la ville qui, depuis le Xe siècle dans l'antiquité et «simultanément» dans les autres cultures, contraint sans cesse des générations nouvelles à entrer dans le cercle d'une vie nouvelle, enthousiasme qui fait apparaître pour la première fois dans l'histoire de l'humanité l'idée de la liberté. L'origine de cette liberté n'est pas politique et moins encore abstraite, mais elle exprime ce fait que la vie végétale liée au sol prend fin dans les murs de la ville et que les liens parcourant la vie rustique tout entière sont coupés. Sa nature a donc toujours quelque choses de négatif. Elle affranchit, elle délivre, elle défend; on se libère toujours de quelque chose. La ville est l'expression de cette liberté; l'esprit citadin est de l'intelligence devenue libre, et tout ce que la postérité a vécu sous le nom de liberté dans les mouvements spirituels sociaux et nationaux tire son origine de cette seule et unique cause primaire de notre libération de la terre.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 326.
«La bourgeoisie naît d'abord de la contradiction principielle entre la ville et la campagne, contradiction qui fait sentir aux «familles et corporation», si aiguës que soient par ailleurs leurs rivalités, leur unité en face de la noblesse d'origine et de l'État féodal en général, ainsi qu'en face du régime féodal de l'Église.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 327.
«... l'idée que la vie ne doit pas servir un but pratique, mais avant tout et de toute son âme l'expression de la symbolique du temps et de l'espace, et qu'elle n'a le droit de prétendre que de cette façon à un rang élevé: cette idée pousse précisément la raison citadine à une contradiction exaspérée.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 327.
«À eux [la noblesse et le clergé» s'opposent les puissances spirituelles de la ville parvenues à la domination: l'économie et la science, qui, avec la masse des artisans, des fonctionnaires et des ouvriers, ont le sentiment de former un parti non encore uni en soi, mais toujours un dès qu'il s'agit de lutter pour la liberté, c'est-à-dire pour l'indépendance citadine contre les grands symboles du passé et les droits qui en découlent. Tous sont les partis du tiers-ordre qui compte non d'après le rang, mais d'après le nombre de têtes, qui est «libéral» en quelque manière dans toutes les périodes tardives de toutes les cultures, c'est-à-dire libéré des puissances intérieures de la vie non citadine: l'économie est libre de gagner de l'argent, la science libre de critiquer; libertés où dans toutes les grandes décisions l'esprit prend la parole dans les livres et les assemblées (Démocratie) tandis que l'argent retire les avantages (Ploutocratie) et que la fin n'est jamais la victoire des idées, mais celle du capital. Mais c'est là encore l'opposition des vérités et des réalités, telle que la développe la vie citadine.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 328.
«Le régime de l'argent fait disparaître le sens des valeurs immobilières sédentaires, la critique scientifique fait disparaître chaque reste de pitié.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 329.
«Au sein de la Cité-État la plèbe est ce que sont dans l'État occidental baroque les paysans et les bourgeois réunis, lorsqu'ils protestent dans une assemblée corporative contre la toute-puissance d'un prince. Hors la politique, c'est-à-dire dans la société, la plèbe par opposition à la noblesse et au cler4gé est généralement inexistant, mais se divise immédiatement en professions particulières ayant des intérêts tout à fait divergents. Elle est un parti et représente comme tel la liberté au sens citadin.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 329-330.
«La masse est la fin, le radical néant.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 331.
«L'Église c'est l'histoire considéré comme moment d'arrêt, l'histoire c'est l'État considéré comme un fleuve qui coule. L'État réel est la physionomie d'une unité d'existence historique; seul l'État construit pas les théoriciens est un système.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 331.
«Un peuple dans le style d'une culture, par conséquent un peuple historique, s'appelle nation. Une nation possède, tant qu'elle vit et lutte, un État non seulement comme état du mouvement, mais avant tout comme Idée.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 332.
«La culture est l'existence de nations sous forme d'États.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 332.
«La femme est histoire universelle. Elle se soucie de la durée du sang par la conception et l'enfantement. La mère, l'enfant au sein, est le grand symbole de la vie cosmique. De ce côté, la vie de l'homme et de la femme est «en forme» comme mariage. Mais l'homme fait l'histoire, qui est une lutte sans fin pour la conservation de cette autre vie. Au souci maternel s'ajoute le souci paternel. L'homme, l'arme à la main, est l'autre grand symbole de la volonté de durée.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 332.
«Il n'y a de vie végétale que par rapport à la vie animale; les deux ordres primaires se conditionnent réciproquement; de même un peuple n'a de réalité que par rapport aux autres peuples, et de cette réalité consiste en oppositions naturelles et inéluctables, en attaque et en défense, en hostilité et en guerre. La guerre est la créatrice de toutes les grandes choses. Tout ce qui a un sens dans le courant de la vie est né de la victoire et de la défaite.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 322-323.
«Cette forme dans laquelle débouche le flot de l'existence s'appelle la coutume, si elle naît involontairement de son tact et de sa marche et qu'on en prend conscience ensuite; elle s'appelle le Droit, si elle est posée intentionnellement et imposée à la reconnaissance de tous.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 333.
«Un droit imposé par une communauté signifie un devoir pour chacun des ressortissants, mais il n'est point une preuve de leur puissance. Au contraire, c'est une question que de savoir qui l'impose et pour qui il est imposé.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 333.
«L'être et l'être éveillé, le destin et la causalité ne se concilient pas non plus dans la conception du droit. À la morale cléricale et idéologique du Bien et du Mal appartient la distinction morale de la justice et de l'injustice; à la morale racique du bon et du mauvais la distinction hiérarchique des concesseurs et des concessionnaires du droit.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 334.
«Les droits intérieurs sont le résultat d'une pensée strictement logique et causale, orientée vers la Vérité, c'est justement pourquoi leur validité dépend à tout moment de la puissance matérielle de leur auteur, ordre ou État. Une révolution anéantit, en même temps que cette puissance, immédiatement aussi la puissance des lois. Elles restent vraies, mais elle ne sont plus réelles.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 334.
«Les droits extérieurs au contraire, comme tous les traités de paix, ont pour essence de n'être jamais vrais et toujours réels (d'une réalité souvent effrayante) et ils ne prétendent pas du tout à la justice. Il leur suffit d'être efficace. Ce qui parle en eux, c'est la vie qui ne possède aucune logique causale et morale, mais une logique organique d'autant plus impérieuse.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 334-335.
«Si la politique est une guerre par d'autres moyens, le «droit au droit» est le butin du parti vainqueur.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 336.
«... il y a aux sommets de l'histoire de grandes formes vitales luttant pour la suprématie: l'Ordre et l'État tous deux courants d'existence d'une grande forme intérieure et d'une forme symbolique, tous deux résolus à faire de leur propre destin le destin de tous. Tel est, intérieurement compris et si l'on écarte tout à fait la conception de peuple, d'économie, de société et de politique, le sens de l'opposition entre le gouvernement social et le gouvernement politique de l'histoire.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 336.
«... dans tous les cas l'État est la forme qui détermine la situation extérieure, de telle sorte que les relations historiques entre les peuples sont toujours de nature politique et non sociale. Au contraire, la situation politique intérieure est régie à tel point par les antithèses entre les ordres, que la tactique sociale et la tactique politique apparaissent au premier rang inséparables et que les deux concept sont même identiques dans la pensée d'hommes qui identifient leur propre idéal de l'ordre, par exemple l'ordre bourgeois, avec la réalité historique et qui sont par conséquent incapables de penser en politiciens extérieurs.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 337.
«L'histoire universelle est une histoire politique et le sera toujours.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 337.
«... une noblesse authentique et ancienne s'identifie avec l'État et se soucie de tous comme de sa propriété. C'est là un de ses devoirs les plus distingués et dont elle prend le plus profondément conscience. Elle sent même qu'elle a un privilège inné de ce devoir et considère le service dans l'armée et l'administration comme sa profession propre.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 338.
«... la réalité historique ne connaît pas d'idéals, elle ne conaît que des faits. Il n'y a pas de vérités, il n'y a que des réalités. Il n'y a pas de raisons, pas de justice, pas de conciliation, pas de fin; il n'y a que des faits. Que celui qui ne le comprend pas écrive des livres de politique, mais cesse de faire de la politique.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 338.
«La majesté ou souveraineté de l'État est un symbole vivant de premier rang. Elle distingue les sujets et les objets des événements politiques non seulement dans l'histoire intérieure, mais aussi, chose beaucoup plus importante, dans l'histoire extérieure. La force du gouvernement, exprimée dans la claire distinction de ces deux facteurs, est le signe non équivoque de la force vitale d'une unité politique, à tel point que l'ébranlement de l'autorité existante, par exemple par les partisans d'un idéal constitutionnel opposé, ne fait presque jamais de ces partisans le sujet de la politique intérieure, mais presque toujours de la nation entière l'objet d'une politique étrangère, et très souvent pour toujours.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 339.
«... il n'y a que des États d'ordres, des États dans lesquels un ordre particulier gouverne.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 339.
«Une histoire politique est une physionomie et non un système.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 340.
«L'histoire de grand style commence dans chaque culture par l'État féodal, qui n'est pas l'État au sens futur du mot, mais l'organisation de la vie totale par rapport à un ordre. La plante la plus noble du sol, la race au sens très laudatif, se construit là une hiérarchie allant de la simple chevalerie au primus inter pares, au suzerain parmi ses pairs. Cette construction a lieu en même temps que l'architecture des grandes cathédrales et des grandes pyramides: ici, c'est la pierre, là c'est le sang qu'on élève au range de symbole: ici la signification, là l'existence.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 340-341.
«Le régime féodal reposait sur ce sentiment que tous existent à cause d'une «vie » vécue avec une signification. Les destins du sang noble formaient tout le contenu de l'histoire..» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 346.
«La themis ne renferme qu'une revendication du droit, la dike contient aussi un problème.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 336.
«La pensée politique originelle est toujours liée, avec une évidence qui pénètre jusqu'au sein du monde animal, au concept de chef particulier. Cet état se présente d'une manière tout à fait évidente à chaque foule animée dans toutes les situations décisives, comme le prouvent encore chaque attroupement public et chaque moment d'un danger immédiat. Ces foules sont des unités senties mais aveugles.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 346.
«Derrière la réalité d'un libre octroi très fréquent du commandement et derrière la maxime qui attribue la première place au plus méritant, il se cache presque toujours la rivalité des puissants qui entravent, non en principe, mais en fait , une succession que chacun d'eux revendique en secret pour sa famille. Sur cet état d'ambition devenue créatrice reposent les formes gouvernementales de l'oligarchie antique.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 347.
«Une troupe ébranlée dans sa discipline cède volontairement aux chefs fortuits du moment une puissance impossible à atteindre par les chefs légitimes, ni dans son volume ni dans son essence, et qui ne pourrait pas non plus être supportée si elle était légitime. Mais cette situation transposée sur un grand plan, est celle du début de chaque civilisation. Rien ne caractérise mieux la chute de la forme politique que l'ascension de puissances informes que l'on peut appeler, d'après leur cas le plus célèbre, le Napoléonisme.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 373.
«L'État antique est le seul qui ne soit pas susceptible d'un élargissement organique, et c'est pourquoi les conquêtes de la deuxième tyrannie aboutissent à une juxtaposition de deux unités politiques: la polis et le territoire qui lui est soumis, dont la cohérence reste fortuite et toujours menacée. Ainsi naît l'image du monde hellénistico-romain, remarquable et non encore comprise dans sa signification plus profonde: celle de territoires limitrophes au milieu desquels grouillent une infinité de polis avec lesquelles le concept d'État proprement dit, la res publica, reste exclusivement lié. Au centre de ces souverainetés et, pour chacune d'elles, en un point unique, se trouve le théâtre de toute la politique réelle. L'orbis terrarum (expression très caractéristique) est simplement leur instrument ou objet. Les concept romains de l'imperium (puissance officielle dictatoriale au delà des fossés de la ville et qui s'éteint dès qu'on dépasse le pomerium) et de la provincia, opposés à la res publica, correspondent à un sentiment général antique qui ne connaît que le corps de la ville, comme État et sujet politique et qui ne voit d'objet en «dehors» que par rapport à ce corps.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 376.
«Ce n'est pas la force, mais la faiblesse de l'absolutisme français, qui a fait exploser les idées anglaises en combinaison avec la dynamique de l'argent, donné une forme vivante à la phraséologie rationaliste, combiné avec la vertu de la terreur, la liberté avec le despotisme, et réagi aussi dans les petits orages de 1830 et de 1848 et dans la nostalgie catastrophique des socialistes.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 380.
«Sauver la forme, même quant elle est contraire à votre avantage: c'est sur cette entente que repose la possibilité du parlementarisme; par le fait qu'il est atteint, il est déjà proprement dominé.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 385.
«L'impérialisme est un résultat si nécessaire de chaque civilisation qu'il saisit un peuple au collet et l'oblige au rôle de maître quand il refuse de le jouer.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 391.
«La vie est dure quand elle doit être grande. Elle ne laisse choisir qu'entre la victoire ou la défaite, non entre la guerre et la paix; et les sacrifices de la victoire appartiennent à la victoire, car ce qui traîne des lamentations et du zèle à côté des événements n'est rien d'autre que la littérature, de la littérature écrite, pensée, vécue. Des vérités nues qui se perdent dans la poussées des faits.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 391.
«Il faut tenir ou mourir, il n'y a pas de milieu. La morale unique qu'autorise aujourd'hui pour nous la logique des choses est celle d'un ascensionniste sur un rocher escarpé. Un moment de faiblesse et tout est fini.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 398.
«Les traditions d'une vieille monarchie, d'une vieille noblesse, d'une vieille société distinguée, pourvu qu'elles soient encore assez saines pour écarter d'elles la politique d'affaire ou d'abstraction, pourvu qu'elles aient de l'honneur, du désintéressement, de la discipline, le sentiment authentique d'une grande mission, par conséquent des qualités raciques, la soumission, le sens du devoir et du sacrifice, peuvent devenir le centre qui raffermira le courant essentiel de tout un peuple, le fera survivre à ce temps et lui fera atteindre le rivage de l'avenir, Être en constitution est tout.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 399.
