mardi 12 octobre 2010

Oswald Spengler — Le déclin de l'Occident II (Chapitre I)

[Avec mises à jour périodiques. — With periodical updates.]

VEUILLEZ NOTER: En faisant la publicité de ces pensées, le rédacteur de ce site n'endosse en aucune façon la signification de leur contenu. Si elles sont présentées ici, c'est qu'elles nous semblent offrir une matière importante à réflexion, par la pertinence de leur thématique ainsi que par la clarté de leur énonciation et des implications qui peuvent en découler. Par ailleurs, nous encourageons ceux qui y seront exposés à l'esprit de critique et de discernement le plus développé, afin d'en retirer non seulement la «substantifique moëlle», selon l'expression de Rabelais, mais encore la vérité la plus haute qu'elles pourraient celer, en relevant le défi de retrouver la vérité suprême, là où elle veut bien se révéler, y compris dans son expérience de vie immédiate, à l'esprit qui la recherche avec engagement, conviction et passion.

[ORIGINE ET PAYSAGE]

«Liberté et enchaînement: tel est le caractère fondamental, le dernier et le plus profond, de toute distinction entre l'être du végétal et l'être de l'animal. Mais le végétal seul est tout entier ce qu'il est. Dans la nature de l'animal, il y a un dualisme. Une plante n'est qu'une plante, un animal est plante et quelque chose en sus. Ce troupeau qui se sert en tremblant devant le danger, cet enfant qui étreint sa mère en pleurant, ce croyant désespéré qui voudrait s'enfoncer dans le sein de son dieu: tous veulent retourner de l'être libre à l'être enchaîné, végétal, d'où ils sont sortis aux fins d'individuation.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 011-12. 


«Tout cosmos porte la marque de la périodicité: il a un tact. Tout microcosme porte, au contraire, la marque de polarité qui s'exprime essentiellement dans le mot 'contre'; il y a une tension.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 012.

« ... tous les états conscients en général sont essentiellement des tensions: sens et objets, moi et toi, cause et effet, chose et attribut, tous sont tendus et étendus, et partout où se manifeste ce qu'on nomme, avec une savante ostentation, de la détente, on notera aussitôt, chez le microcosme vivant, une certaine lassitude et finalement le sommeil. Un homme qui sommeille, libéré de toute tension, n'est plus désormais qu'un être végétatif.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 012.  

« ... le tact cosmique est tout ce qui peut se paraphraser dans les termes de direction, temps, rythme, destin, nostalgie, depuis les piaffements d'un attelage de chevaux pur sang et la marche cadencée d'une armée triomphante, jusqu'à l'intelligence réciproque et muette de deux amants, à la finesse sentie dans une société de gens distingués, où à l'œil expert du psychologue ...» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 012. 

«La perception d'un tact cosmique s'appelle sentiment, celle de tensions microcosmiques sensation.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 013.

«Nous possédons pour l'être cosmique deux organes de circulation: l'appareil sanguin et l'organe sexuel; pour la mobilité microcosmique deux organes de distinction: les sens et les nerfs. Il faut admettre qu'à l'origine, le corps entier était à la fois organe de circulation et organe du toucher.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 013. 

« ... tous les sens, si éduqués soient-ils, si éloignés de leur origine, sont proprement des sens locatifs, il n'en existe point d'autre. Toute espèce de sensation distingue entre ce qui est soi et ce qui est étranger.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 014.

«Religion, art, science sont nés pour la lumière, et toutes leur différences se réduisent à savoir si ces activités s'adressent à l'œil charnel ou à 'l'œil de l'esprit'.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 015.  

 «Ainsi apparaît dans toute sa clarté une antithèse qu'on a coutume d'obscurcir par le thème ambigu de conscience: je veux dire l'être tout court et l'être éveillé. L'être a du tact, une direction, l'être éveillé est tension et étendue. Dans l'être règne un destin, l'être éveillé distingue la cause et l'effet. Quand le premier interroge, il demande: Quand ? Pourquoi ? Le second pose les questions: Où ? Comment ?» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 015.

