mardi 5 octobre 2010

Oswald Spengler — Le déclin de l'Occident I (Chapitre IV)

[Avec mises à jour périodiques. — With periodical updates.]

VEUILLEZ NOTER: En faisant la publicité de ces pensées, le rédacteur de ce site n'endosse en aucune façon la signification de leur contenu. Si elles sont présentées ici, c'est qu'elles nous semblent offrir une matière importante à réflexion, par la pertinence de leur thématique ainsi que par la clarté de leur énonciation et des implications qui peuvent en découler. Par ailleurs, nous encourageons ceux qui y seront exposés à l'esprit de critique et de discernement le plus développé, afin d'en retirer non seulement la «substantifique moëlle», selon l'expression de Rabelais, mais encore la vérité la plus haute qu'elles pourraient celer, en relevant le défi de retrouver la vérité suprême, là où elle veut bien se révéler, y compris dans son expérience de vie immédiate, à l'esprit qui la recherche avec engagement, conviction et passion.


[MUSIQUE ET PLASTIQUE]


«Le sentiment cosmique de l'homme supérieur, abstraction faite des représentations mathématico-physiques et de la symbolique des concepts fondamentaux de ces représentations, s'est exprimé dans les arts plastiques dont le nombre est illimité. La musique aussi est de ce nombre, et si, au lieu de la séparer du domaine des arts picturo-plastiques, ses historiens en avaient intégré les modalités très diverses, un progrès très sérieux eût été accompli dans l'intelligence de cette évolution vers un but. Mais tant qu'on verra dans la différence entre les moyens optiques et les moyens acoustiques plus qu'un caractère extérieur, on ne comprendra jamais l'impulsion créatrice plastique qui régit ces arts averbaux.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 213.


«Les arts sont des unités vivantes et le vivant ne se laisse pas disséquer.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 214.

«Un art est un organisme, non un système. Il n'y a pas de genre artistique franchissant tous les siècles et toutes les cultures.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 215.


«Ce n'est pas l'instrument technique ni le seul langage formel, c'est le choix même du genre artistique qui est un moyen d'expression.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 216.

«Toute architecture antique part de l'extérieur, toute architecture occidentale part de l'intérieur. L'architecture arabe part aussi de l'intérieur, mais elle ne va pas plus loin.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 217-218.


«La première grande architecture est la mère de tous les arts qui suivent. Elle en fixe le choix et l'esprit. C'est pourquoi l'histoire de la plastique antique n'est qu'un labeur incessant pour perfectionner cet idéal unique: la conquête du corps humain individuel, considéré comme la quintessence du présent pur et objectif.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 218.

«La cathédrale est musique, dans le château, on fait la musique. La première débute par la théorie, la seconde par l'improvisation: ainsi se distinguent l'être éveillé de l'être tout court, le chantre sacré du chevalier. L'imitation est plus voisine de la vie et de la direction et elle commence donc par la mélodie.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 223.


«Le gothique embrasse la voie entière jusque dans ses recoins les plus cachés. Il a créé un nouvel homme, un monde nouveau. De l'idée du catholicisme à l'idée d'État chez les empereurs germanique, du tournoi chevaleresque à l'aspect des villes naissantes, précisément à cette même époque, de la cathédrale à la lutte paysanne, de la formation de la langue à la parure des fiancées de campagne, de la peinture à l'huile à la chanson des troubadours: à tous et à chacun le gothique a imprimé le langage d'une symbolique unitaire.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 226.

«La Renaissance cultive d'une manière tout à fait exclusive une architecture de l'espace qui lui a été prescrite par le gothique, avec cette seule différence que cette architecture respire un calme lumineux et raisonné opposé aux assauts des tempêtes nordiques, c'est-à-dire qu'elle est méridionale, ensoleillée, bienheureuse, pleine d'abandon. Là seulement est la différence. Il n'y a pas eu de pensée constructive nouvelle. On peut réduire cette architecture presqu'aux façades et aux cours..» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 228.


«Le lointain change l'espace en temps. Horizon signifie avenir.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 234.

«... la matière a une nature immédiatement sensible, elle raconte. L'espace a une nature transcendante, il parle à l'imagination.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 235.


«Un art spatial est a priori a philosophique.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 236.

«Le Christianisme d'Occident est à celui d'Orient ce que le symbole de la perspective est au fond doré, et le schisme définitif est entré presque en même temps dans l'Église et dans l'art. L'arrière-plan paysagiste de la scène plastique est conçu en même temps que l'infini dynamique de Dieu; et en même temps que les fonds dorés des tableaux d'église, disparaissent des conciles d'Occident ces problèmes magiques, ontologiques, de la divinité qui avaient secoué tous les conciles d'Orient, comme ceux de Nicée, d'Éphèse et de Chalcédoine.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 242.


«Une œuvre d'art antique est un événement, une occidentale un acte. L'une symbolise un présent ponctiforme, l'autre un courant organique.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 243.

«Si l'ambiance de l'homme, quelles qu'en soient d'ailleurs les autres qualités, est un macrocosme en regard d'un microcosme, un ensemble extraordinaire de symboles, il faut que l'homme lui-même soit compris dans cette symbolique, dans la mesure où il apparaît à la chaîne du réel, où il est phénomène. Mais dans l'impression de l'homme sur son semblable, qu'est-ce qui pouvait prétendre au rang de symbole, concentrer en soi son essence et les rendre sensibles à l'œil ? L'art a donné la réponse à cette question.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 248.