«La vie entière est politique, dans chacun de ses traits distinctifs, jusqu'à la moelle la plus intérieure. Ce que nous qualifions volontiers aujourd'hui d'énergie vitale (vitalité), ce «Il» qui est en nous, qui veut avancer et monter à tout prix, notre élan aveugle, cosmique, nostalgique vers l'affirmation et la puissance, qui reste lié au sol, à la «patrie», végétativement, raciquement, existence dirigée et nécessité de l'action, c'est la vie politique qui, partout chez les hommes supérieure, cherche et est tenue de chercher les grandes décisions pour être un destin ou pour subir un destin. Car on ne peut que grandir ou dépérir, il n'existe pas de troisième possibilité.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 404.
«Un peuple n'est réel que par rapport aux autres peuples. Mais le rapport naturel, racique, qui existe entre eux, est justement pour cette raison la guerre. C'est là un fait que les vérités ne peuvent modifier. La guerre est la politique primaire de tout vivant, à ce point que la lutte et la vie sont, au fond, identiques et que l'être s'éteint aussi lorsque la volonté de lutter est éteinte.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 405.
«Être le centre d'action, le milieu actif d'une foule, élever la forme intérieure de sa propre personne à la forme de peuples et d'âges entiers, avoir le commandement de l'histoire pour mener son propre peuple ou sa famille et leurs fins à la tête des événements; tel est l'élan irrésistible et à peine conscient de chaque individu ayant une vocation historique. Il n'y a qu'une histoire personnelle et donc aussi qu'une politique personnelle. Le combat, non des principes mais des hommes, non des idéals mais des traits raciques, pour l'exercice de la puissance, est l'alpha et l'omega de la politique, et même les révolutions n'y font pas exception, car là la «souveraineté du peuple» signifie simplement que l'autorité régnante a pris le titre de chef populaire au lieu du titre de roi. La méthode de gouvernement y est à peine modifiée, la situation des gouvernés ne l'est guère du tout.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 406.
«... le courage d'une troupe dépend de la confiance de ses chefs; de la confiance, c'est-à-dire du renoncement involontaire à la critique. C'est l'officier qui fait des lâches des héros ou des héros des lâches. Ceci est vrai des armées, des peuples et des ordres comme des partis. Le génie politique des foules n'est que la confiance dans le commandement.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 406-407.
«La vie, non l'individu n'a pas de conscience.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 407.
«Le véritable homme d'État est l'histoire en personne, qui a pour volonté individuelle sa direction et pour caractère sa logique organique.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 408.
«L'influence créatrice dans le vivant, non instructive, mais éducative, transformant le type des ordres et des peuples tout entiers, n'est exercée que par la grande personnalité, par le «Il» et la race qui sont, en elle, la force cosmique enchaînée. Ce n'est pas la Vérité, le Bien, le Sublime, mais le Romain, le Puritain, le Prussien qui sont des faits. Le sentiment de l'honneur, du devoir, la discipline, la décision — ne s'apprennent pas dans les livres. Ils sont éveillés dans l'existence dynamique par un modèle vivant.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 408.
«... l'élément suprême n'est pas l'action, mais le pouvoir de commander¨. Ce n'est qu'ainsi que l'individu se dépasse et devient le point central d'un monde actif. Il y a une manière de commander qui transforme l'obéissance en habitude fière, libre et distinguée ...» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 408.
«Le grand homme d'État est rare. Son apparition, son triomphe, précoce ou tardif ... tout cela est du hasard. Les grands hommes détruisent souvent plus qu'ils n'ont bâti — par la lacune que laisse leur mort dans le courant du devenir. Mais créer est une tradition, c'est supprimer le hasard.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 409.
«Le grand homme d'État est le jardinier de son peuple.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 410.
«La politique est la vision claire des grandes lignes qui sont tirées irrévocablement et le maniement sûr du fait unique, personnel, qui peut, dans leur ressort, d'une fatalité imminente faire un succès définitif.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 410-411.
«Le secret de toutes les victoires consiste dans l'organisation de l'invisible.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 411.
«Le nécessaire doit être fait à temps, c'est-à-dire tant qu'il est encore destiné à assurer la confiance à l'autorité régnante et qu'il n'est pas un sacrifice forcé révélant une faiblesse et réveillant un dédain. Les formes politiques sont des formes vivantes qui évoluent inexorablement dans une direction déterminée. On cesse d'être «en forme» quand on veut empêcher le cours de cette évolution ou de la dériver dans le sens d'un idéal. La nobilitas romaine possédait ce tact, non la noblesse spartiate.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 411.
«Le danger que court une aristocratie est d'être conservatrice dans les moyens, celui de la démocratie est de confondre la formule avec la forme.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 411.
«... ce fait fondamental de l'histoire supérieure, [...] un peuple n'est pas seul au monde et [...] son avenir est décidé par le rapport d'énergie avec les autres peuples et puissances, non par la seule organisation en lui.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 412.
«Un parti n'est pas un organe racique, mais une collection de têtes, et par conséquent aussi supérieur en esprit aux ordres anciens qu'ils lui sont supérieurs en instinct.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 413.
«... c'est toujours le non-=ordre, l'unité de protestation contre la nature de l'ordre en général, sa minorité régnante («les intellectuels et les riches») que nous voyons apparaître comme partis, avec un programme, avec un but non senti, mais défini, et avec la négation de tout ce qui ne peut être saisi rationnellement. C'est pourquoi il n'existe au fond qu'un seul parti, celui de la bourgeoisie, des libéraux, et il a aussi parfaitement conscience de ce rang occupé par lui.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 414.
«La fin de la démocratie et son passage au césarisme s'y expriment donc en ce sens que la disparition ne porte pas, par exemple, sur le parti du tiers-état, le libéralisme, mais sur le parti en tant que forme. L'opinion, le but populaire, les idéals abstraits de toute politique authentique de parti, se dissolvent et laissent place à la politique privée, à une libre volonté de puissance d'une poignée d'hommes de race.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 416.
«Une direction qui s'est organisée dans le peuple est donc devenue l'instrument de l'organisation, et elle continue de courir irrésistiblement sur cette même voie jusqu'à ce que l'organisation soit devenue, elle aussi, l'instrument des chefs. La volonté de puissance est plus forte que toutes les théories.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 417.
«Nous sommes à une époque de confiance illimitée en la toute-puissance de la raison. Les grands concepts généraux de liberté, droit, humanité, progrès, sont sacrés. Les grandes théories sont des Évangiles. Leur force de conviction ne repose pas sur des raisons, car la masse d'un parti ne possède ni l'énergie critique ni la distance nécessaire pour les examiner sérieusement, mais sur la consécration sacramentelle de leur phraséologie. Sans doute cet enchantement est restreint à la population des grandes villes et à la période du rationalisme, «religion des lettrés». Sur les paysans il n'a aucune influence, et sur les masses citadines il n'a d'influence qu'en certains temps, mais alors une influence de nouvelle révélation. On se convertit, on s'attache avec ferveur aux mots et à leurs prophètes; on se fait martyr sur les barricades, aux champs de bataille, sur le gibet; on voit s'ouvrir devant soi un au-delà politique et social, et la critique froide apparaît vulgaire, profane et digne d'être tuée.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 418.
«... il y a un gouffre béant entre l'esprit des lois et les habitudes pratiques développées dans le silence, sous la pression de ces lois, pour les adapter au tact de la vie réelle ou pour les en écarter. C'est d'abord l'expérience, et seulement à la fin de toute cette évolution, qui a enseigné que les droits du peuple et l'influence du peuple sont deux choses différentes. Plus général le droit de vote, plus restreinte la puissance d'un groupe électoral.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 420.
«Le fait qu'un droit de suffrage rend à peu près ce qu'en pense l'idéaliste suppose qu'il n'y a pas de direction organisée agissant sur les électeurs dans son intérêt et dans la mesure de l,argent dont elle dispose. Dès qu'existe cette direction, l'élection n'a plus que la signification d'une censure que la foule accorde aux organisations particulières; sur la formation desquelles elle finit par ne plus posséder la moindre influence.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 420-421.
«La liberté est comme toujours purement négative. Elle consiste à nier la tradition: dynastie, oligarchie ou khalifat; mais la puissance exécutive passe immédiatement et sans restriction à de nouvelles autorités: chefs de parti, dictateurs, prétendants, prophètes et leur partisans, vis-à-vis desquels la foule continue à être sans condition un objet.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 421.
«La poudre à canon et l'imprimerie sont inséparables, toutes deux inventées à l'époque du haut gothique, toutes deux produits de la pensée technique germanique, comme les deux grand instruments de la télétactique faustienne.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 425.
«La démocratie a complètement supplanté le livre par le journal dans la vie spirituelle des masses populaires. Le livre, dont la richesse de points de vue obligeait la pensée à la sélection et à la critique, n'est plus encore une propriété réelle que pour des milieux très restreints. Le peuple lit un seul journal, «le sien», qui pénètre chaque jour par millions d'exemplaires dans toutes les maisons, enchaîne les esprits dans son cercle dès le matin, fait oublier les livres par ses «suppléments» ou, s'il laisse passer tel ou tel livre sous les yeux, en détruit l'effet par une critique anticipée.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 426.
«Qu'est-ce que la vérité ? Pour la foule, c'est ce qu'elle lit et entend constamment. Si un pauvre diable s'assied quelque part et rassemble des raisons pour constater «la vérité», celle-ci restera sa vérité. L'autre, la vérité publique du moment, qui seule importe dans le monde réel des actions et des succès, est aujourd'hui un produit de la presse. Ce qu'elle veut est vrai. Ses chefs produisent, transforment, échangent la vérité.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 426.
«C'est la fin de la démocratie. Si la démonstration décide de tout dans le monde des vérités, le succès prend cette décision dans celui des réalités. Succès signifie le triomphe d'un courant existentiel sur les autres. La vie a triomphé; les rêves des réformateurs sont devenus les instruments des maîtres. Dans la démocratie tardive, la race apparaît et asservit les idéals ou les précipite dans le gouffre avec des éclats de rire.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 428.
VEUILLEZ NOTER: En faisant la publicité de ces pensées, le rédacteur de ce site n'endosse en aucune façon la signification de leur contenu. Si elles sont présentées ici, c'est qu'elles nous semblent offrir une matière importante à réflexion, par la pertinence de leur thématique ainsi que par la clarté de leur énonciation et des implications qui peuvent en découler. Par ailleurs, nous encourageons ceux qui y seront exposés à l'esprit de critique et de discernement le plus développé, afin d'en retirer non seulement la «substantifique moëlle», selon l'expression de Rabelais, mais encore la vérité la plus haute qu'elles pourraient celer, en relevant le défi de retrouver la vérité suprême, là où elle veut bien se révéler, y compris dans son expérience de vie immédiate, à l'esprit qui la recherche avec engagement, conviction et passion.
[L'ÉTAT]
«La femelle est plus proche du cosmique. Elle est plus profondément atachée au sol et son entrée dans les grands courants circulatoires est plus immédiate. Le mâle a plus de liberté, d'animalité de mouvement aussi, même dans ses sentiments et son intelligence; il est plus éveillé et plus tendu.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 299.
«L'homme vit le destin et comprend la causalité, la logique du devenu selon la cause et l'effet. Mais la femme est le destin, est le temps, est la logique organique du devenir même. C'est justement pour cette raison que le principe de causalité lui est éternellement étranger.» — O.SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 299.
«L'homme fait l'histoire, la femme est l'histoire.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 299.
«Féminine est la première histoire aculturelle de la succession des générations, celle qui est éternelle, maternelle, végétale (la plante elle-même ayant toujours quelque chose de féminin); celle qui ne varie jamais et qui parcourt, uniforme et silencieuse, l'existence de toutes les espèces humaines et animales, de toutes les cultures particulières éphémères. Un coup d'œil rétrospectif montre qu'elle est synonyme de la vie même. Elle aussi a ses luttes et sa tragédie. La femme conquiert sa victoire au lit de l'accouchée.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 300.
«L'éternelle politique de la femme est la conquête de l'homme, par lequel elle peut être mère d'enfants et, par conséquent, histoire, destin, avenir. Sa profonde diplomatie et sa ruse guerrière visent toujours le père de son fils. Mais l'homme, que la pesanteur de sa nature a fait membre de l'autre histoire, veut avoir son fils comme héritier, comme représentant de son sang et de sa tradition historique.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 300.
«Il y a ici, dans l'homme et la femme, un conflit de puissance entre les deux espèces d'histoire. La femme est vigoureuse et entièrement ce qu'elle est, elle ne vit l'homme et ses enfants que par rapport à elle et à sa vocation. Dans la nature de l'homme il y a quelque dissension. Il est ceci et autre chose encore que la femme ne peut ni comprendre ni admettre, et qu'elle conçoit comme une exaction et une violence contre ce qu'elle a de plus sacré. C'est la mystérieuse guerre originelle entre les sexes qui dure éternellement depuis qu'il existe des sexes, silencieuse, acharnée, sans réconciliation ni grâce. Il y a là aussi de la politique, des batailles, des alliances, des contrats et des trahisons. Les sentiments raciaux de la haine et de l'amour, issus tous deux des profondeurs de la nostalgie cosmique, du sentiment originel de la direction, règnent entre les sexes plus terriblement encore que dans l'autre histoire entre l'homme et la femme.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 300.
«La lutte entre l'homme et la femme a toujours lieu à cause du sang, à cause de la femme. C'est pour la femme, comme temps, qu'il existe une histoire politique.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 301.
«L'homme monte dans son histoire jusqu'à prendre en mains l'avenir d'un pays; puis vient une femme qui l'oblige à se mettre à genoux.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 301.