«Vivre en profondeur, c'est s'infiltrer violemment d'un centre lumineux dans les lointains visibles que nous appelons moi. 'Moi' est un concept d'optique. La vie du moi sera désormais la vie sous le soleil, tandis que la vie est apparentée à la mort. D'où un nouveau sentiment d'angoisse qui englobe tous les autres: la phobie de l'invisible, qu'on entend, qu'on sent, qu'on devine ou qu'on voit dans ses effets sans l'apercevoir lui-même.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 016.

« ... la phobie de l'invisible est la marque spécifique de toute religiosité chez l'homme. Les divinités sont des réalités lumineuses pressenties, représentées, contemplées. 'Dieu invisible' est le dernier mot de la transcendance humaine. L'au-delà est situé à la frontière du monde lumineux; la Rédemption libère l'homme de la magie de la lumière et de ses effets réels.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 016. 

«L'intelligence tirée de la sensation s'appelle pensée. La pensée a introduit à jamais un schisme dans l'être éveillé humain. Dès le début, elle a estimé l'entendement et la sensibilité comme deux forces spirituelles: supérieure et inférieure. Elle a créé l'opposition fatale entre le monde visuel lumineux, dénommé monde apparent et illusion d'optique, et un monde littéralement représentatif, où vivotent des concepts impossibles à dépouiller de leur léger accent optique. Celui-là est désormais pour l'homme, aussi longtemps qu'il 'pense', le monde vrai, le monde en soi.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 018.  

« ... le règne absolu de l'œil fait apparaître la vie comme vie d'un organisme visible dans la lumière, et l'intelligence enchaînée au langage crée aussitôt un concept de pensée et, par antinomie, un concept de vie, puis distingue finalement entre la vie telle qu'elle est et la vie telle qu'elle doit être. La vie insouciante cède la place à l'antithèse de la «pensée et de l'action», qui est non seulement possible, ce qu'elle n'est point chez l'animal, mais qui bientôt devient, chez chaque homme, d'abord réalité, finalement dilemme. Ce dilemme a donné sa forme à l'histoire entière de l'humanité mûre et à toutes ses manifestations historiques; et plus une culture prend de formes supérieures, plus forte est l'antithèse qui, précisément, régit les moments essentiels de son être éveillé.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 019.


« Le cosmos végétal, l'être de destin, le sang, la race possèdent l'autorité ancienne et la conservent. Ils sont la vie. L'autre n'est qu'un valet de la vie. Mais ce valet ne veut pas servir. Il veut et croit régner; c'est un des droit les plus indiscutés de l'esprit humain que de tenir le corps, la 'nature' en puissance; mais la question est de savoir si cette croyance elle-même ne sert pas à la vie.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 019.

«Le but de la pensée se nomme vérité. Les vérités sont constatées, c'est-à-dire abstraites, sous forme de concepts, de cet incoercible vivant qu'est le monde lumineux, afin de recevoir dans un système, dans une sorte d'espace spirituel, un emplacement durable. Les vérités sont absolues et éternelles, c'est dire qu'elles n'ont plus rien à faire avec la vie.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 019-020.  

« ... pour un animal, il n'y a que des faits, pas de vérités. C'est ce qui sépare l'intelligence théorique de l'intelligence pratique. Faits et vérités se distinguent comme le temps de l'espace ou le destin de la causalité. Un fait existe pour l'être éveillé tout entier, qui est au service de l'être, non pour un seul aspect de cet être éveillé, prétendu dépouillé de l'être. La vie réelle, l'histoire ne connaît que des faits. L'expérience de la vie et la connaissance des hommes ne visent que des faits. L'homme d'action, le héros, le volontariste, le combattant, celui qui lutte pour triompher de la force des faits et se la subordonne ou mourir, considère avec dédain les simples vérités comme des choses insignifiantes. Pour l'homme d'État authentique, il n'y a que des faits politiques, pas de vérités politiques.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 020.  

«Volonté de système est volonté de tuer le vivant. Il est ainsi constaté, congelé, enchaîné aux biens de la logique. L'esprit a vaincu quand il a mené jusqu'au bout cette tâche de cristallisation.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 020.  