«Une chose est absolument décisive pour se faire une image métaphysique, éthique ou esthétique de l'homme: c'est de savoir si l'individu se sent comme corps parmi les corps ou comme centre d'un espace infini, s'il se soucie de connaître la solitude de son moi ou sa participation substantielle au consensus commun, s'il en affirme ou nie le caractère de direction grâce au tact et au mouvement de sa vie. C'est dans tout cela que le symbole primaire de la grande culture se manifeste. Avec ces sentiments cosmiques, les idéals vitaux montrent un accord parfait.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 248.

«On n'a jamais encore senti l'antithèse entre ces deux choses: le nu et le portrait, et c'est pourquoi on n'a jamais considéré toute la profondeur de leur manifestation historique dans l'art. Ce n'est pourtant que dans le duel de ces deux idéals formels que se révèle l'opposition complète de deux univers. Là, un être se présente aux regards dans l'attitude de sa structure externe. Ici, c'est la structure interne de l'homme qui parle, c'est l'âme qui s'exprime par sa 'face' comme l'intérieur de la cathédrale par sa façade.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 251.


«Au lieu du latin sum, gothique im, on dit: ich bin, I am, je suis; au lieu de fecisti, tu habes factum, tu as fait, du habes gitân, et de même daz wîp, un homme, man hat. C'est resté jusqu'ici une énigme, parce qu'on a considéré les familles linguistiques comme des êtres. Mais l'énigme se résout, dès qu'on découvre dans la phrase la copie d'une âme.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 251.

«L'expérience de la profondeur est un devenir qui produit un devenu; elle signifie le temps qui évoque l'espace; elle est à la fois historique et cosmique. La direction va vers l'horizon comme son avenir.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 252.


«Confesser ne signifie pas avouer une action, mais en déclamer devant le juge l'histoire intérieure; l'action est connue de tous, ses racines sont le secret personnel.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 253.

«Le nu est au portrait ce que le corps est à l'espace, la durée à l'histoire, le plan antérieur à la profondeur, le nombre euclidien au nombre analytique, la musique à la fonction.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 255.


«L'idée de la maternité implique celle du devenir infini. La femme mère est temps, est destin. De même que l'acte mystique de l'expérience de la profondeur tire de l'élément sensible la chose étendue, et donc le monde, la maternité engendre l'homme corporel en tant que membre individuel de ce monde, où il a désormais son destin. Tout symbole du temps et du lointain est aussi symbole de la maternité. Le sentiment primaire de l'avenir est le souci, et tout souci est maternel.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 256.

«Grâce au nom, quelque chose de l'être nommé passe par enchantement dans l'objet, où tout le monde peut l'y voir aussi désormais.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 258.


«Aucun homme Renaissance authentique ne connaît de développement intérieur. Il était capable de vivre tout entier en dehors.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 261.

«L'artiste et l'humaniste Renaissants sont les seuls occidentaux pour qui le mot d'isolement est un mot creux. Leur vie est achevée à la lumière de l'être courtois. Leurs sentiments et leurs sensations sont populaires, exempts de honte de de désappointement secret.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 261.


«La Renaissance est fille de l'entêtement. Aussi manque-t-elle de profondeur, d'étendue et d'assurance dans ses instincts plastique. C'est la seule époque qui fût plus conséquente dans la théorie que dans l'action.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 262.

«Une musique secrète est toujours et partout sensible.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 263.


«Voler, se libérer de la terre, se perdre dans la vastitude de l'espace cosmique, n'est-ce pas faustien au suprême degré ?» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 267.

«La lutte entre la main et l'âme, entre l'œil et l'outil, entre la forme voulue par l,artiste et celle voulue par son époque reste toujours la même — celle entre la plastique et la musique.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 268.


«L'impressionnisme est l'inverse du sentiment euclidien de l'univers. Il tend à s'éloigner le plus possible du langage de la plastique pour se rapprocher de la musique.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 274.

«En peinture et en musique, le rôle de l'impressionniste est de créer au moyen de traits, de taches ou de sons, une image dont la substance est inépuisable, un microcosme pour l'œil ou l'oreille de l'homme faustien, c'est-à-dire de vaincre par l'art la réalité de l'espace infini, en le contraignant pour ainsi dire à se manifester au moyen d'une allusion toute fugitive et quasi incorporelle à un objet quelconque. Art de faire mouvoir l'immobile et qu'on a jamais tenté une seconde fois.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 275.


«Le nouvel artiste est ouvrier, non créateur. Il juxtapose des couleurs spectrales non brisées. [...]. Art dangereux, tourmenté, froid, malade, fait pour des nerfs superfins, mais scientifique à l'extrême, énergique en tout ce qui concerne la domination des résistances techniques, simplifié comme un programme, vrai satyre qui se joue de la plus grande peinture à l'huile ...» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 277.

«La marque de tout art vivant, harmonie parfaite entre le vouloir, le devoir et le pouvoir, évidence du but et inconscience des moyens de réalisation, unité de l'art et de la culture: tout cela est du passé.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 280.


«Liberté et nécessité étaient jadis identiques. Maintenant on appelle liberté un manque de discipline.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 280.

«Évoquer un monde de l'espace au moyen de traits et de taches colorés fut l'art dernier et le plus sublime des impressionnistes.» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 281.


«Quel niveau, intérieur et extérieur, que celui de tout ce qu'on appelle aujourd'hui art et artiste !» — Oswald SPENGLER. «Chapitre IV». In Le Déclin de l'Occident (Vol. I). Gallimard. Paris, 2007. p. 282.

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