«L'histoire a donc un double sens sacré. Elle est cosmique ou politique. Elle est l'existence ou elle la conserve. Il y a deux sortes de destin, deux sortes de guerre, deux sortes de tragédie: l'espèce publique et l'espèce privée. Rien ne peut faire disparaître cette antithèse. Elle est fondée dès l'origine dans la nature du microcosme animal, qui est en même temps quelque chose de cosmique. Elle se manifeste dans toutes les situations importantes sous la forme d'un conflit des devoirs, conflit qui n'existe que pour l'homme, et qui ne disparaît pas, mais s'approfondit constamment au cours des hautes cultures. Il y a une vie publique et une vie privée, un droit public et un droit privé, des cultes communs et des cultes domestiques. En tant qu'ordre, l'existence est «en forme» pour l'une de ces histoires; en tant que souche, elle est en cours comme la seconde histoire. [...]. Cette double signification du temps dirigé trouve son expression suprême dans les idées de l'État et de la Famille.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 301.
«Ce n'est que la femme sans race, celle qui ne peut ou ne veut avoir d'enfants, qui n'est plus histoire, elle seule voudrait faire l'histoire des hommes, l'imiter.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 301, note 1.
«Tout ce qui a été accompli dans l'histoire universelle, à la guerre comme dans chaque continuation de la guerre par les moyens spirituels que nous appelons la politique, toute diplomatie efficace, toute tactique, toute stratégie, celle des États, des ordres ou des partis; tout cela émane d'unités vivantes qui se trouvaient «en forme».» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 302-303.
«Une culture est une mentalité qui arrive à s'exprimer en formes symboliques, mais ces formes sont vivantes et en évolution, même celles de l'art, dont nous n'avons pris conscience qu'en les abstrayant de l'histoire de l'art; elles consistent dans l'existence accrue des individus et des groupes, dans ce que nous avons précisément dénommé «l'existence en forme», et qui ne représente la culture que par ce degré de formation.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 303.
«Culture et classe sont termes interchangeables, ils naissent comme unité, ils meurent comme unité.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 304.
«... il y a dans chaque culture un sentiment vigoureux qui sait si quelqu'un appartient ou non à cette culture. Les concepts de barbare chez les anciens, d'infidèle chez les Arabes (Amhaarez ou Giaur), de tschoudra chez les Hindous ont beau diverger l'un de l'autre par la logique, ils n'expriment d'abord ni la haine, ni le mépris, mais constatent dans le tact de l'existence une différence qui, dans toutes les choses profondes, tire une ligne de démarcation infranchissable.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 304.
«Il y a entre l'ordre et la caste la même différence qu'entre la culture la plus ancienne et la civilisation la plus tardive. Dans l'ascension des premiers ordres, la noblesse et le clergé, c'est la culture qui se développe; dans les castes, c'est le fellahisme définitif qui s'exprime.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 305.
«La forme vivante est devenue une formule, qui possède également un style, mais un style figé, le style pétrifié de la caste, un je ne sais quoi de très raffiné, de très distingué, de très spirituel, qui se sent infiniment supérieur aux hommes d'une culture en devenir [...]; mais qui parcourt impassiblement tous les siècles avec la fierté byzantine d'une âme ayant depuis très longtemps derrière elle tous les problèmes et toutes les énigmes.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 305-306.
««L'étole et l'épée» s'opposent d'ailleurs à la charrue, comme les ordres prétendent s'opposer au reste, au non-ordre, à ce qui est précisément le fait, mais sans autre signification plus profonde. La distance intérieure, sentie, est si remplie de destin et si violente qu'aucune intelligence ne nous y peut transporter. La source de haine jaillit des villages, la flamme du mépris rayonne des châteaux. Ni la propriété, ni la puissance, ni la profession n'ont dressé cet abîme entre les «vies». En général, on ne peut le fonder logiquement. Il est de nature, métaphysique.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 306.
«Il y a une idée qui conditionne les deux ordres originels et eux seulement. Elle leur donne le sentiment vigoureux d'un rang accordé par Dieu et donc soustrait à toute critique, rang qui impose pour devoir le respect et la conscience de soi, mais aussi l'autodiscipline la plus sévère et souvent même la mort, et qui leur donne à tous deux la supériorité historique, le charme psychique qui ne suppose pas, mais qui produit la puissance. Les hommes appartenant à ces ordres, intérieurement et non seulement de nom, sont réellement différents des autres: leur vie s'appuie de part en part sur une dignité symbolique par opposition à celle des paysans et des bourgeois. Elle n'existe pas pour être menée, mais pour avoir une signification. Ce sont les deux côtés de toute vie aux mouvements libres qui arrivent à s'exprimer dans ces deux ordres, et dont l'une est toute existence, l'autre toute existence éveillée.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 306-307.
«Chaque noblesse est un symbole vivant du temps, chaque clergé un symbole vivant de l'espace. Destin et sainte causalité, histoire et nature, quand et où, race et langue, vie sexuelle et vie réflective: tout cela y trouve son expression la plus haute. La noblesse vit dans un monde de réalités, le prêtre dans un monde de vérités; l'un est connaisseur, l'autre savant; l'un acteur, l'autre penseur. Le sentiment cosmique de l'aristocrate est tact de part en part, celui du prêtre se déroule absolument en tensions.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 307.
«Idéellement, les deux ordres s'excluent. L'antithèse originelle du cosmique et du microcosmique, qui régit tous les êtres en mouvement libre dans l'espace, est aussi la source de leur double existence. Chacun n'est possible et nécessaire que par l'autre. Le monde homérique répand un silence sur le monde orphique, et nous savons par les philosophes présocratiques que le premier était pour le second un objet de courroux et de mépris.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 307-308.
«En vérité, la noblesse est l'ordre proprement dit, la quintessence de la race et du sang, un courant existentiel sous forme achevée possible. C'est justement pourquoi la noblesse est une paysannerie supérieure. [...]. Par comparaison, le clergé est proprement le contre-ordre, l'ordre de la négation, la non-race, l'indépendance du sol, l'être éveillé libre, atemporel, ahistorique.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 308.
«L'ordre du pur être éveillé et des vérités éternelles est dirigé contre le temps, contre la race, contre le genre dans toutes ses acceptions. L'homme en tant que paysan ou chevalier se tourne vers la femme en tant que destin, l'homme en tant que prêtre s'en détourne. La noblesse court toujours le danger de faire disparaître la vie publique dans la vie privée, en dirigeant le large courant de l'existence dans le lit plus étroit du fleuve de ses ancêtres et de ses petits-enfants. Le prêtre authentique n'admet pas en règle générale la vie privée, le sexe, la «maison».» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 309.
«... la noblesse est quelque chose, le clergé signifie quelque chose. Par là aussi il apparaît comme le contraire de tout ce qui est destin, race, ordre.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 309.
«Le noble, c'est l'homme-histoire, le prêtre l'homme nature.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 310.
«Les hommes du peuple (c'est-à-dire l'ensemble de ceux qui n'ont pas de tradition) peuvent ensuite arriver au pouvoir en aussi grand nombre que possible, ou même devenir seuls la classe dirigeante, ils seront eux-mêmes possédés à leur insu par le grand élan de la tradition qui forme leur attitude spirituelle et pratique, qui règle leurs méthodes et qui n'est rien d'autre que le tact dès longtemps acquis des générations successives.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 310-311.
«... l'histoire authentique n'est pas l'«histoire de la culture», entendue au sens antipolitique que lui donnent les philosophes et les doctrinaires de toutes les civilisations commençantes et qui est justement le sens préféré aujourd'hui, mais tout au contraire, l'histoire raciale, militaire, diplomatique, le destin des courants existentiels sous la forme de la femme et de l'homme, des sexes, des peuples, des ordres, des États, qui veulent de défendre et se dompter mutuellement dans le remous des grandes réalités. Au sens suprême, la politique est la vie et la vie est la politique. Chaque homme, qu'il le veuille ou non, est membre de ce phénomène de lutte, comme sujet ou comme objet: il n'y a pas de milieu.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 311.
«Le prêtre s'entoure du monde naturel, il en approfondit l'image par la réflexion. Le noble vit dans le monde historique et il l'approfondit en en modifiant l'image. Les deux se développent en une grande tradition, mais la tradition de l'un résulte de l'instruction, celle de l'autre de la discipline. Ceci est une différence capitale entre les deux ordres, et c'est pourquoi la noblesse seule est un ordre réel, tandis que le clergé apparaît comme ordre par son extrême opposition à l'autre. La discipline, l'élevage, s'étend au sang et passe des pères aux fils. Mais l'instruction suppose du génie et c'est pourquoi un clergé authentique et fort est toujours une collection de génies individuels — une communauté d'être éveillés, — indépendamment de leur origine au sens racique du mot, et par là aussi une négation du temps et de l'histoire. Parenté spirituelle et parenté sanguine — essayez d'approfondir la différence de ces deux mots. Un clergé héréditaire est une contradiction en soi.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 312-313.
«La force sacerdotale même est de nature causale, elle est l'effet de causes supérieures et agit à son tour comme cause. Le prêtre est le médiateur dans l'étendue éveillée du laïc et le dernier mystère; le clergé de toutes les cultures est déterminé ainsi, de par sa signification par son symbole primaire.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 313.
«Le sentiment mondain et le sentiment spirituel de l'ordre progressent et se donnent un idéal moral de l'ordre qui n'est accessible qu'à leurs membres et seulement après une longue et rigoureuse discipline. Le grand courant existentiel sent son unité en face du reste, dans lequel le sang coule paresseusement et sans tact; la grande communauté d'être éveillé sait qu'elle forme une unité en face du reste des non-initiés. C'est l,armée des héros et la communauté des saints.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 313.
«... bon et mauvais sont des distinction de noble, bien et mal des distinctions de prêtre. Bon et mauvais, concepts totémiques existant dès les associations d'hommes et de clans primitives, ne désignent pas des convictions, mais des hommes dans la totalité de leur existence vivante. [...] Bien et Mal, concept tabous, jugent l'homme en vue de sa sensibilité et de son intelligence, donc de sa conviction éveillée et de ses actions conscientes. Porter atteinte à la coutume de l'amour au sens racique est vulgaire; manquer au commandement de l'amour par l'Église est mal.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 313-314.
«Le concept fondamental de toute coutume vivante est l'honneur. Il implique tout le reste: fidélité, humilité, bravoure, valeur, maîtrise de soi, décision. Et l'honneur est affaire de sang, non de l'entendement. On ne réfléchit pas — ou bien on est déjà déshonoré. Pour la vie, le temps, l'histoire, perdre l'honneur c'est être anéanti. L'honneur de l'ordre, de la famille, de l'homme et de la femme, de la nation et de la patrie, l'honneur du paysan, du soldat, du bandit même: cet honneur signifie que la vie dans une personne a une certaine valeur, qu'elle possède un rang historique, une distance, une noblesse. Il appartient au temps direction comme le péché appartient à l'espace atemporel.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 314-315.
«Le clergé est microcosmique et animal, la noblesse cosmique et végétale; d'où son profond attachement au sol. Elle est elle-même une plante, solidement enracinée à la terre, sédentaire, et en cela paysanne, à un plus haut degré. De cette espèce de lieu cosmique est née l'idée de la propriété qui est tout à fait étrangère au microcosme, comme tel, dont le mouvement est libre dans l'espace. La propriété est un sentiment originel et non un concept, et elle appartient au temps, à l'histoire, au destin, non à l'espace et à la causalité. Elle ne saurait être fondée, mais elle existe.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 315.
«Avec la propriété, le prêtre renonce à quelque chose de périlleux et d'étranger, le noble renonce à sa personne même. § En partant de là, on voit se développer dès lors un double sentiment de la propriété: l'avoir comme puissance et l'avoir comme butin. Tous deux se situent immédiatement l'un à côté de l'autre, dans l'homme racique originel.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 316-317.
«À mesure que la culture croît, ces intrigues s'affirment et entrent en collision. Leur histoire est presque l'histoire universelle. Du sentiment de la puissance sont nés la conquête, la politique et le droit, du sentiment du butin le commerce, l'économie et l'argent. Le droit est la propriété du puissant. Son droit est le droit de tous. L'argent est l'arme la plus forte de l'industriel. Grâce à lui, il assujettit le monde. L'économique veut un État faible et qui le serve, le politique exige l'intégration de la vie économique dans la compétence de l'État: Adam Smith et Friedrich List, Capitalisme et Socialisme. Il y a dans toutes les cultures, au début une noblesse guerrière et une noblesse marchande, ensuite une noblesse terrienne et une noblesse d'argent, enfin une stratégie militaire et économique et un combat ininterrompu entre l'argent et le droit.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 317.
«D'un autre côté, le clergé et les savants se séparent. Tous deux poursuivent la vérité au lieu de la réalité, tous deux ressortissent à l'espace et au côté tabou de la vie. La peur de la mort n'est pas seulement l'origine de toute religion, mais de toute philosophie et de toute science de la nature. Mais à la sainte causalité on oppose la causalité profane. Profane est la nouvelle antinomie du religieux qui n'avait admis la science que comme auxiliaire. Profane est toute la critique tardive, son esprit, ses méthodes et ses buts.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 317.
«Noblesse et clergé naissent d'abord de la terre libre et représentent la pure symbolique de l'existence et de l'existence éveillée, du temps et de l'espace; du butin et de la spéculation naît ensuite un double type d'une moindre symbolique qui arrive à la suprématie dans les périodes tardives et citadines sous forme de l'économie et de la science. Dans ces deux courants existentiels, les idées de destin et de causalité sont développées jusqu'au bout d'une manière indiscrète et hostile à la tradition; il en naît des puissance qu'une hostilité mortelle sépare des idéals d'ordre de l'héroïsme et de la sainteté: l'argent et l'esprit. Ils sont aux premiers ce que l'âme citadine est à l'âme rurale. Dès lors, la propriété s'appelle richesse et l'intuition cosmique savoir: destin profane et causalité profane.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 319.
«Une histoire des ordres, qui doit par principe faire abstraction des classes professionnelles, est donc une étude métaphysique de l'humanité supérieure, dans la mesure où les espèces de vie en fluctuation l'élèvent à une grande symbolique, espèces dans et par lesquelles s'effectue l'histoire des cultures.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 320.