«La raison enfante des idées, l'entendement découvre des vérités. Les vérités n'ont pas de vie et se transmettent par division, les idées appartiennent à la vie même de leur auteur et ne se transmettent que par sympathie. La nature de l'entendement est la critique, celle de la raison la création. La raison produit le nécessaire, l'entendement le suppose.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 020-021. 

«Toute science naît et grandit au contact d,une religion et sous les conditions générales de cette religion, et elle n'a pas d'autre signification que de corriger abstraitement celle-ci, considérée comme une doctrine fausse et moins abstraite. Chaque science continue à porter en elle, avec tout son bagage de principes, de théorèmes et de méthodes, l'essence d'une religion. Chaque vérité nouvelle que l'entendement découvre n'est qu'un jugement critique porté sur une vérité déjà existante. Cette polarité du savoir nouveau et du savoir ancien implique, pour le monde de l'entendement, l'existence de vérités relatives exclusivement, c'est-à-dire de jugements ayant une force de conviction plus grande que d'autres jugements. La science critique repose sur la foi en la supériorité de l'intelligence d'aujourd'hui sur celle d'hier. C'est encore la vie qui nous impose cette foi.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 021.   

«La critique peut-elle donc résoudre les grands problèmes, ou seulement constater leur insolubilité ? Au début de la science, nous croyons à la première thèse; quand notre savoir s'élargit, nous trouvons la seconde plus sûre. Aussi longtemps que nous espérons, nous appelons le mystère problème.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 021.  

«Il y a donc pour l'être éveillé un double problème: celui de l'être éveillé et celui de l'être, ou bien de l,espace et du temps ou encore de la nature et de l'histoire, ou enfin de la tension et du tact: l'être éveillé ne cherche pas seulement à se comprendre soi-même, mais en outre à comprendre quelque chose qui lui est étranger. La voix intérieure a beau dire à chacun qu'il dépasse ici les possibilité de la connaissance, l'angoisse lui persuadera quand même de continuer ses recherches et de préférer la solution apparente au regard dans le néant.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 021. 

«L'être éveillé est fait de sensation et d'intelligence, dont la nature commune est une orientation constante sur leur rapport avec le microcosme. Être éveillé est en ce sens synonyme de 'constater', soit qu'il s'agisse des tentacules d'un infusoire ou de la pensée humaine à son plus haut degré. L'être qui se tâte lui-même arrive tout d'abord au problème de la connaissance.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 021-022.   

«On distingue entre deux éléments sensibles la cause et l'effet, ou entre deux spirituels le principe et la conséquence. Cela veut dire qu'on constate entre eux un rapport de puissance ou de rang. Étant donné un des éléments, l,autre existe nécessairement. En quoi le temps ne joue absolument aucun rôle. Il ne s'agit pas de faits de destin, mais de vérités causales, pas de date, mais de dépendance légale. C'est sans doute sur cette activité intellectuelle qu'on fonde les plus grands espoirs.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 022. 

«La vie peut subsister sans la pensée, mais la pensée n'est qu'une espèce de la vie. La pensée a beau s'arroger des fins prodigieuses, en réalité la vie se sert d'elle pour sa propre fin et lui assigne un but vivant tout à fait indépendant de la solution des problèmes abstraits. Pour la pensée, la solution d'un problème est juste ou fausse, pour le vie, elle a une valeur ou elle n'en a pas. Peut-être la vie a-t-elle atteint précisément son but, parce que la volonté de connaître a échoué au problème du mouvement ? En dépit de cet échec et précisément à cause de lui, le problème du mouvement reste le point central de toute pensée supérieure. Toute mythologie, toute science de la nature, est né de l'émotion sentie dans le mystère du mouvement.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 022-023. 

«... il est un fait incontestable dont l'observateur n'a pas conscience: c'est que son effort tout entier vise non la vie, mais à voir vivre, non la mort, mais à voir mourir.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 023. 

«La connaissance de la mort est la première qui a donné à l'homme, distinct de l'animal, sa conception du monde.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 023.

«Il y a des hommes de destin nés et des hommes de causalité nés. L'homme proprement vivant, paysan, guerrier, diplomate, général, mondain, marchand, tous ceux qui veulent s'enrichir, commander, gouverner, lutter, oser, l'organisateur, l'entrepreneur, l'aventurier, le champion, le joueur, est séparé par tout un monde de l'homme 'spirituel', saint, prêtre, savant, idéaliste, idéologue, dût ce dernier y être destiné par sa puissance de pensée ou par son manque de sang. Être et être éveillé, tact et tensions, instincts et concepts, organes de circulation et organes du toucher, il est rare de trouver un homme supérieur en qui ne prévale absolument l'un ou l'autre de ces caractères. Sont encore refusés au spéculatif tous les ressorts vivants de l'instinct: coup d'œil de connaisseurs, d'hommes et de situations; foi en une étoile, que possède tout homme voué à l'action, et absolument différent de la certitude en la justesse d'un point de vue; voix du sang qui passe à l'acte; bonne conscience inébranlable, qui justifie chaque but et chaque moyen. Les pas mêmes d'un homme des réalités ont une autre résonance, une base plus solide que ceux du penseur ou du rêveur, en qui le microcosme pur est incapable d'entrer en rapport avec la terre ferme.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 024.  

«Le destin a fait l'individu tel ou tel, timide savant à lunettes ou audacieux indifférent à la pensée. Mais l'homme d'action est un homme entier, le spéculatif possède un organe particulier qui voudrait agir sans le corps ou contre lui. Tant pis si la réalité en souffre.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 024. 

«... seul le héros, l'homme de destin, vit en définitive dans le monde réel, le monde des résolutions politique, militaires, économiques, où concept et systèmes ne comptent point.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 024. 

«La marque de l'homme d'État est la parfaite assurance du regard dont il observe toute cette masse animée, dans sa puissance et sa durée, dans sa direction et son but, se formant et se dissolvant dans la vague du temps; mais malgré le chef, c'est encore le hasard qui décide s'il sera capable de maîtrises ces foules ou se laissera emporter par elles.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 026. 

«... peu importe qu'un homme soit né pour la vie ou pour la pensée, puisque tant qu'il agit ou réfléchit, il reste éveillé et, comme tel, toujours 'dans l'image', c'est-à-dire voué à un sens unique, comme celui que le monde lumineux qui l'entoure possède précisément pour lui en ce moment.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 027. 

«L'élément chronologique, au sens très large de dates, noms et nombres, nous montre que l'histoire, dès qu'elle est pensée, est incapable de se soustraire aux conditions fondamentales de tout être éveillé. Dans l'image naturelle, le subjectif, qui existe toujours, est l'élément étranger et trompeur; dans l'image historique, c'est l'objectif également inévitable, le nombre qui sont trompeurs.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 027. 

«La nature porte la marque de l'étendue qui embrasse tous. L'histoire, au contraire, est ce qui sort d'un passé obscur pour se ruer sur l'observateur et continuer, de là, sa route vers l'avenir.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 027.

«... la nature et l'histoire s'opposent comme la critique pure et la critique apparente, critique comprise comme s'opposant à l'expérience de la vie. La science naturelle est critique et rien de plus. Dans l'histoire, au contraire, la critique ne peut que garantir le savoir sur lequel le regard de l'historien développe son horizon. L'histoire, c'est ce regard même, quel que soit son objet. Quiconque possède ce regard peut comprendre historiquement chaque situation et chaque fait. La nature est un système, et tous les systèmes s'apprennent.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 028. 

«De même qu'il [l'homme] a tenté, dans l'image historique, de découvrir le fondement des derniers phénomènes de la vie, de même il s'efforce ici, dans l'image naturelle, de constater les dernières vérités de la nature. Ce qui dépasse son intelligence, il l'appelle divinité, et ce qui est en deçà, il veut le comprendre causalement comme effet, création ou révélation de cette divinité.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 029. 