«La noblesse, tout entière végétale, prend partout son point de départ dans le pays, considéré comme propriété avec laquelle elle est solidement liée par la naissance. Elle a partout la forme fondamentale de la famille dans laquelle s'exprime aussi l'«autre» durée, c'est-à-dire du sang, comme le grand symbole du temps et de l'histoire.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 322.
«La volonté faustienne de l'infini s'exprime dans le principe généalogique qui, si bizarre que cela paraisse, n'appartient qu'à cette culture, mais qui pénètre ici aussi et transforme, jusqu'au tréfonds, toutes les formes historiques, avant tout les États eux-mêmes. Le sens historique, qui veut connaître à travers les siècles les destins de son propre sang et qui veut voir attestées documentairement la date et l'origine de ses ancêtres; l'organisation scrupuleuse d'arbres généalogiques par lesquels on peut faire dépendre la propriété actuelle et ses successions du destin d'un mariage, qui a peut-être été conclu un demi-millénaire auparavant; les concepts du sang pur, de la pairie, de la mésalliance; tout cela est volonté de direction dans le lointain du temps, volonté qui ne parvint peut-être que chez la noblesse égyptienne à une forme apparentée, mais beaucoup plus faible.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 322-323.
«Une invincible joie de vivre parcourt es siècles florissants de cet ordre très authentique [la noblesse de style antique] qui est de part en part direction, destin et race. La femme, parce qu'elle est histoire, et le combat, parce qu'il fait l'histoire, sont immédiatement au point central de sa pensée et de son action.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 323.
«La contradiction existant dans chaque microcosme entre l'être et l'être éveillé mène aussi avec une nécessité intérieure les deux ordres l'un contre l'autre. Le temps veut s'intégrer l'espace, et l'espace le temps. La puissance cléricale et la puissance mondaine sont des grandeurs d'ordre et de tendance si différents qu'il semble impossible de les concilier et même simplement de les rapprocher.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 324.
«Cette lutte de deux symboles également puissants a été dirigée dans la culture faustienne dans un esprit proche parent de l'égyptien, mais avec une passion bien plus grande encore, et elle ne fait apparaître la possibilité d'une paix entre l'État et l'Église depuis le plus ancien gothique que comme un armistice. Dans cette lutte s'exprime le caractère conditionné de l'être éveillé qui voudrait se rendre indépendant de l'être et qui ne le peut cependant pas. Les sens ont besoin du sang, mais le sang n'a pas besoin des sens.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 325.
«... la ville désormais apparaît avec don âme qui se sépare d'abord de l'âme du paysage, puis s'égale à elle, enfin s'efforce de l'opprimer et de l'éteindre. Mais cette évolution s'accomplit sous les espèces de la vie et appartient donc à l'histoire des ordres. À peine la vie urbaine a-t-elle surgi comme telle, à peine la population de ces petits oasis a-t-elle suffi comme telle, à peine la population de ces petites oasis a-t-elle développé un esprit de communauté qui sent que sa vie propre est différente de la vie du dehors, que le charme de la liberté personnelle commence à produire son effet et à attirer sans cesse de nouveaux courant d'existence dans ses murs..» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 326.
«Elle est l'enthousiasme créateur de l'homme de la ville qui, depuis le Xe siècle dans l'antiquité et «simultanément» dans les autres cultures, contraint sans cesse des générations nouvelles à entrer dans le cercle d'une vie nouvelle, enthousiasme qui fait apparaître pour la première fois dans l'histoire de l'humanité l'idée de la liberté. L'origine de cette liberté n'est pas politique et moins encore abstraite, mais elle exprime ce fait que la vie végétale liée au sol prend fin dans les murs de la ville et que les liens parcourant la vie rustique tout entière sont coupés. Sa nature a donc toujours quelque choses de négatif. Elle affranchit, elle délivre, elle défend; on se libère toujours de quelque chose. La ville est l'expression de cette liberté; l'esprit citadin est de l'intelligence devenue libre, et tout ce que la postérité a vécu sous le nom de liberté dans les mouvements spirituels sociaux et nationaux tire son origine de cette seule et unique cause primaire de notre libération de la terre.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 326.
«La bourgeoisie naît d'abord de la contradiction principielle entre la ville et la campagne, contradiction qui fait sentir aux «familles et corporation», si aiguës que soient par ailleurs leurs rivalités, leur unité en face de la noblesse d'origine et de l'État féodal en général, ainsi qu'en face du régime féodal de l'Église.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 327.
«... l'idée que la vie ne doit pas servir un but pratique, mais avant tout et de toute son âme l'expression de la symbolique du temps et de l'espace, et qu'elle n'a le droit de prétendre que de cette façon à un rang élevé: cette idée pousse précisément la raison citadine à une contradiction exaspérée.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 327.
«À eux [la noblesse et le clergé» s'opposent les puissances spirituelles de la ville parvenues à la domination: l'économie et la science, qui, avec la masse des artisans, des fonctionnaires et des ouvriers, ont le sentiment de former un parti non encore uni en soi, mais toujours un dès qu'il s'agit de lutter pour la liberté, c'est-à-dire pour l'indépendance citadine contre les grands symboles du passé et les droits qui en découlent. Tous sont les partis du tiers-ordre qui compte non d'après le rang, mais d'après le nombre de têtes, qui est «libéral» en quelque manière dans toutes les périodes tardives de toutes les cultures, c'est-à-dire libéré des puissances intérieures de la vie non citadine: l'économie est libre de gagner de l'argent, la science libre de critiquer; libertés où dans toutes les grandes décisions l'esprit prend la parole dans les livres et les assemblées (Démocratie) tandis que l'argent retire les avantages (Ploutocratie) et que la fin n'est jamais la victoire des idées, mais celle du capital. Mais c'est là encore l'opposition des vérités et des réalités, telle que la développe la vie citadine.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 328.
«Le régime de l'argent fait disparaître le sens des valeurs immobilières sédentaires, la critique scientifique fait disparaître chaque reste de pitié.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 329.
«Au sein de la Cité-État la plèbe est ce que sont dans l'État occidental baroque les paysans et les bourgeois réunis, lorsqu'ils protestent dans une assemblée corporative contre la toute-puissance d'un prince. Hors la politique, c'est-à-dire dans la société, la plèbe par opposition à la noblesse et au cler4gé est généralement inexistant, mais se divise immédiatement en professions particulières ayant des intérêts tout à fait divergents. Elle est un parti et représente comme tel la liberté au sens citadin.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 329-330.
«La masse est la fin, le radical néant.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 331.
«L'Église c'est l'histoire considéré comme moment d'arrêt, l'histoire c'est l'État considéré comme un fleuve qui coule. L'État réel est la physionomie d'une unité d'existence historique; seul l'État construit pas les théoriciens est un système.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 331.
«Un peuple dans le style d'une culture, par conséquent un peuple historique, s'appelle nation. Une nation possède, tant qu'elle vit et lutte, un État non seulement comme état du mouvement, mais avant tout comme Idée.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 332.
«La culture est l'existence de nations sous forme d'États.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 332.
«La femme est histoire universelle. Elle se soucie de la durée du sang par la conception et l'enfantement. La mère, l'enfant au sein, est le grand symbole de la vie cosmique. De ce côté, la vie de l'homme et de la femme est «en forme» comme mariage. Mais l'homme fait l'histoire, qui est une lutte sans fin pour la conservation de cette autre vie. Au souci maternel s'ajoute le souci paternel. L'homme, l'arme à la main, est l'autre grand symbole de la volonté de durée.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 332.
«Il n'y a de vie végétale que par rapport à la vie animale; les deux ordres primaires se conditionnent réciproquement; de même un peuple n'a de réalité que par rapport aux autres peuples, et de cette réalité consiste en oppositions naturelles et inéluctables, en attaque et en défense, en hostilité et en guerre. La guerre est la créatrice de toutes les grandes choses. Tout ce qui a un sens dans le courant de la vie est né de la victoire et de la défaite.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 322-323.
«Cette forme dans laquelle débouche le flot de l'existence s'appelle la coutume, si elle naît involontairement de son tact et de sa marche et qu'on en prend conscience ensuite; elle s'appelle le Droit, si elle est posée intentionnellement et imposée à la reconnaissance de tous.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 333.
«Un droit imposé par une communauté signifie un devoir pour chacun des ressortissants, mais il n'est point une preuve de leur puissance. Au contraire, c'est une question que de savoir qui l'impose et pour qui il est imposé.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 333.
«L'être et l'être éveillé, le destin et la causalité ne se concilient pas non plus dans la conception du droit. À la morale cléricale et idéologique du Bien et du Mal appartient la distinction morale de la justice et de l'injustice; à la morale racique du bon et du mauvais la distinction hiérarchique des concesseurs et des concessionnaires du droit.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 334.
«Les droits intérieurs sont le résultat d'une pensée strictement logique et causale, orientée vers la Vérité, c'est justement pourquoi leur validité dépend à tout moment de la puissance matérielle de leur auteur, ordre ou État. Une révolution anéantit, en même temps que cette puissance, immédiatement aussi la puissance des lois. Elles restent vraies, mais elle ne sont plus réelles.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 334.
«Les droits extérieurs au contraire, comme tous les traités de paix, ont pour essence de n'être jamais vrais et toujours réels (d'une réalité souvent effrayante) et ils ne prétendent pas du tout à la justice. Il leur suffit d'être efficace. Ce qui parle en eux, c'est la vie qui ne possède aucune logique causale et morale, mais une logique organique d'autant plus impérieuse.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 334-335.
«Si la politique est une guerre par d'autres moyens, le «droit au droit» est le butin du parti vainqueur.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 336.
«... il y a aux sommets de l'histoire de grandes formes vitales luttant pour la suprématie: l'Ordre et l'État tous deux courants d'existence d'une grande forme intérieure et d'une forme symbolique, tous deux résolus à faire de leur propre destin le destin de tous. Tel est, intérieurement compris et si l'on écarte tout à fait la conception de peuple, d'économie, de société et de politique, le sens de l'opposition entre le gouvernement social et le gouvernement politique de l'histoire.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 336.
«... dans tous les cas l'État est la forme qui détermine la situation extérieure, de telle sorte que les relations historiques entre les peuples sont toujours de nature politique et non sociale. Au contraire, la situation politique intérieure est régie à tel point par les antithèses entre les ordres, que la tactique sociale et la tactique politique apparaissent au premier rang inséparables et que les deux concept sont même identiques dans la pensée d'hommes qui identifient leur propre idéal de l'ordre, par exemple l'ordre bourgeois, avec la réalité historique et qui sont par conséquent incapables de penser en politiciens extérieurs.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 337.
«L'histoire universelle est une histoire politique et le sera toujours.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 337.
«... une noblesse authentique et ancienne s'identifie avec l'État et se soucie de tous comme de sa propriété. C'est là un de ses devoirs les plus distingués et dont elle prend le plus profondément conscience. Elle sent même qu'elle a un privilège inné de ce devoir et considère le service dans l'armée et l'administration comme sa profession propre.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 338.
«... la réalité historique ne connaît pas d'idéals, elle ne conaît que des faits. Il n'y a pas de vérités, il n'y a que des réalités. Il n'y a pas de raisons, pas de justice, pas de conciliation, pas de fin; il n'y a que des faits. Que celui qui ne le comprend pas écrive des livres de politique, mais cesse de faire de la politique.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 338.
«La majesté ou souveraineté de l'État est un symbole vivant de premier rang. Elle distingue les sujets et les objets des événements politiques non seulement dans l'histoire intérieure, mais aussi, chose beaucoup plus importante, dans l'histoire extérieure. La force du gouvernement, exprimée dans la claire distinction de ces deux facteurs, est le signe non équivoque de la force vitale d'une unité politique, à tel point que l'ébranlement de l'autorité existante, par exemple par les partisans d'un idéal constitutionnel opposé, ne fait presque jamais de ces partisans le sujet de la politique intérieure, mais presque toujours de la nation entière l'objet d'une politique étrangère, et très souvent pour toujours.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 339.
«... il n'y a que des États d'ordres, des États dans lesquels un ordre particulier gouverne.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 339.
«Une histoire politique est une physionomie et non un système.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 340.
«L'histoire de grand style commence dans chaque culture par l'État féodal, qui n'est pas l'État au sens futur du mot, mais l'organisation de la vie totale par rapport à un ordre. La plante la plus noble du sol, la race au sens très laudatif, se construit là une hiérarchie allant de la simple chevalerie au primus inter pares, au suzerain parmi ses pairs. Cette construction a lieu en même temps que l'architecture des grandes cathédrales et des grandes pyramides: ici, c'est la pierre, là c'est le sang qu'on élève au range de symbole: ici la signification, là l'existence.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 340-341.
«Le régime féodal reposait sur ce sentiment que tous existent à cause d'une «vie » vécue avec une signification. Les destins du sang noble formaient tout le contenu de l'histoire..» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 346.
«La themis ne renferme qu'une revendication du droit, la dike contient aussi un problème.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 336.
«La pensée politique originelle est toujours liée, avec une évidence qui pénètre jusqu'au sein du monde animal, au concept de chef particulier. Cet état se présente d'une manière tout à fait évidente à chaque foule animée dans toutes les situations décisives, comme le prouvent encore chaque attroupement public et chaque moment d'un danger immédiat. Ces foules sont des unités senties mais aveugles.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 346.
«Derrière la réalité d'un libre octroi très fréquent du commandement et derrière la maxime qui attribue la première place au plus méritant, il se cache presque toujours la rivalité des puissants qui entravent, non en principe, mais en fait , une succession que chacun d'eux revendique en secret pour sa famille. Sur cet état d'ambition devenue créatrice reposent les formes gouvernementales de l'oligarchie antique.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 347.
«Une troupe ébranlée dans sa discipline cède volontairement aux chefs fortuits du moment une puissance impossible à atteindre par les chefs légitimes, ni dans son volume ni dans son essence, et qui ne pourrait pas non plus être supportée si elle était légitime. Mais cette situation transposée sur un grand plan, est celle du début de chaque civilisation. Rien ne caractérise mieux la chute de la forme politique que l'ascension de puissances informes que l'on peut appeler, d'après leur cas le plus célèbre, le Napoléonisme.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 373.