«Chaque somme de constats naturels a donc une double tendance, qui est restée invariable depuis les temps les plus reculés. L'une a pour but un système, le plus complet possible, de savoir technique servant à des fins pratiques, scientifiques et militaires; beaucoup d'espèces animales l'ont développée à la perfection, et elle mène en droite ligne, à travers les découvertes de l'homme primitif concernant le feu et les métaux, au machinisme actuel de la culture faustienne. L'autre tendance ne s'est formée qu'après que le langage articulé a affranchi la pensée purement humaine du phénomène de la vision; elle a pour but un savoir théorique tout aussi parfait que le précédent, appelé religieux dans sa forme originaire, scientifique dans sa forme dérivée et tardive, qui est celle des grandes cultures.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 029. 

«Chaque organisme ne sent la vie et les destinées d'autrui que par rapport à soi.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 030. 

«Comme virtualité suprême, chaque culture possède en tant qu'organisme synthétique une image primaire qui est pour elle le symbole du monde historique, et dont toutes les vocations particulières, des individus ou des groupes, agissant comme organismes vivants, sont des reproductions. quand on dit d'un autre qu'il a une intuition profonde, superficielle, originale, triviale, manquée, surannée, on le juge toujours, sans s'en rendre compte, en considération de l'image historique, réclamée dans le moment comme étant le rapport constant du temps et de l'homme.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 031.  

«Entre le concept goethéen de perfection de la forme et le concept darwinien d'évolution, il y a toute l'antithèse du destin et de la causalité, mais aussi celle de la pensée allemande et de la pensée anglaise, ou enfin de l'histoire de l'Allemagne et de l'histoire de l'Angleterre.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 035. 

«Actif ou spéculatif, chaque être marche vers la perfection, et il y va par époques; ce sont précisément ces époques qu'il faut admettre dans l'histoire du système solaire et du monde des étoiles fixes. L'origine de la terre, l'origine de la vie, l'origine de l'animal libre de ses mouvements sont des époques de ce genre, et donc des mystères à admettre sans plus.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 036-037. 

«... la culture primitive formait une force et un tout, un élément extrêmement vivant et actif; elle n'est si différente de la nôtre que par les virtualités psychiques que nous possédons, nous autres hommes des hautes cultures; si bien qu'il nous est permis de douter si ces peuples, qui enjambent si profondément sur les deux époques de la culture, peuvent, dans leur état actuel d'être et d'être éveillé, nous permettre des conclusions sur l'état de l'époque primitive.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 037.

«Dans tout être primitif, l'action cosmique du "il" impersonnel est si puissante et si immédiate que le microcosme n'obéit dans toutes ses manifestations, mythe, morale, technique, ornement, qu'à l'impulsion absolument momentanée. Aucune règle, connaissance pour nous, ne régit la durée, le temps, l'évolution de ces manifestations.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 039. 

«Tout primitif est une somme, la somme des formes d'expression des associations primitives. La haute culture est l'être éveillé d'un formidable organisme unique qui change non seulement les mœurs, le mythe, la technique, l'art, mais encore les races et les classes, qui en sont les membres, en représentants d'un langage formel unitaire ayant son histoire unitaire. La plus vieille histoire du langage appartient à la culture primitive et possède ses destinées propres, chaotiques, impossibles à dériver de l'ornement ou de l'histoire du mariage, par exemple. Mais l'histoire de l'écriture appartient à celle de l'expression des hautes culture individuelles.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 039. 

«La pensée historique a donc ce double devoir à remplir: 1° entreprendre une étude comparative des courants de vie individuelle de chaque culture, ce problème dont on reconnaît la nécessité n'a pas encore eu de solution; 2° vérifier, quant au sens et sous leur aspect fortuit et irrégulier, les relations de ces cultures entre elles. La méthode commode et superficielle de la causalité a résumé jusqu'ici toute cette confusion dans le terme de 'marche' de l'histoire universelle. Mais elle a rendu ainsi la psychologie, si délicate et si féconde de ces relations, aussi impossible que celle de la vie intérieure des cultures mêmes. Ce second problème suppose, au contraire, que le premier est résolu.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 041. 

«... l'histoire humaine est si difficile ;à séparer de l'histoire du paysage, elle reste si profondément liée à elle par des milliers de racines, qu'il est tout à fait impossible, sans elle, de comprendre la vie, l'âme et la pensée.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 042, note 1. 

«La culture arabe est une découverte. Les Arabes tardif en ont soupçonné l'unité, mais les historiens d'Occident l'ont totalement méconnue, à tel point qu'on ne trouve même pas un nom propre pour la nommer. La terminologie régnante voudrait que la période tardive seule fût arabe, la préculture et la première période, araméennes. Un nom positif manque. Les cultures jusqu'ici se juxtaposaient de si près que leurs civilisations étendues se sont superposées à l'infini. La préhistoire arabe même, qu'on peut suivre chez les Perses et les Juifs, dépendait entièrement du vieux monde babylonien, tandis que la première période restait bannie sous le charme de l'antiquité venue de l'Ouest et justement parvenue à l'apogée de la civilisation. Des traces de civilisation égyptienne et indoue y sont sensibles. Mais l'esprit arabe a ensuite exercé son charme, souvent sous le masque antique, sur la culture occidentale débutante, et la civilisation arabe, qui s'est superposée dans l'âme du peuple en Espagne, en Provence, en Sicile, à la civilisation antique non encore entièrement éteinte de nos jours, est devenue le moule où s'ébaucha l'éducation de l'esprit gothique ...» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 045. 

«La vie n'est-elle donc un fait que si on en parle dans les livres ?» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 049.

«L'histoire scientifique, ou selon ma terminologie, le tact physionomique, c'est le décret du sang, la connaissance des hommes, élargie et étendue au passé et à l'avenir, le coup d'œil inné pour les personnes et les situations, pour ce qui était événement réel, pour ce qui était nécessaire, pour ce qui a dû exister, et non la simple critique scientifique et la connaissance des dates. Chez l'historien pur, l'expérience scientifique est secondaire ou postérieure. Elle prouve une seconde fois en détail, par les moyens intellectuels et linguistiques, à l'être éveillé, ce que l'être a déjà éprouvé en un moment d'illumination.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 050. 

«Je proteste ici contre deux hypothèses qui ont toujours vicié la pensée historique: l'hypothèse d'une fin unique pour l'humanité entière et l'hypothèse qui nie toute fin en général. La vie a une fin: celle d'accomplir le but impliqué dans sa génération.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 051. 

«L'"homme historique", [...], est l'homme d'une culture en voie d'accomplissement; avant, après et hors de cette culture, il n'a pas d'histoire. Et alors la destinée du peuple dont il fait partie lui est tout aussi indifférente que celle de la terre considérée, non par le géologue, mais par l'astronome.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 051.  

«... l'homme est sans histoire non seulement avant la naissance d'une culture, mais de nouveau dès qu'une civilisation s'est constituée dans sa forme définitive, et qu'elle a donc consommé le développement vivant de la culture, épuisé les dernières virtualités significatives de l'être.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 051. 

«Avant et après une culture, le rôle joué par les siècles n'est guère plus considérable que celui joué par les décades, et même souvent, par les années à l'intérieur de cette culture.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 052. 

«Religion, science, art sont des activités de l'être éveillé qui ont pour fondement un être. Foi, réflexion, figuration et tout ce que ces invisibles réclament d'activité visible, sacrifices, prières, expériences physiques, travail du statuaire, formulation d'une expérience en termes transmissibles, sont des activités de l'être éveillé et rien de plus. Les autres hommes n'y voient que ce qui est visible et n'y entendent que les mots. Quant au sentiment éveillé en eux à cette occasion, c'est une épreuve personnelle dont ils ne peuvent déterminer les rapports avec celle que l'auteur lui-même a vécue.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 055.  

«L'historien avide de causalité ne compte que les influences qui existent; il nous manque un calcul en sens contraire. Car à la psychologie des influences positives appartient celle des 'négatives'. Et à cette psychologie extrêmement féconde, qui résoudrait la première toute la question, personne n'a osé attaquer. Tant qu'on lui tournera le dos, on verra toujours apparaître l'image, faussées dans ses fondements, d'une histoire universelle à progrès continu, où rien ne se perd.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 056. 