«L'État antique est le seul qui ne soit pas susceptible d'un élargissement organique, et c'est pourquoi les conquêtes de la deuxième tyrannie aboutissent à une juxtaposition de deux unités politiques: la polis et le territoire qui lui est soumis, dont la cohérence reste fortuite et toujours menacée. Ainsi naît l'image du monde hellénistico-romain, remarquable et non encore comprise dans sa signification plus profonde: celle de territoires limitrophes au milieu desquels grouillent une infinité de polis avec lesquelles le concept d'État proprement dit, la res publica, reste exclusivement lié. Au centre de ces souverainetés et, pour chacune d'elles, en un point unique, se trouve le théâtre de toute la politique réelle. L'orbis terrarum (expression très caractéristique) est simplement leur instrument ou objet. Les concept romains de l'imperium (puissance officielle dictatoriale au delà des fossés de la ville et qui s'éteint dès qu'on dépasse le pomerium) et de la provincia, opposés à la res publica, correspondent à un sentiment général antique qui ne connaît que le corps de la ville, comme État et sujet politique et qui ne voit d'objet en «dehors» que par rapport à ce corps.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 376.
«Ce n'est pas la force, mais la faiblesse de l'absolutisme français, qui a fait exploser les idées anglaises en combinaison avec la dynamique de l'argent, donné une forme vivante à la phraséologie rationaliste, combiné avec la vertu de la terreur, la liberté avec le despotisme, et réagi aussi dans les petits orages de 1830 et de 1848 et dans la nostalgie catastrophique des socialistes.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 380.
«Sauver la forme, même quant elle est contraire à votre avantage: c'est sur cette entente que repose la possibilité du parlementarisme; par le fait qu'il est atteint, il est déjà proprement dominé.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 385.
«L'impérialisme est un résultat si nécessaire de chaque civilisation qu'il saisit un peuple au collet et l'oblige au rôle de maître quand il refuse de le jouer.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 391.
«La vie est dure quand elle doit être grande. Elle ne laisse choisir qu'entre la victoire ou la défaite, non entre la guerre et la paix; et les sacrifices de la victoire appartiennent à la victoire, car ce qui traîne des lamentations et du zèle à côté des événements n'est rien d'autre que la littérature, de la littérature écrite, pensée, vécue. Des vérités nues qui se perdent dans la poussées des faits.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 391.
«Il faut tenir ou mourir, il n'y a pas de milieu. La morale unique qu'autorise aujourd'hui pour nous la logique des choses est celle d'un ascensionniste sur un rocher escarpé. Un moment de faiblesse et tout est fini.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 398.
«Les traditions d'une vieille monarchie, d'une vieille noblesse, d'une vieille société distinguée, pourvu qu'elles soient encore assez saines pour écarter d'elles la politique d'affaire ou d'abstraction, pourvu qu'elles aient de l'honneur, du désintéressement, de la discipline, le sentiment authentique d'une grande mission, par conséquent des qualités raciques, la soumission, le sens du devoir et du sacrifice, peuvent devenir le centre qui raffermira le courant essentiel de tout un peuple, le fera survivre à ce temps et lui fera atteindre le rivage de l'avenir, Être en constitution est tout.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 399.
«La vie entière est politique, dans chacun de ses traits distinctifs, jusqu'à la moelle la plus intérieure. Ce que nous qualifions volontiers aujourd'hui d'énergie vitale (vitalité), ce «Il» qui est en nous, qui veut avancer et monter à tout prix, notre élan aveugle, cosmique, nostalgique vers l'affirmation et la puissance, qui reste lié au sol, à la «patrie», végétativement, raciquement, existence dirigée et nécessité de l'action, c'est la vie politique qui, partout chez les hommes supérieure, cherche et est tenue de chercher les grandes décisions pour être un destin ou pour subir un destin. Car on ne peut que grandir ou dépérir, il n'existe pas de troisième possibilité.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 404.
«Un peuple n'est réel que par rapport aux autres peuples. Mais le rapport naturel, racique, qui existe entre eux, est justement pour cette raison la guerre. C'est là un fait que les vérités ne peuvent modifier. La guerre est la politique primaire de tout vivant, à ce point que la lutte et la vie sont, au fond, identiques et que l'être s'éteint aussi lorsque la volonté de lutter est éteinte.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 405.
«Être le centre d'action, le milieu actif d'une foule, élever la forme intérieure de sa propre personne à la forme de peuples et d'âges entiers, avoir le commandement de l'histoire pour mener son propre peuple ou sa famille et leurs fins à la tête des événements; tel est l'élan irrésistible et à peine conscient de chaque individu ayant une vocation historique. Il n'y a qu'une histoire personnelle et donc aussi qu'une politique personnelle. Le combat, non des principes mais des hommes, non des idéals mais des traits raciques, pour l'exercice de la puissance, est l'alpha et l'omega de la politique, et même les révolutions n'y font pas exception, car là la «souveraineté du peuple» signifie simplement que l'autorité régnante a pris le titre de chef populaire au lieu du titre de roi. La méthode de gouvernement y est à peine modifiée, la situation des gouvernés ne l'est guère du tout.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 406.
«... le courage d'une troupe dépend de la confiance de ses chefs; de la confiance, c'est-à-dire du renoncement involontaire à la critique. C'est l'officier qui fait des lâches des héros ou des héros des lâches. Ceci est vrai des armées, des peuples et des ordres comme des partis. Le génie politique des foules n'est que la confiance dans le commandement.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 406-407.
«La vie, non l'individu n'a pas de conscience.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 407.
«Le véritable homme d'État est l'histoire en personne, qui a pour volonté individuelle sa direction et pour caractère sa logique organique.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 408.
«L'influence créatrice dans le vivant, non instructive, mais éducative, transformant le type des ordres et des peuples tout entiers, n'est exercée que par la grande personnalité, par le «Il» et la race qui sont, en elle, la force cosmique enchaînée. Ce n'est pas la Vérité, le Bien, le Sublime, mais le Romain, le Puritain, le Prussien qui sont des faits. Le sentiment de l'honneur, du devoir, la discipline, la décision — ne s'apprennent pas dans les livres. Ils sont éveillés dans l'existence dynamique par un modèle vivant.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 408.
«... l'élément suprême n'est pas l'action, mais le pouvoir de commander¨. Ce n'est qu'ainsi que l'individu se dépasse et devient le point central d'un monde actif. Il y a une manière de commander qui transforme l'obéissance en habitude fière, libre et distinguée ...» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 408.
«Le grand homme d'État est rare. Son apparition, son triomphe, précoce ou tardif ... tout cela est du hasard. Les grands hommes détruisent souvent plus qu'ils n'ont bâti — par la lacune que laisse leur mort dans le courant du devenir. Mais créer est une tradition, c'est supprimer le hasard.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 409.
«Le grand homme d'État est le jardinier de son peuple.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 410.
«La politique est la vision claire des grandes lignes qui sont tirées irrévocablement et le maniement sûr du fait unique, personnel, qui peut, dans leur ressort, d'une fatalité imminente faire un succès définitif.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 410-411.
«Le secret de toutes les victoires consiste dans l'organisation de l'invisible.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 411.
«Le nécessaire doit être fait à temps, c'est-à-dire tant qu'il est encore destiné à assurer la confiance à l'autorité régnante et qu'il n'est pas un sacrifice forcé révélant une faiblesse et réveillant un dédain. Les formes politiques sont des formes vivantes qui évoluent inexorablement dans une direction déterminée. On cesse d'être «en forme» quand on veut empêcher le cours de cette évolution ou de la dériver dans le sens d'un idéal. La nobilitas romaine possédait ce tact, non la noblesse spartiate.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 411.
«Le danger que court une aristocratie est d'être conservatrice dans les moyens, celui de la démocratie est de confondre la formule avec la forme.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 411.
«... ce fait fondamental de l'histoire supérieure, [...] un peuple n'est pas seul au monde et [...] son avenir est décidé par le rapport d'énergie avec les autres peuples et puissances, non par la seule organisation en lui.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 412.
«Un parti n'est pas un organe racique, mais une collection de têtes, et par conséquent aussi supérieur en esprit aux ordres anciens qu'ils lui sont supérieurs en instinct.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 413.
«... c'est toujours le non-=ordre, l'unité de protestation contre la nature de l'ordre en général, sa minorité régnante («les intellectuels et les riches») que nous voyons apparaître comme partis, avec un programme, avec un but non senti, mais défini, et avec la négation de tout ce qui ne peut être saisi rationnellement. C'est pourquoi il n'existe au fond qu'un seul parti, celui de la bourgeoisie, des libéraux, et il a aussi parfaitement conscience de ce rang occupé par lui.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 414.
«La fin de la démocratie et son passage au césarisme s'y expriment donc en ce sens que la disparition ne porte pas, par exemple, sur le parti du tiers-état, le libéralisme, mais sur le parti en tant que forme. L'opinion, le but populaire, les idéals abstraits de toute politique authentique de parti, se dissolvent et laissent place à la politique privée, à une libre volonté de puissance d'une poignée d'hommes de race.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 416.
«Une direction qui s'est organisée dans le peuple est donc devenue l'instrument de l'organisation, et elle continue de courir irrésistiblement sur cette même voie jusqu'à ce que l'organisation soit devenue, elle aussi, l'instrument des chefs. La volonté de puissance est plus forte que toutes les théories.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 417.
«Nous sommes à une époque de confiance illimitée en la toute-puissance de la raison. Les grands concepts généraux de liberté, droit, humanité, progrès, sont sacrés. Les grandes théories sont des Évangiles. Leur force de conviction ne repose pas sur des raisons, car la masse d'un parti ne possède ni l'énergie critique ni la distance nécessaire pour les examiner sérieusement, mais sur la consécration sacramentelle de leur phraséologie. Sans doute cet enchantement est restreint à la population des grandes villes et à la période du rationalisme, «religion des lettrés». Sur les paysans il n'a aucune influence, et sur les masses citadines il n'a d'influence qu'en certains temps, mais alors une influence de nouvelle révélation. On se convertit, on s'attache avec ferveur aux mots et à leurs prophètes; on se fait martyr sur les barricades, aux champs de bataille, sur le gibet; on voit s'ouvrir devant soi un au-delà politique et social, et la critique froide apparaît vulgaire, profane et digne d'être tuée.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 418.
«... il y a un gouffre béant entre l'esprit des lois et les habitudes pratiques développées dans le silence, sous la pression de ces lois, pour les adapter au tact de la vie réelle ou pour les en écarter. C'est d'abord l'expérience, et seulement à la fin de toute cette évolution, qui a enseigné que les droits du peuple et l'influence du peuple sont deux choses différentes. Plus général le droit de vote, plus restreinte la puissance d'un groupe électoral.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 420.
«Le fait qu'un droit de suffrage rend à peu près ce qu'en pense l'idéaliste suppose qu'il n'y a pas de direction organisée agissant sur les électeurs dans son intérêt et dans la mesure de l,argent dont elle dispose. Dès qu'existe cette direction, l'élection n'a plus que la signification d'une censure que la foule accorde aux organisations particulières; sur la formation desquelles elle finit par ne plus posséder la moindre influence.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 420-421.
«La liberté est comme toujours purement négative. Elle consiste à nier la tradition: dynastie, oligarchie ou khalifat; mais la puissance exécutive passe immédiatement et sans restriction à de nouvelles autorités: chefs de parti, dictateurs, prétendants, prophètes et leur partisans, vis-à-vis desquels la foule continue à être sans condition un objet.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 421.
«La poudre à canon et l'imprimerie sont inséparables, toutes deux inventées à l'époque du haut gothique, toutes deux produits de la pensée technique germanique, comme les deux grand instruments de la télétactique faustienne.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 425.
«La démocratie a complètement supplanté le livre par le journal dans la vie spirituelle des masses populaires. Le livre, dont la richesse de points de vue obligeait la pensée à la sélection et à la critique, n'est plus encore une propriété réelle que pour des milieux très restreints. Le peuple lit un seul journal, «le sien», qui pénètre chaque jour par millions d'exemplaires dans toutes les maisons, enchaîne les esprits dans son cercle dès le matin, fait oublier les livres par ses «suppléments» ou, s'il laisse passer tel ou tel livre sous les yeux, en détruit l'effet par une critique anticipée.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 426.
«Qu'est-ce que la vérité ? Pour la foule, c'est ce qu'elle lit et entend constamment. Si un pauvre diable s'assied quelque part et rassemble des raisons pour constater «la vérité», celle-ci restera sa vérité. L'autre, la vérité publique du moment, qui seule importe dans le monde réel des actions et des succès, est aujourd'hui un produit de la presse. Ce qu'elle veut est vrai. Ses chefs produisent, transforment, échangent la vérité.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 426.
«C'est la fin de la démocratie. Si la démonstration décide de tout dans le monde des vérités, le succès prend cette décision dans celui des réalités. Succès signifie le triomphe d'un courant existentiel sur les autres. La vie a triomphé; les rêves des réformateurs sont devenus les instruments des maîtres. Dans la démocratie tardive, la race apparaît et asservit les idéals ou les précipite dans le gouffre avec des éclats de rire.» — O. SPENGLER. Chapitre IV. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 428.
Oswald Spengler — Le déclin de l'Occident II (Chapitre III)
[Avec mises à jour périodiques. — With periodical updates.]
VEUILLEZ NOTER: En faisant la publicité de ces pensées, le rédacteur de ce site n'endosse en aucune façon la signification de leur contenu. Si elles sont présentées ici, c'est qu'elles nous semblent offrir une matière importante à réflexion, par la pertinence de leur thématique ainsi que par la clarté de leur énonciation et des implications qui peuvent en découler. Par ailleurs, nous encourageons ceux qui y seront exposés à l'esprit de critique et de discernement le plus développé, afin d'en retirer non seulement la «substantifique moëlle», selon l'expression de Rabelais, mais encore la vérité la plus haute qu'elles pourraient celer, en relevant le défi de retrouver la vérité suprême, là où elle veut bien se révéler, y compris dans son expérience de vie immédiate, à l'esprit qui la recherche avec engagement, conviction et passion.