«La sensation active et l'intelligence de l'observateur ne s'inquiètent jamais du sens originel de la forme, mais de cette forme elle-même où ils découvrent la possibilité de création personnelle. Les significations sont intraduisibles. Rien ne tempère la profonde solitude psychique qui s'interpose entre l'être de deux hommes d'espèce différente.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 056. 

«En réalité, l'homme magique a tiré, du tréfonds de sa conscience cosmique dualiste une expression de son être éveillé religieux et c'est ce langage que nous appelons 'le' christianisme.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 058.  

«Le droit antique est un droit créé par des citoyens pour des citoyens. Le régime politique sur lequel il se fonde naturellement est la polis. De cette forme fondamentale de l'être collectif résulte premièrement et naturellement le concept de la personne, considérée comme organisme humain intégral et identique au corps (sôma) de l'État. Tel est, pour le sentiment cosmique des anciens, le fait formel d'où est né tout le droit antique. § Persona est donc un concept spécifiquement antique et n'a de sens et de valeur que dans les seules limites de cette culture. L'individu-personne est un corps (sôma) qui appartient à l'existence de la polis. Le droit de la polis se rapporte à lui exclusivement.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 059. 

«Le droit romain a été à travers toute son évolution celui d'une cité particulière au milieu de plusieurs centaines d'autres, le droit grec au contraire n'a jamais formé une unité.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 060. 

«Identique en apparence, mais d'un sens tout à fait différent, et donc propre à révéler le gouffre qui sépare le droit antique du droit occidental, est un trait génial du droit anglais, spécifiquement germanique: le pouvoir créateur du juge en matière de procédure.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 061. 

«Tout droit occidental porte la marque du futur, tout droit antique celle du moment.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 062.

«Sous sa forme abstraite la plus simple, chaque droit renferme l'image cosmique de ses auteurs, et chaque image cosmique de l'histoire une tendance politico-économique, indépendante de la pensée théorique de tel ou tel, mais dépendant de la volonté pratique de la classe, qui a en mains le pouvoir effectif et donc le droit de légiférer. Chaque droit a pour auteur une classe particulière légiférant au nom de tous.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 063. 

«Les législations sont donc toutes des actes politiques, et des actes politiques d'un parti.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 063. 

«La jurisprudence antique est une science des Romains et est restée leur seule science.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 065. 

«Le droit antique est un droit des corps. Il distingue, dans la matière cosmique, des personnes corporelles et des choses corporelles dont il fixe les rapports mutuels comme une mathématique euclidienne de la vie publique. La pensée juridique est la plus étroitement apparentée à la pensée mathématique. Toutes deux veulent abstraire du donné optique le hasard sensible, pour ne extraire le principe intellectuel: forme pure de l'objet, type pur de la situation, liaison pure de la cause à effet.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 065-066. 

«La première création du droit arabe fut le concept de la personne acorporelle. § [...]. §Et il se produit ici une sorte de miracle: du droit des cités-États individuelles, évident sur le sol antique, est né dans un calme parfait le droit des communautés de foi. Événement tout à fait magique ! C'est toujours une pneuma, un même esprit, une connaissance et une compréhension identiques de la même vérité absolue, qui communie chaque fois les adeptes de la même religion dans une unité de volonté de d'action, dans une personne juridique. Une personne juridique est donc un organisme collectif qui, comme tout organisme humain, possède des intentions, prend des résolutions, assume des responsabilités.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 066. 

«... le cosmos du droit magique ne connaît pas de connubium entre deux croyants différents.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 067.

«Le droit antique est créé par des citoyens en vertu d'expériences pratique, le droit arabe vient de Dieu qui l'annonce par l'esprit de ses élus et illuminés.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 070. 