[PROBLÈMES DE LA CULTURE ARABE]
«Qu'est-ce que le tourment d'une âme peut avoir avec le communisme ? Une religion parvenue aux problèmes sociaux a déjà cessé d'être une religion.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 179-180.
«De cultes antiques, on peut exercer le nombre qu'on veut; de ceux-ci, on ne peut appartenir qu'à un seul. Là la mission est inimaginable, ici elle est évidente, et le sens des exercices religieux passe clairement du côté doctrinal.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 185.
«On a beaucoup parlé de la tolérance antique. Peut-être est-ce aux limites de sa tolérance qu'on reconnaît le plus clairement la nature d'une religion; et de telles limites existaient aussi pour les anciens cultes de la cité. Que ces cultes aient existé et fussent pratiqués en grand nombre, c'est leur signification proprement dite et qui n'avait donc besoin d'aucune tolérance en général. Mais on supposait que chacun d'eux avait du respect pour la forme cultuelle de l'autre. Quiconque n'observait pas ce respect par la parole et par l'acte, comme beaucoup de philosophes et aussi de partisans de religions étrangères, apprit à connaître la mesure de cette tolérance antique. Les persécutions mutuelles des églises magiques supposent quelque chose de tout à fait différent; là c'est le devoir hénothéiste de la vraie foi qui interdit de reconnaître la fausse.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 186.
«Le judaïsme s'est accru, comme le parsisme, depuis la période de l'exil, et il a augmenté à l'infini ses minuscules associations tribales par la conversion et les changements de confession. C'est la seule forme de conquête dont dispose une nation sans territoire, et qui est donc naturelle et évidente pour les religions magiques.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 192.
«Le christianisme est la seule religion de l'histoire universelle, où un destin humain du présent immédiat a été transformé en symbole et en point central de toute la création.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 195.
«... quand Jésus fut conduit devant Pilate, c'est le monde des faits et celui des vérités qui s'affrontèrent sans intermédiaire ni conciliation, avec une clarté terrifiante et un poids symbolique sans exemple dans la scène de toute histoire universelle. La scission qui est à la base de tout être vivant et libre depuis ses origines, par le fait même qu'il existe, qu'il est être et être éveillé, a pris ici la forme de tragédie humaine, la plus haute qu'il soit en général possible d'imaginer. La célèbre question du procurateur romain: Qu'est-ce que la Vérité? — la seule parole du Nouveau Testament qui ait de la race — renferme toute la signification de l'histoire, validité exclusive du fait, rang de l'état social de la guerre, du sang, toute-puissance du succès, et orgueil d'une grande fortune. A quoi le sentiment muet, et non la bouche de Jésus, a répondu par cette autre question décisive de toute religion: Qu'est-ce que la réalité ? Pour Pilate, cette réalité était tout; pour lui rien. Impossible à la religiosité authentique de répondre différemment à l'histoire et à ses puissance, elle ne peut pas juger autrement la vie active et, si elle le fait quand même, elle cesse d'être religion et tombe elle-même au pouvoir de l'esprit historique.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 199.
«Le politicien-né méprise, au milieu de son domaine des faits, les considérations ascétiques de l'idéologue et du moraliste — il a raison. Pour le croyant, toute l'ambition et tous les succès du monde historique sont des péchés et sans valeur éternelle — lui aussi a raison. Un souverain voulant corriger la religion, en l'orientant vers des buts politiques pratiques, est un fou. Un moraliste prêchant la vérité, la justice, la paix, la réconciliation dans le monde réel, est également un fou. Aucune religion n'a jamais changé le monde, et aucun fait n'a jamais pu réfuter la religion. Il n'existe aucun pont entre le temps dirigé et l'éternité atemporelle, entre la marche de l'histoire et l'existence d'un ordre cosmique divin, dans la structure duquel la «soumission» est le mot qui traduit le cas extrême de la causalité. Telle est la signification dernière de ce moment qui a vu s'affronter Pilate et Jésus. Dans l'un, le monde historique, le Romain a fait crucifier le Galiléen — c'était son destin. Dans l'autre, Rome tomba dans la damnation, et la croix devint la garantie du rachat. C'était la «Volonté de Dieu».» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 199-200.
«Religion est métaphysique, rien d'autre: CREDO QUIA ABSURDUM. Et la métaphysique expliquée, démontrée ou prétendue démontrée est simple philosophie ou érudition. Je parle ici de la métaphysique vécue. Impensable identifié à la certitude, surnaturel identifié à l'événement. Vie dans un monde irréel mais vrai. [...]. Voir dans l'éthique le but de la religion, c'est la méconnaître.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 200.
«La religion est de part en part métaphysique, ultériorité, être éveillé au sein d'un univers où le témoignage des sens ne découvre que le plan antérieur; la religion, c'est la vie dans et avec le supra-sensible, et là où manque la force de cet être éveillé, la force même d'y croire, là aussi la religion est à sa fin.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 200.
«L'homme possède une âme, mais à l'esprit de la lumière et du bien il ne fait que participer; le divin descend en lui d'en haut, il unit ainsi tous les particuliers d'ici-bas avec l'Unique d'en haut. Ce sentiment élémentaire, qui domine la foi et l'opinion entières de tous les hommes magiques, est quelque chose de tout à fait unique qui distingue de toutes les autres non seulement leur conception du monde, mais aussi toute espèce de religiosité magique dans son essence la plus intime.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 215.
«L'idée du Logos au sens très large est, dans le plan de la pensée magique, le pendant exact de l'impression magique de la lumière dans la crypte d'où il est tiré. Elle signifie que l'esprit de la divinité, sa «parole» comme représentante de la lumière et messagère du bien, se détache de cette divinité inaccessible et entre en relation avec l'être humain pour l'élever, le remplir, le sauver.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 216.
«Les apocalypses ne sont qu'une vision spectrale, élevée à une violence tragique extrême.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 217.
«Une révélation magique est un phénomène mystique où le verbe éternel et incréé de la divinité — où la Divinité comme Verbe — entre dans l'homme afin de recevoir par lui la forme «révélée» visible des sons, et surtout des lettres.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 224.
«La lutte de l'être et de l'être éveillé, donc de la politique et de la religion, de l'histoire et de la nature, ne peut en effet disparaître tout entière par la forme de l'église magique et son identification de l'État avec la nation; la race perce effectivement dans la vie de ces créations spirituelles et elle triomphe du divin, précisément parce qu'il a admis le mondain.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 233-234.
«Nous appelons religion l'être éveillé d'un vivant au moment où il domine l'être, le gouverne, le nie ou même le détruit.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 241.
«La haine est à la peu ce que le temps est à l'espace, le sang à l'œil, le tact à la tension, l'héroïsme à la sainteté. Mais c'est aussi cette différence qui existe entre l'amour au sens racial et l'amour au sens religieux.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 241.
«Toute religion est apparentée à la lumière. L'étendue est perçue aussi religieusement, comme monde virtuel, en partant du moi comme foyer de lumière. L'ouïe et le toucher s'intègrent à la vue et l'invisible dont on sent les effets sensibles devient la quintessence du démonique. Tout ce que nous désignons par les mots de divinité, de révélation, de rédemption, de soumission, est en quelque sorte un élément de la réalité éclairée. La mort est quelque chose qu'il voit et qu'il connaît en voyant, et la naissance est en vue de la mort le second mystère: toutes deux limitent pour l'œil le cosmos senti comme vie d'un corps dans l'espace lumineux .» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 241-242.
«Il existe une crainte profonde, qui est connue aussi des animaux, devant la liberté du microcosme devant l'espace, devant l'espace même et ses puissances, devant la mort; et une autre crainte pour le courant cosmique de l'être, pour la vie, pour le temps dirigé. La première fait obscurément pressentir que la liberté dans l'étendue est une nouvelle espèce de dépendance, plus profonde que celle de la plante. Elle fait chercher à l'individu qui sent sa faiblesse la proximité et la liaison avec les autres. L'angoisse mène à parler, et c'est une espèce de langage qu'est chaque religion. De l'angoisse devant l'espace naissent les numina du monde naturel et les cultes des dieux. De l'angoisse pour le temps naissent les numina de la vie, de la race, de l'État, convergeant dans le culte des ancêtres. C'est la différence entre le tabou et le totem, car le totémique aussi apparaît toujours sous forme religieuse et provient d'une crainte sacrée de ce qui est soustrait, même à l'intellection, et qui reste éternellement étranger..» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 242.
«L'opinion selon laquelle le monde entier, considéré comme nature en relation avec un être éveillé, obéit à une chaîne causale unique, est tout à fait impossible à appliquer par notre pensée qui ne pense toujours que des complexes particuliers. Elle reste une foi, elle est même la foi tout court, car sur elle repose l'intellection cosmique religieuse qui admet, avec une nécessité logique, partout où elle remarque quelque chose, des numina considérés comme passager, pour les événements fortuits auxquels elle ne pensera plus jamais comme durables, pour ceux qui résident, par exemple, dans les sources, les arbres, les pierres, les collines, les étoiles, donc en des lieux déterminés, ou pour ceux qui peuvent être partout présents, telles les divinités du ciel, de la guerre, de la sagesse. Ces numina ne sont limités que dans le cadre de chaque acte de pensée particulier.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 243.
«... l'expérience, entendue dans ce sens anorganique meurtrier et immobilisant, entièrement différente de l'expérience vivante et de la connaissance des hommes, a lieu de deux manières: comme théorie ou comme technique, religieusement parlant, comme mythe ou comme culte, suivant que le croyant veut ouvrir ou forcer les secrets de son ambiance. Tous deux requièrent un haut développement de l'intelligence humaine. Tous deux peuvent naître de la peur ou de l'amour. Il y a un mythe de la peur, comme le mythe mosaïque et les mythes primitifs en général, et un mythe de l'amour, comme celui du christianisme primitif et de la mystique gothique, comme il y a une technique de l'incantation défensive et une technique de l'incantation suppliante. C'est là sans doute aussi la différence profonde entre le sacrifice et la prière: ainsi se distingue l'humanité primitive de l'humanité supérieure. La religiosité est un trait de l'âme, mais la religion est un talent.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 244.
«... l'instrument où se concentre la force spirituelle tout entière est la forme du réel abstraite de la vision par le langage et dont la quintessence n'est pas ouverte à chaque être éveillé: la limite conçue, la loi communicable, le nom, le nombre. C'est pourquoi chaque conjuration de la divinité repose sur la connaissance de son vrai nom, sur l'exercice de rites et de sacrements, connus seulement du savant et placés à sa disposition, dans la forme exacte prescrite et par l'emploi de mots exacts.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 245.
«Le premier et peut-être l'unique résultat du vouloir-comprendre humain, c'est la foi. «Je crois» est la grande parole contre l'angoisse métaphysique et en même temps une confession d'amour.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 245.
«Le suprême bien spirituel que connaisse l'homme, en tant qu'être de pensée conduite par le langage, est donc la foi solide, enfin acquise par lui, en ce quelque chose qu'il a arraché au temps et au destin, qu'il a abstrait par contemplation et désigné par un nom et un nombre. Mais la nature dernière de ce quelque chose reste obscure quand même.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 245.
«Il faut ajouter que la théorie religieuse — la vision du croyant — aboutit à une pratique sacerdotale, mais que, inversement, la théorie scientifique se sépare par elle de la pratique, du savoir technique de la vie quotidienne.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 246.
«Plus le savoir théorique se libère de la foi du croyant, plus il tend à s'éliminer. Ce qui subsiste alors est purement et simplement l'expérience technique.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 246.
«La foi obscure originelle reconnaît des sources supérieures de vérité, par lesquelles des choses que notre spéculation ne résoudrait jamais deviennent manifestes et pour ainsi dire ouvertes à tous: paroles prophétiques, rêves, oracles, écritures saintes, voix de la divinité. L'esprit critique, au contraire, veut et se croit capable de ne devoir à lui-même toutes les connaissances. Il ne se méfie pas seulement des vérités étrangères, il en nie même la possibilité. La vérité n'est pour lui que le savoir qu'il a démontré.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 246.
«La foi en une science inconditionnée ne caractérise que l'énorme naïveté des périodes rationalistes. Une théorie scientifique n'est rien d'autre qu'un dogme qui l'a historiquement précédée sous une autre forme. La vie seule en tire avantage, sous la forme d'une technique à laquelle la théorie donne la clé du succès.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 246-247.
«... le mystère de l'être éveillé est double: l'œil intérieur y distingue deux images d'ordre causal, filles de l'angoisse: le monde «extérieur», et, pour pendant, le monde «intérieur». Chacun d'eux a ses problèmes véritables; l'être éveillé agit absolument dans son propre domaine. Le numen s'appelle d'un côté Dieu, de l'autre l'âme. L'intelligence critique transforme en grandeurs mécaniques, par rapport à leur monde, les divinités de l'intuition religieuse, sans cependant en modifier l'essence: matière et forme, lumière et ténèbres, force et masse; et elle analyse l'image mentale de la foi originelle de l'âme, de la même manière et avec le même résultat prédéterminé. La physique du dedans psychologie systématique et elle découvre dans l'homme: comme science antique, des parties de l'âme d'espèce concrète (nous, thumos, epithumia); comme science magique des substances psychiques (ruach, nephesch); comme science faustienne des forces psychiques (pensée, sentiment, volonté). Ce sont ces images que la réflexion religieuse étudie, par la crainte et l'amour, dans leurs relations causales de péché, expiation, grâce, conscience, récompense et châtiment.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 247.
«Le mystère de l'être aboutit à une erreur fatale dès que la foi et la science se tournent vers lui. Au lieu d'atteindre le cosmique même, qui est coplètement en dehors des possibilités d el'être éveillé agissant, on analyse par les sens, l'émotion du corps dans l'image du monde visuel, par la logique, l'image qui en est abstraire comme complexe mécanique causal. Mais la vie réelle se laisse diriger, non connaître. Seul l'intemporel est vrai.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 247.
«L'espace nie le temps: la vraie morale est absolue, éternelle, achevée et toujours la même. Elle a toujours au fond quelque chose qui nie la vie, une abstention, une renonciation, un désintéressement allant jusqu'à l'extase, jusqu'à la mort.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 248.
«... le suprême sacrifice que peut faire l'homme spirituel est-il de sacrifier ce monde même aux puissances de la nature. Un fragment de ce sacrifice est chaque action morale.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 249.
«Pour chaque homme et le laps de temps de son existence, il n'y a d'éternelle et de vraie qu'une religion: celle que les destin lui a destinée par le lieu et le temps de sa naissance.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 251.
«On ne peut aimer que ce dont on croit l'existence durable. L'amour suppose l'idée d'un ordre cosmique ayant gagné de la fermeté.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 252.
«Les religions primitives ont quelque chose d'apatriotique comme les nuages et les vents. Les âmes des masses des peuples primitifs se sont condensées, par hasard et rapidement, en un être; et fortuit reste aussi le lieu des combinaisons de l'être éveillé issues de l'angoisse et de la défense qui les couvrent. Leur caractère sédentaire ou migratoire, instable ou non, n'a rien à faire avec leur signification plus profonde.» — O. SPENGLER. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 255.
«Le commencement ressemble chaque fois à un cri subit. Le bruit sourd de la crainte et de la défense se transforme tout à coup en un pur et fervent réveil qui, partant de la terre maternelle, florissant absolument comme la plante, embrasse et conçoit d'un coup d'œil la profondeur du monde lumineux. Partout où vit en général un sens de la réflexion sur soi, on a vu et salué dans cette transformation une renaissance intérieure. À ce même moment, jamais plus tôt et jamais répété avec la même puissance et la même profondeur, on dirait un grand éclair qui traverse tous les esprits élus de ce temps, qui fait absoudre toute crainte dans un amour joyeux et qui fait apparaître subitement l'invisible dans une transfiguration métaphysique. § Chaque culture réalise ici son symbole primaire. Chacune a son espèce d'amour, que l'on appelle céleste ou métaphysique, avec lequel elle contemple, embrasse et s'assimile sa divinité, et qui reste pour tous les autres inaccessible ou incompréhensible. [...] — l'élan en profondeur de l'âme est toujours soumis au symbole primaire de cette seule culture et d'aucune autre.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 255.
«Cette première4 intériorité prend toujours naissance dans le paysage non urbain, dans les villages, les huttes, les sanctuaires, les couvents isolés et les ermitages; c'est là que se forme la grande communauté de l'être éveillé, des élus spirituels, qui sépare intérieurement du grand courant de l'être, des héros et des chevaliers, un monde tout entier. Les deux ordres primitifs, clergé et noblesse, la vision dans les cathédrales et l'action qui sort du château, l'ascèse et l'amour, l'extase et la distinction, commencent d'ici leur histoire proprement dit.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 256.
«La grande religion ancienne était aussi propriété d'un ordre, et elle n'était ni accessible, ni intelligible à la masse; la mystique du premier gothique aussi se restreint à un petit cercle d'élus, elle est scellée par le latin et la lourdeur de ses concepts et de ses images, et l'existence n'est est connue en général avec clarté ni des paysans ni des nobles.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 258-259.
«Réforme signifie dans toutes les cultures: Retour de la religion à la pureté de son idée originelle, telle qu'elle s'était manifestée dans les grands siècles du début.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 271.
«Rationalisme signifie la foi exclusive dans les résultats de l'entendement critique, par conséquent de l'«intelligence». Le fait qu'une époque printanière a prononcé le credo qui absurdum repose sur la certitude, que c'est d'abord la réunion de l'intelligible et de l'inintelligible qui constitue le monde naturel, cette nature peinte par Giotto, celle où s'enfonçaient les mystiques, celle où l'intelligence ne peut pénétrer qu'aussi profondément que la divinité le permet. Maintenant, un calme dépit donne naissance au concept de l'irrationnel, de ce qui a perdu sa valeur pour son inintelligibilité même. On peut le mépriser ouvertement, comme superstition, ou en secret comme métaphysique, seule l'intellection assurée par la critique possède une valeur. Et les mystères ne sont rien d'autre que des preuves de l'ignorance. La religion nouvelle amystérieuse s'appelle, dans ses suprêmes possibilités, la sagesse, sophia; son prêtre est le philosophe et son fidèle l'homme instruit..» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 280.
«Culture est toujours synonyme de force plastique religieuse. chaque grande culture commence par un thème grandiose qui naît du paysage non urbain, qui se développe en multiples accents dans les villes cosmopolites en une finale matérialiste. Mais même les derniers accents maintiennent strictement la tonalité de l'ensemble.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 283.
«C'est toujours la supériorité de l'esprit de la ville mondiale, définitivement achevée avec l'irrationnel, qui regarde de haut, avec mépris, cet être éveillé connaissant et admettant encore des mystères.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 284.
«... le grand mythe intellectuel, de l'énergie et de la masse, est en outre une hypothèse de travail inouïe. La marque qu'il imprime à la nature est celle de la possibilité de son application.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 284.
«Le matérialisme serait incomplet si on ne sentait le besoin de se libérer constamment de la tension spirituelle, de se laisser aller à la sentimentalité mystique, d'exercer un culte quelconque pour se décharger intérieurement, pour jouir du charme de l'irrationnel, du non-moi, de la bizarrerie et, s'il le faut, de l'âmerie.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 284.
«Toute philosophie des lumières part d'un optimisme intellectuel sans borne, qui est toujours lié au type du grand citadin, et elle aboutit au scepticisme absolu.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 286.
«L'homme d'une culture étrangère peut être spectateur, et donc historien descriptif du passé, mais jamais politicien, c'est-à-dire un homme qui sent l'avenir agir en lui. S'il n'a pas la puissance matérielle pour agir, dans la forme de sa propre culture, et pouvoir mépriser la forme étrangère ou la diriger, [...], il est désarmé en face des événements..» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 294.
«L'homme vraiment intérieur n'affirme-t-il pas, au fond, même là où il détruit ? Et l'étranger à cet intérieur ne nie-t-il pas, même là où il voudrait construire ? Ce que la culture d'Occident a détruit, dans ses domaines coloniaux, par des réformes de son propre style, est inépuisable par la pensée, [...]. Le sentiment de la nécessité de cette mésentente réciproque aboutit à la haine effrayante, profondément concentrée dans le sang, qui s'attache à des marques symboliques comme la race, le genre de vie, la profession, le langage, et qui, toutes les fois que cette situation s'est présentée jusqu'à ce jour, a rongé, ravagé et conduit les deux parties jusqu'à des explosions sanglantes.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 295.
VEUILLEZ NOTER: En faisant la publicité de ces pensées, le rédacteur de ce site n'endosse en aucune façon la signification de leur contenu. Si elles sont présentées ici, c'est qu'elles nous semblent offrir une matière importante à réflexion, par la pertinence de leur thématique ainsi que par la clarté de leur énonciation et des implications qui peuvent en découler. Par ailleurs, nous encourageons ceux qui y seront exposés à l'esprit de critique et de discernement le plus développé, afin d'en retirer non seulement la «substantifique moëlle», selon l'expression de Rabelais, mais encore la vérité la plus haute qu'elles pourraient celer, en relevant le défi de retrouver la vérité suprême, là où elle veut bien se révéler, y compris dans son expérience de vie immédiate, à l'esprit qui la recherche avec engagement, conviction et passion.
[PROBLÈMES DE LA CULTURE ARABE]
«Qu'est-ce que le tourment d'une âme peut avoir avec le communisme ? Une religion parvenue aux problèmes sociaux a déjà cessé d'être une religion.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 179-180.
«De cultes antiques, on peut exercer le nombre qu'on veut; de ceux-ci, on ne peut appartenir qu'à un seul. Là la mission est inimaginable, ici elle est évidente, et le sens des exercices religieux passe clairement du côté doctrinal.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 185.
«On a beaucoup parlé de la tolérance antique. Peut-être est-ce aux limites de sa tolérance qu'on reconnaît le plus clairement la nature d'une religion; et de telles limites existaient aussi pour les anciens cultes de la cité. Que ces cultes aient existé et fussent pratiqués en grand nombre, c'est leur signification proprement dite et qui n'avait donc besoin d'aucune tolérance en général. Mais on supposait que chacun d'eux avait du respect pour la forme cultuelle de l'autre. Quiconque n'observait pas ce respect par la parole et par l'acte, comme beaucoup de philosophes et aussi de partisans de religions étrangères, apprit à connaître la mesure de cette tolérance antique. Les persécutions mutuelles des églises magiques supposent quelque chose de tout à fait différent; là c'est le devoir hénothéiste de la vraie foi qui interdit de reconnaître la fausse.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 186.
«Le judaïsme s'est accru, comme le parsisme, depuis la période de l'exil, et il a augmenté à l'infini ses minuscules associations tribales par la conversion et les changements de confession. C'est la seule forme de conquête dont dispose une nation sans territoire, et qui est donc naturelle et évidente pour les religions magiques.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 192.
«Le christianisme est la seule religion de l'histoire universelle, où un destin humain du présent immédiat a été transformé en symbole et en point central de toute la création.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 195.
«... quand Jésus fut conduit devant Pilate, c'est le monde des faits et celui des vérités qui s'affrontèrent sans intermédiaire ni conciliation, avec une clarté terrifiante et un poids symbolique sans exemple dans la scène de toute histoire universelle. La scission qui est à la base de tout être vivant et libre depuis ses origines, par le fait même qu'il existe, qu'il est être et être éveillé, a pris ici la forme de tragédie humaine, la plus haute qu'il soit en général possible d'imaginer. La célèbre question du procurateur romain: Qu'est-ce que la Vérité? — la seule parole du Nouveau Testament qui ait de la race — renferme toute la signification de l'histoire, validité exclusive du fait, rang de l'état social de la guerre, du sang, toute-puissance du succès, et orgueil d'une grande fortune. A quoi le sentiment muet, et non la bouche de Jésus, a répondu par cette autre question décisive de toute religion: Qu'est-ce que la réalité ? Pour Pilate, cette réalité était tout; pour lui rien. Impossible à la religiosité authentique de répondre différemment à l'histoire et à ses puissance, elle ne peut pas juger autrement la vie active et, si elle le fait quand même, elle cesse d'être religion et tombe elle-même au pouvoir de l'esprit historique.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 199.
«Le politicien-né méprise, au milieu de son domaine des faits, les considérations ascétiques de l'idéologue et du moraliste — il a raison. Pour le croyant, toute l'ambition et tous les succès du monde historique sont des péchés et sans valeur éternelle — lui aussi a raison. Un souverain voulant corriger la religion, en l'orientant vers des buts politiques pratiques, est un fou. Un moraliste prêchant la vérité, la justice, la paix, la réconciliation dans le monde réel, est également un fou. Aucune religion n'a jamais changé le monde, et aucun fait n'a jamais pu réfuter la religion. Il n'existe aucun pont entre le temps dirigé et l'éternité atemporelle, entre la marche de l'histoire et l'existence d'un ordre cosmique divin, dans la structure duquel la «soumission» est le mot qui traduit le cas extrême de la causalité. Telle est la signification dernière de ce moment qui a vu s'affronter Pilate et Jésus. Dans l'un, le monde historique, le Romain a fait crucifier le Galiléen — c'était son destin. Dans l'autre, Rome tomba dans la damnation, et la croix devint la garantie du rachat. C'était la «Volonté de Dieu».» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 199-200.
«Religion est métaphysique, rien d'autre: CREDO QUIA ABSURDUM. Et la métaphysique expliquée, démontrée ou prétendue démontrée est simple philosophie ou érudition. Je parle ici de la métaphysique vécue. Impensable identifié à la certitude, surnaturel identifié à l'événement. Vie dans un monde irréel mais vrai. [...]. Voir dans l'éthique le but de la religion, c'est la méconnaître.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 200.
«La religion est de part en part métaphysique, ultériorité, être éveillé au sein d'un univers où le témoignage des sens ne découvre que le plan antérieur; la religion, c'est la vie dans et avec le supra-sensible, et là où manque la force de cet être éveillé, la force même d'y croire, là aussi la religion est à sa fin.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 200.
«L'homme possède une âme, mais à l'esprit de la lumière et du bien il ne fait que participer; le divin descend en lui d'en haut, il unit ainsi tous les particuliers d'ici-bas avec l'Unique d'en haut. Ce sentiment élémentaire, qui domine la foi et l'opinion entières de tous les hommes magiques, est quelque chose de tout à fait unique qui distingue de toutes les autres non seulement leur conception du monde, mais aussi toute espèce de religiosité magique dans son essence la plus intime.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 215.
«L'idée du Logos au sens très large est, dans le plan de la pensée magique, le pendant exact de l'impression magique de la lumière dans la crypte d'où il est tiré. Elle signifie que l'esprit de la divinité, sa «parole» comme représentante de la lumière et messagère du bien, se détache de cette divinité inaccessible et entre en relation avec l'être humain pour l'élever, le remplir, le sauver.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 216.
«Les apocalypses ne sont qu'une vision spectrale, élevée à une violence tragique extrême.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 217.
«Une révélation magique est un phénomène mystique où le verbe éternel et incréé de la divinité — où la Divinité comme Verbe — entre dans l'homme afin de recevoir par lui la forme «révélée» visible des sons, et surtout des lettres.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 224.
«La lutte de l'être et de l'être éveillé, donc de la politique et de la religion, de l'histoire et de la nature, ne peut en effet disparaître tout entière par la forme de l'église magique et son identification de l'État avec la nation; la race perce effectivement dans la vie de ces créations spirituelles et elle triomphe du divin, précisément parce qu'il a admis le mondain.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 233-234.
«Nous appelons religion l'être éveillé d'un vivant au moment où il domine l'être, le gouverne, le nie ou même le détruit.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 241.
«La haine est à la peu ce que le temps est à l'espace, le sang à l'œil, le tact à la tension, l'héroïsme à la sainteté. Mais c'est aussi cette différence qui existe entre l'amour au sens racial et l'amour au sens religieux.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 241.
«Toute religion est apparentée à la lumière. L'étendue est perçue aussi religieusement, comme monde virtuel, en partant du moi comme foyer de lumière. L'ouïe et le toucher s'intègrent à la vue et l'invisible dont on sent les effets sensibles devient la quintessence du démonique. Tout ce que nous désignons par les mots de divinité, de révélation, de rédemption, de soumission, est en quelque sorte un élément de la réalité éclairée. La mort est quelque chose qu'il voit et qu'il connaît en voyant, et la naissance est en vue de la mort le second mystère: toutes deux limitent pour l'œil le cosmos senti comme vie d'un corps dans l'espace lumineux .» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 241-242.
«Il existe une crainte profonde, qui est connue aussi des animaux, devant la liberté du microcosme devant l'espace, devant l'espace même et ses puissances, devant la mort; et une autre crainte pour le courant cosmique de l'être, pour la vie, pour le temps dirigé. La première fait obscurément pressentir que la liberté dans l'étendue est une nouvelle espèce de dépendance, plus profonde que celle de la plante. Elle fait chercher à l'individu qui sent sa faiblesse la proximité et la liaison avec les autres. L'angoisse mène à parler, et c'est une espèce de langage qu'est chaque religion. De l'angoisse devant l'espace naissent les numina du monde naturel et les cultes des dieux. De l'angoisse pour le temps naissent les numina de la vie, de la race, de l'État, convergeant dans le culte des ancêtres. C'est la différence entre le tabou et le totem, car le totémique aussi apparaît toujours sous forme religieuse et provient d'une crainte sacrée de ce qui est soustrait, même à l'intellection, et qui reste éternellement étranger..» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 242.
«L'opinion selon laquelle le monde entier, considéré comme nature en relation avec un être éveillé, obéit à une chaîne causale unique, est tout à fait impossible à appliquer par notre pensée qui ne pense toujours que des complexes particuliers. Elle reste une foi, elle est même la foi tout court, car sur elle repose l'intellection cosmique religieuse qui admet, avec une nécessité logique, partout où elle remarque quelque chose, des numina considérés comme passager, pour les événements fortuits auxquels elle ne pensera plus jamais comme durables, pour ceux qui résident, par exemple, dans les sources, les arbres, les pierres, les collines, les étoiles, donc en des lieux déterminés, ou pour ceux qui peuvent être partout présents, telles les divinités du ciel, de la guerre, de la sagesse. Ces numina ne sont limités que dans le cadre de chaque acte de pensée particulier.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 243.
«... l'expérience, entendue dans ce sens anorganique meurtrier et immobilisant, entièrement différente de l'expérience vivante et de la connaissance des hommes, a lieu de deux manières: comme théorie ou comme technique, religieusement parlant, comme mythe ou comme culte, suivant que le croyant veut ouvrir ou forcer les secrets de son ambiance. Tous deux requièrent un haut développement de l'intelligence humaine. Tous deux peuvent naître de la peur ou de l'amour. Il y a un mythe de la peur, comme le mythe mosaïque et les mythes primitifs en général, et un mythe de l'amour, comme celui du christianisme primitif et de la mystique gothique, comme il y a une technique de l'incantation défensive et une technique de l'incantation suppliante. C'est là sans doute aussi la différence profonde entre le sacrifice et la prière: ainsi se distingue l'humanité primitive de l'humanité supérieure. La religiosité est un trait de l'âme, mais la religion est un talent.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 244.
«... l'instrument où se concentre la force spirituelle tout entière est la forme du réel abstraite de la vision par le langage et dont la quintessence n'est pas ouverte à chaque être éveillé: la limite conçue, la loi communicable, le nom, le nombre. C'est pourquoi chaque conjuration de la divinité repose sur la connaissance de son vrai nom, sur l'exercice de rites et de sacrements, connus seulement du savant et placés à sa disposition, dans la forme exacte prescrite et par l'emploi de mots exacts.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 245.
«Le premier et peut-être l'unique résultat du vouloir-comprendre humain, c'est la foi. «Je crois» est la grande parole contre l'angoisse métaphysique et en même temps une confession d'amour.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 245.
«Le suprême bien spirituel que connaisse l'homme, en tant qu'être de pensée conduite par le langage, est donc la foi solide, enfin acquise par lui, en ce quelque chose qu'il a arraché au temps et au destin, qu'il a abstrait par contemplation et désigné par un nom et un nombre. Mais la nature dernière de ce quelque chose reste obscure quand même.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 245.
«Il faut ajouter que la théorie religieuse — la vision du croyant — aboutit à une pratique sacerdotale, mais que, inversement, la théorie scientifique se sépare par elle de la pratique, du savoir technique de la vie quotidienne.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 246.
«Plus le savoir théorique se libère de la foi du croyant, plus il tend à s'éliminer. Ce qui subsiste alors est purement et simplement l'expérience technique.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 246.
«La foi obscure originelle reconnaît des sources supérieures de vérité, par lesquelles des choses que notre spéculation ne résoudrait jamais deviennent manifestes et pour ainsi dire ouvertes à tous: paroles prophétiques, rêves, oracles, écritures saintes, voix de la divinité. L'esprit critique, au contraire, veut et se croit capable de ne devoir à lui-même toutes les connaissances. Il ne se méfie pas seulement des vérités étrangères, il en nie même la possibilité. La vérité n'est pour lui que le savoir qu'il a démontré.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 246.
«La foi en une science inconditionnée ne caractérise que l'énorme naïveté des périodes rationalistes. Une théorie scientifique n'est rien d'autre qu'un dogme qui l'a historiquement précédée sous une autre forme. La vie seule en tire avantage, sous la forme d'une technique à laquelle la théorie donne la clé du succès.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 246-247.
«... le mystère de l'être éveillé est double: l'œil intérieur y distingue deux images d'ordre causal, filles de l'angoisse: le monde «extérieur», et, pour pendant, le monde «intérieur». Chacun d'eux a ses problèmes véritables; l'être éveillé agit absolument dans son propre domaine. Le numen s'appelle d'un côté Dieu, de l'autre l'âme. L'intelligence critique transforme en grandeurs mécaniques, par rapport à leur monde, les divinités de l'intuition religieuse, sans cependant en modifier l'essence: matière et forme, lumière et ténèbres, force et masse; et elle analyse l'image mentale de la foi originelle de l'âme, de la même manière et avec le même résultat prédéterminé. La physique du dedans psychologie systématique et elle découvre dans l'homme: comme science antique, des parties de l'âme d'espèce concrète (nous, thumos, epithumia); comme science magique des substances psychiques (ruach, nephesch); comme science faustienne des forces psychiques (pensée, sentiment, volonté). Ce sont ces images que la réflexion religieuse étudie, par la crainte et l'amour, dans leurs relations causales de péché, expiation, grâce, conscience, récompense et châtiment.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 247.
«Le mystère de l'être aboutit à une erreur fatale dès que la foi et la science se tournent vers lui. Au lieu d'atteindre le cosmique même, qui est coplètement en dehors des possibilités d el'être éveillé agissant, on analyse par les sens, l'émotion du corps dans l'image du monde visuel, par la logique, l'image qui en est abstraire comme complexe mécanique causal. Mais la vie réelle se laisse diriger, non connaître. Seul l'intemporel est vrai.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 247.
«L'espace nie le temps: la vraie morale est absolue, éternelle, achevée et toujours la même. Elle a toujours au fond quelque chose qui nie la vie, une abstention, une renonciation, un désintéressement allant jusqu'à l'extase, jusqu'à la mort.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 248.
«... le suprême sacrifice que peut faire l'homme spirituel est-il de sacrifier ce monde même aux puissances de la nature. Un fragment de ce sacrifice est chaque action morale.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 249.
«Pour chaque homme et le laps de temps de son existence, il n'y a d'éternelle et de vraie qu'une religion: celle que les destin lui a destinée par le lieu et le temps de sa naissance.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 251.
«On ne peut aimer que ce dont on croit l'existence durable. L'amour suppose l'idée d'un ordre cosmique ayant gagné de la fermeté.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 252.
«Les religions primitives ont quelque chose d'apatriotique comme les nuages et les vents. Les âmes des masses des peuples primitifs se sont condensées, par hasard et rapidement, en un être; et fortuit reste aussi le lieu des combinaisons de l'être éveillé issues de l'angoisse et de la défense qui les couvrent. Leur caractère sédentaire ou migratoire, instable ou non, n'a rien à faire avec leur signification plus profonde.» — O. SPENGLER. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 255.
«Le commencement ressemble chaque fois à un cri subit. Le bruit sourd de la crainte et de la défense se transforme tout à coup en un pur et fervent réveil qui, partant de la terre maternelle, florissant absolument comme la plante, embrasse et conçoit d'un coup d'œil la profondeur du monde lumineux. Partout où vit en général un sens de la réflexion sur soi, on a vu et salué dans cette transformation une renaissance intérieure. À ce même moment, jamais plus tôt et jamais répété avec la même puissance et la même profondeur, on dirait un grand éclair qui traverse tous les esprits élus de ce temps, qui fait absoudre toute crainte dans un amour joyeux et qui fait apparaître subitement l'invisible dans une transfiguration métaphysique. § Chaque culture réalise ici son symbole primaire. Chacune a son espèce d'amour, que l'on appelle céleste ou métaphysique, avec lequel elle contemple, embrasse et s'assimile sa divinité, et qui reste pour tous les autres inaccessible ou incompréhensible. [...] — l'élan en profondeur de l'âme est toujours soumis au symbole primaire de cette seule culture et d'aucune autre.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 255.
«Cette première4 intériorité prend toujours naissance dans le paysage non urbain, dans les villages, les huttes, les sanctuaires, les couvents isolés et les ermitages; c'est là que se forme la grande communauté de l'être éveillé, des élus spirituels, qui sépare intérieurement du grand courant de l'être, des héros et des chevaliers, un monde tout entier. Les deux ordres primitifs, clergé et noblesse, la vision dans les cathédrales et l'action qui sort du château, l'ascèse et l'amour, l'extase et la distinction, commencent d'ici leur histoire proprement dit.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 256.
«La grande religion ancienne était aussi propriété d'un ordre, et elle n'était ni accessible, ni intelligible à la masse; la mystique du premier gothique aussi se restreint à un petit cercle d'élus, elle est scellée par le latin et la lourdeur de ses concepts et de ses images, et l'existence n'est est connue en général avec clarté ni des paysans ni des nobles.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 258-259.
«Réforme signifie dans toutes les cultures: Retour de la religion à la pureté de son idée originelle, telle qu'elle s'était manifestée dans les grands siècles du début.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 271.
«Rationalisme signifie la foi exclusive dans les résultats de l'entendement critique, par conséquent de l'«intelligence». Le fait qu'une époque printanière a prononcé le credo qui absurdum repose sur la certitude, que c'est d'abord la réunion de l'intelligible et de l'inintelligible qui constitue le monde naturel, cette nature peinte par Giotto, celle où s'enfonçaient les mystiques, celle où l'intelligence ne peut pénétrer qu'aussi profondément que la divinité le permet. Maintenant, un calme dépit donne naissance au concept de l'irrationnel, de ce qui a perdu sa valeur pour son inintelligibilité même. On peut le mépriser ouvertement, comme superstition, ou en secret comme métaphysique, seule l'intellection assurée par la critique possède une valeur. Et les mystères ne sont rien d'autre que des preuves de l'ignorance. La religion nouvelle amystérieuse s'appelle, dans ses suprêmes possibilités, la sagesse, sophia; son prêtre est le philosophe et son fidèle l'homme instruit..» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 280.
«Culture est toujours synonyme de force plastique religieuse. chaque grande culture commence par un thème grandiose qui naît du paysage non urbain, qui se développe en multiples accents dans les villes cosmopolites en une finale matérialiste. Mais même les derniers accents maintiennent strictement la tonalité de l'ensemble.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 283.
«C'est toujours la supériorité de l'esprit de la ville mondiale, définitivement achevée avec l'irrationnel, qui regarde de haut, avec mépris, cet être éveillé connaissant et admettant encore des mystères.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 284.
«... le grand mythe intellectuel, de l'énergie et de la masse, est en outre une hypothèse de travail inouïe. La marque qu'il imprime à la nature est celle de la possibilité de son application.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 284.
«Le matérialisme serait incomplet si on ne sentait le besoin de se libérer constamment de la tension spirituelle, de se laisser aller à la sentimentalité mystique, d'exercer un culte quelconque pour se décharger intérieurement, pour jouir du charme de l'irrationnel, du non-moi, de la bizarrerie et, s'il le faut, de l'âmerie.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 284.
«Toute philosophie des lumières part d'un optimisme intellectuel sans borne, qui est toujours lié au type du grand citadin, et elle aboutit au scepticisme absolu.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 286.
«L'homme d'une culture étrangère peut être spectateur, et donc historien descriptif du passé, mais jamais politicien, c'est-à-dire un homme qui sent l'avenir agir en lui. S'il n'a pas la puissance matérielle pour agir, dans la forme de sa propre culture, et pouvoir mépriser la forme étrangère ou la diriger, [...], il est désarmé en face des événements..» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 294.
«L'homme vraiment intérieur n'affirme-t-il pas, au fond, même là où il détruit ? Et l'étranger à cet intérieur ne nie-t-il pas, même là où il voudrait construire ? Ce que la culture d'Occident a détruit, dans ses domaines coloniaux, par des réformes de son propre style, est inépuisable par la pensée, [...]. Le sentiment de la nécessité de cette mésentente réciproque aboutit à la haine effrayante, profondément concentrée dans le sang, qui s'attache à des marques symboliques comme la race, le genre de vie, la profession, le langage, et qui, toutes les fois que cette situation s'est présentée jusqu'à ce jour, a rongé, ravagé et conduit les deux parties jusqu'à des explosions sanglantes.» — O. SPENGLER. Chapitre III. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 295.
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