«L'Oriental ne demande à connaître ni l'intention pratique de la loi, ni les fondements logiques du jugement. Le rapport du cadi avec les justiciables ne peut donc être comparé à celui du préteur en général. Celui-ci étaie ses jugements sur une connaissance qui a fait ses preuves dans de hautes situations données, celui-là sur un esprit qui agit en quelque manière en lui et s'exprime par lui. Mais il résulte de là, entre le juge et le droit écrit, un rapport tout différent, selon qu'il s'agisse du préteur et de ses édits ou du cadi et de ses textes juridiques. L'édit est la quintessence des expériences que le préteur a fait siennes, les textes juridiques sont une sorte d'oracle interrogé en secret.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 070. 

«Le courant fondamental qui circule à travers notre histoire juridique est la lutte du livre et de la vie. Le livre occidental n'est ni un texte sibyllin, ni un texte magique avec un sens caché, mais un fragment d'histoire conservé. C'est un passé comprimé qui veut entrer dans l'avenir et y entrer grâce à nous, liseurs, qui en ranimons la substance.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 076. 

«... la pensée juridique est contrainte de se rapporter à des choses tangibles, Les concepts juridiques doivent s'abstraire d'éléments concrets. Et c'est là leur fatalité: au lieu d'être tirés des mœurs rigides et rigoureuses de l'être social et économique, ils furent abstraits prématurément et trop tôt de la littérature latine. Le juriste occidental devint philologue, substituant ainsi à l'expérience pratique de la vie une expérience livresque, fondée en soi exclusivement et consistant dans la dissection pure, dans la combinaison logique de concepts abstraits.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 076.

«La profonde amertume avec laquelle on oppose capitalisme et socialisme, depuis le début de la vie économique occidentale civilisée, vient en grande partie de ce que la pensée juridique savante, et par elle, celle de l'élite en général, rattachent à des états et à des organisations de la vie antique, des concepts aussi décisifs que ceux de personne, de chose et de propriété. Le livre s'interpose entre les faits et l'idée qu'on s'en forme.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 077.

«Un ordre savant est étranger au monde. Il méprise l'expérience extérieure à la pensée.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 077. 

«Notre science juridique jusqu'à ce jour a donc été ou philologie de la langue juridique ou scolastique des concepts juridiques. C'est la seule science qui continue à tirer des universaux le sens de la vie.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 077-078.  

«Il faut remplacer la science philologique par une expérience sociale économique.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 078. 

«... nous sommes dominés encore par le concept antique de la chose corporelle. Notre vie est différente. Notre expérience instinctive est toute de concepts fonctionnels sur la capacité de travail, l'esprit d'invention et d'entreprise, les énergies, aptitudes et talents spirituels, dont la théorie très avancées est une photographie authentique de notre mode de vie actuel, prouve, par la théorie de l'électricité, qu'elle ignore en général le vieux concept de corps. Pourquoi donc notre droit est-il impotent, par principe, en face des grands faits économiques actuels ? Parce qu'il considère aussi la personne comme un corps seulement.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 078. 

«Chaque droit est coutumier dans une mesure impossible à exagérer, car la loi a beau définir les termes, la vie seule les interprète.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 079. 

«Notre pensée rattache au mot de propriété la définition statique de l'antiquité, faussant ainsi dans toutes ses acceptions le caractère dynamique de notre matière de vivre. Volontiers nous abandonnerions ces subtilités aux rêves éthérés des esthètes, aux abstractions des juristes et des philosophes et aux absurdes chicanes des doctrinaires politiques; mais l'intelligence de l'histoire économique tout entière repose sur la métaphysique de ce seul concept.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 079. 

«Les Romains ont créé une statique juridique, notre tâche est une dynamique juridique. Pour nous, la personne n'est pas un corps, mais une unité de force et de volonté, et la chose non un corps, mais un but, un instrument et une création de cette unité.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 079. 

«... pour nous, l'organisateur, l'inventeur, l'entrepreneur, sont des forces productives agissant sur d'autres forces exécutives en leur donnant une direction, une tâche et des moyens d'action propres. Les deux forces relèvent de la vie économique non comme possesseurs de choses, mais comme représentants d'énergies.» — O. SPENGLER. Chapitre I. Le déclin de l'Occident (Vol. II). Gallimard. Paris, 2007. p. 079-080.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire